| FROIDEMENT, adv. D'une manière froide. A.− Vx ou littér. À une température sensiblement inférieure à celle du corps humain (v. froid I A 1 a). C'est l'après-midi de novembre qui commence, froidement, et va se continuer longuement, obscurément (Alain-Fournier, Corresp.[avec Rivière], 1906, p. 300).Fontaine, ma fontaine, eau froidement présente, Douce aux purs animaux, aux humains complaisante (Valéry, Charmes,1922, p. 126). − En partic. (v. froid I A 1 c). ,,De telle sorte qu'on est exposé au froid. Vous êtes logé, vêtu bien froidement`` (Ac. 1835, 1878). B.− Au fig. 1. En gardant son calme, en contrôlant ses sentiments, ses émotions; en n'étant pas ardent, passionné. Examiner froidement un problème. [Napoléon Ier] parle froidement, sans passions, sans préjugés, sans ressentiment, des circonstances et des personnes qui remplissent sa vie (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 207).− Sois calme, Des Lourdines, et envisageons froidement la situation (Châteaubriant, Lourdines,1911, p. 92): 1. ... descendant de cheval à côté des artilleurs inexpérimentés de 1813 et de 1814, il leur enseignait froidement la manœuvre à travers une grêle de boulets qui pleuvaient tout autour de l'héroïque leçon.
Lacord., Éloge fun. Drouot,1847, p. 45. − En partic., péj. D'une manière qui manque totalement de sensibilité, d'humanité. Asservissez, tourmentez, mais du moins ayez un but; soyez iniques et froidement atroces, mais du moins ne le soyez pas en vain (Senancour, Obermann,t. 1, 1840, p. 171).Un meurtre prémédité, longuement mûri, froidement exécuté, assumé sans remords (Bernanos, Mauv. rêve,1948, p. 1021): 2. ... un chien (...) mourant de faim, étant venu aboyer à la portière, tout en causant avec lui, il l'avait froidement tué d'un coup de revolver...
Goncourt, Journal,1895, p. 726. 2. P. ext. a) D'une manière réservée, distante et parfois hostile. Ses conseils avaient été reçus froidement, parfois même avec des gestes d'impatience mal dissimulée (Theuriet, Mais. deux barbeaux,1879, p. 39).Sur ces mots, Bénin prit un visage sévère, salua froidement, remonta sur sa machine et s'éloigna d'un coup de pédale (Romains, Copains,1913, p. 85): 3. Madame De Beauséant, incapable de fermer sa porte, ce qui eût été fort inconvenant, recevait si froidement les gens et contemplait si studieusement sa corniche, que chacun comprenait combien il la gênait.
Balzac, Goriot,1835, p. 80. b) Dans le domaine de l'art.D'une manière qui manque de chaleur humaine, de sensibilité. Lu dans les Annales archéologiques de Didron une notice intéressante, quoique froidement écrite, sur Hemling, le peintre de ma Vierge d'hier (Barb. d'Aurev., Memor. 3,1856, p. 49).La Venise de certains peintres est froidement esthétique dans sa partie la plus célèbre (Proust, Fugit.,1922, p. 626): 4. Vene, dans une position charmante, est à la source du Clitumme. Le Poussin a reproduit ce site chaud et suave; Byron l'a froidement chanté.
Chateaubr., Mém.,t. 3, 1848, p. 411. Prononc. et Orth. : [fʀwadmɑ
̃]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Début xives. froidement vestues « de façon à avoir froid » (Ovide Moralisé, éd. C. de Boer, I, 3965); av. 1370 « sans empressement » (J. Le Bel, Chron., éd. Viard et Deprez, I, 139). Dér. de froid1*; suff. -ment2*. Fréq. abs. littér. : 1 259. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 277, b) 2 905; xxes. : a) 1 349, b) 1 042. |