| * Dans l'article "FULMINER,, verbe." FULMINER, verbe. A.− Emploi intrans. 1. Courant a) Dans le domaine concr. − [Le suj. désigne une divinité] Lancer la foudre. Alors le Seigneur apparut dans l'éclair, le tonnerre et les trompettes; il fulminait et grondait (Arnoux, Calendr. Fl.,1946, p. 217). − P. anal., rare. [Le suj. désigne une chose] Briller de tous ses feux, resplendir. Sur des bancs, fulminaient les robes vermillon des enfants de chœur (Huysmans, Oblat, t. 1, 1903, p. 254).La cuvette de laque vermillon où elle empile ses hardes à un rebord d'or qui éclate et qui fulmine au soleil de la solennité (Claudel, Connaiss. Est,1907, p. 118). b) Au fig. [Le suj. désigne une pers.] Éclater en invectives ou menaces, exploser sous l'effet de la colère. Il arrivait que Joseph la montrât [une lettre] à sa femme pour rire ou fulminer tout son content devant témoin (Duhamel, Passion J. Pasquier,1941, p. 163).M. Churchill fulminait et jurait qu'il défendrait Spears (De Gaulle, Mém. guerre,1956, p. 351). ♦ Fulminer contre (qqc.).William Blake fulminait contre l'abus des idées générales (Barrès, Cahiers,t. 4, 1906, p. 136).Je l'entends fulminer contre une exposition (Proust, Guermantes 2,1921, p. 527). ♦ Fulminer contre (qqn).La princesse s'anime, devient rouge, fulmine contre Haussmann (Goncourt, Journal,1867, p. 374).Il a tonné et fulminé contre ceux qui, ayant un pouvoir quelconque, en abusent pour opprimer leurs subordonnées (Bloy, Journal,1904, p. 217). − P. méton. [Le suj. désigne un mode d'expression] La lettre, dont il nous lit la copie, fulmine contre un écrivain « immonde » dont Claudel ne veut « même pas se rappeler le nom » (Gide, Journal,1931, p. 1095). 2. CHIM. Faire explosion. Cette composition, cette poudre fulmine au moindre choc (Ac.).Le sel neutre obtenu du suc saturé par la potasse détonne et fulmine sur les charbons ardens (Kapeler, Caventou, Manuel pharm. et drog.,t. 1, 1821, p. 203). B.− Emploi trans. 1. [Le compl. désigne une chose] a) DR. CANON. Publier (une condamnation) dans les formes prévues. Fulminer une excommunication. La cour de Rome fulminoit des bulles pour prévenir ces atrocités (Chateaubr., Génie,t. 2, 1803, p. 565).Après que l'anathème eut été fulminé dans la cathédrale, la foule se rendit en procession à l'esplanade (Billy, Introïbo,1939, p. 194). ♦ Fulminer contre (qqn).Le pontife fugitif fulmine, contre le plus puissant souverain du monde, la sentence de déposition (Montalembert, Ste Élisabeth,1836, p. xix).La bulle « spondent pariter quas non exhibent » que le pape Jean XXII fulmina contre les alchimistes (Huysmans, Là-bas,t. 1, 1891, p. 124). − P. anal. Décréter avec éclat. Les religions se trompent dès l'instant qu'elles font de la morale et qu'elles fulminent des commandements (Camus, Chute,1956, p. 1530). ♦ Emploi pronom. passif. Le 31 janvier (1656), jour même où se fulminait en Sorbonne la dernière sentence (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 3, 1848, p. 90). b) P. ext. [En parlant d'une opinion émise] Formuler avec violence (une critique, un jugement négatif). Le jugement passionné fulminé unanimement par les partis politiques (Hugo, Rhin,1842, p. 234).Il fulminait des imprécations, il s'emportait contre Finot (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 408).Je n'ai nul dessein de fulminer une irritante philippique à la propriété (Proudhon, Syst. contrad. écon.,t. 1, 1846, p. 99). ♦ En incise. Carajo! cono! fulmina Blas, hors de soi, s'il ne fait pas des excuses, je l'étrangle net (Cladel, Ompdrailles,1879, p. 338). ♦ Fulminer contre (qqn).Un avocat général fulminant un réquisitoire contre un criminel (Ponson du Terr., Rocambole,t. 2, 1859, p. 220).Les pamphlets que les surréalistes, comme on a pu dire, « fulminèrent » à mainte occasion les uns contre les autres (Breton, Manif. Surréal.,2eManifeste, 1930, p. 81). ♦ Emploi pronom. passif. Chez Monsieur des Grassins, où se fulminèrent de terribles imprécations contre l'ancien maire (Balzac, E. Grandet,1834, p. 119). − Rare. [Avec un compl. d'obj. non péj.] Formuler avec vigueur. Ces images d'une étrange mathématique réalisée (...) que dessine ou fulmine la symphonie (Valéry, Variété I,1924, p. 104). 2. Rare. (À rapprocher, supra, de A 1 a).[Le compl. désigne une pers.] Foudroyer : ... Un bloc dans chaque main, Cédar, ferme à sa base,
Les fulmine d'en haut, les pile, les écrase :
A chaque coup qu'il lance un forfait est puni.
Il enfonce d'un bloc le cœur de Zebdani (...)
Sur le corps de son père Abna précipité
Va tomber sous le bloc qu'il avait apporté (...)
Chacun tombe à son tour sous ces carreaux broyé.
L'infatigable bras dont tout est foudroyé,
Des murs qu'ils ont bâtis pour un autre supplice,
Abat ces criminels sous leur propre injustice...
Lamart., Chute,1838, p. 907. REM. 1. Fulminement, subst. masc.,rare. Fait de détoner, de fulminer (d'apr. Rob. Suppl. 1970). 2. Fulminateur, subst. masc.Personne qui a l'habitude de fulminer. Avez-vous remarqué Grapin le fulminateur? (Morand, P. de Saligny,1947, p. 136). Prononc. et Orth. : [fylmine], (il) fulmine [fylmin]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. I. 1. 1330 « lancer la foudre » (G. de Digulleville, Pelerinage vie humaine, 7855 ds T.-L.); fig. av. 1657 « s'emporter en violentes menaces » (Cyrano, Lettres diverses, 13 ds IGLF); 2. 1774 terme de chim. « faire explosion » (Buffon. Minéraux ds DG). II. 1398 « lancer au nom de l'Église une fulmination » (Douet D'Arcq, Pièces Charles VI, 141 ds IGLF). Empr. au lat. fulminare « lancer la foudre ». Fréq. abs. littér. : 65. |