| FUTÉ1, ÉE, adj. A.− [En parlant d'un animé] 1. [En parlant d'une pers.] Qui fait preuve d'adresse, d'intelligence, de ruse. Synon. débrouillard, finaud, malicieux, malin.Et, comme Marianne se récriait, disant qu'elle avait rarement vu une fillette si intelligente et si jolie, madame Lepailleur répondit plus doucement : − C'est bien vrai qu'elle est futée (Zola, Fécondité,1899, p. 465): C'est l'échantillon de l'écolier sage, toujours décoré, toujours inscrit au tableau d'honneur; tablier noir bien tiré, bien boutonné; intelligence moyenne, droite, pas futé, mais appliqué.
Frapié, Maternelle,1904, p. 88. − Emploi subst. Synon. malin.Vous avez tous vomi sur les fûtés qui viennent ici, une pipe définitive au coin du bec, qui ne montent pas une seule fois sur les lignes, et qui rentrent à Paris pour débiner le boulot de Magnin − sans parler du nôtre (Malraux, Espoir,1937, p. 681).Bon, bon, vous me croyez ivre... Et pourquoi n'avez-vous pas fait disparaître la bouteille plus tôt, vieux futé (Bernanos, M. Ouine,1943, p. 1373). 2. [En parlant d'un animal] Qui fait preuve de ruse. Les parterres en friche sont hantés par un animal futé que s'occupe à chasser M. Quecq : c'est un renard (Chateaubr., Mém.,t. 3, 1848, p. 421). B.− [En parlant d'un trait de physionomie, d'un aspect du comportement] Qui dénote de la malice, une intelligence rusée. Un air, un sourire futé. Les jolies mines riantes et futées (Taine, Notes Paris,1867, p. 72).Ce gamin aux yeux futés, dont la faculté de singerie étonnait le quartier (Bourget, Conflits int.,1925, p. 85). Prononc. et Orth. : [fyte]. Cf. futaie. La graph. fûté qu'on peut rencontrer ds la docum. (cf. Malraux, loc. cit.) s'explique d'apr. fût (cf. étymol. 2ehyp.). Étymol. et Hist. 1645 (Corneille, Suite du Menteur, II, 7). Part. passé adjectivé de se futer av. 1621 « s'instruire par l'expérience [en parlant d'un animal, qui ayant manqué d'être capturé, sait esquiver les pièges] » (Du Vair, Actions et traictiez oratoires, Remonstr. aux habit. de Marseille, p. 190-91 ds Hug. : Les plus stupides bestes..., estans une fois eschapées du piège, se futent et n'y retornent plus), pour l'orig. duquel 2 hyp. ont été avancées : 1) ce verbe serait une forme dial. de l'Ouest pour *se fuiter, dér. de fuite* (FEW t. 3, p. 838b; Bl.-W5; cf. les formes agn. du type futif [a. fr. fuitif « fugitif »] 1remoitié xiiies., Ste Modwenne, 8350, 8448 ds T.-L., et xives. ds Gdf.); 2) ce verbe serait issu de l'a. fr. fuster (dér. de fust, fût* « morceau de bois, bâton, trique ») « battre » (1174-77, Renart, éd. M. Roques, 6639), « tromper » (début xiiies., R. de Houdenc, Veng. Raguidel, 4950 ds T.-L.; ce dernier sens étant prob. issu de celui de « maltraiter, abuser », cf. dauber2), d'où futé « instruit par une expérience malheureuse, ayant acquis la rouerie nécessaire pour esquiver les mauvais coups »; cette évolution sém. se serait faite à partir du vocab. rural (cf. norm. [Manche] cheval fûté « cheval brutalisé, devenu méchant ») et du vocab. cynégétique (cf. Jônain : Fûter : faire venir à l'appeau le gibier et ne pouvoir ou ne vouloir le prendre), v. DG; L. Spitzer ds Mod. Lang. Notes, t. 59, 1944, pp. 233-235; EW F S2; R. Lepelley, Parler norm. du Val de Saire, p. 334, § 482, note 47; cette 2ehyp. paraît préférable à la 1resi l'on admet que malgré la chronol. futé a précédé se futer. Fréq. abs. littér. : Futé : 61. Fûté : 12. Bbg. Chaurand (J.). Fr. mod. 1976, t. 44, p. 278. − Spitzer (L.). To foist − fustiller Mod. Lang. Notes. 1944, t. 59, pp. 233-235. |