| FRIVOLITÉ, subst. fém. A.− Gén. au sing. Caractère de ce qui, de celui (celle) qui est frivole. 1. [Souvent suivi d'un compl. de n. désignant un inanimé abstr. ou concr.] . Manque de sérieux, futilité. a) [Le compl. désigne un inanimé abstr.] La frivolité héréditaire de ses préoccupations (Proust, Prisonn.,1922, p. 231). b) [Le compl. désigne un inanimé concr., gén. accessoire de toilette, élément de décoration] La frivolité de sa coiffure (Green, Journal,1928-34, p. 274).La périlleuse frivolité de vos chapeaux (Colette, Fanal,1949, p. 114). 2. [Gén. suivi d'un compl. de n. désignant une pers., ou ses activités, ou l'un de ses attributs, physiques ou mor.] a) [Absol. ou suivi d'un compl. désignant une pers.] Caractère d'une personne dont l'esprit est occupé essentiellement de choses sans importance, ou qui traite à la légère des sujets sérieux. Éternelle frivolité des vieillards que j'ai tant de fois constatée (Green, Journal,1945, p. 209).Ah! cette frivolité, ce manque de sérieux, ces histoires de bars, de bridge et d'argent! (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 248): 1. Il pouvait enfin revoir Élisabeth, mais il la trouva si changée qu'il en fut atterré. Elle était plus gaie, plus vivante qu'autrefois, mais d'une incroyable frivolité. Il l'avait connue grave, enthousiaste; maintenant indifférente aux idées, occupée seulement d'amusements puérils, de bals, de conversations niaises, elle ne vivait plus que pour « le monde ».
Maurois, Ariel,1923, p. 62. − Spéc., dans les relations amoureuses. Inconstance, infidélité. Je dois avouer que c'est un peu à cause de cette frivolité que je l'ai aimée... (Meilhac, Halévy, Froufrou,1869, I, 11, p. 30). b) [Suivi d'un compl. de n. ou un adj. abstr. désignant surtout un trait intellectuel, mor. ou affectif] Tendance à la légèreté, à l'inconstance. Frivolité d'esprit (de l'esprit), de caractère, de sentiments. Il y a dans ce jeune homme une frivolité de sentiments, une absence de tendresse singulière (Delécluze, Journal,1824, p. 78).Cette frivolité morale est écœurante (Amiel, Journal,1866, p. 57). c) Loc. adv. Avec frivolité. Avec légèreté, désinvolture. La jeune femme accueillit ce projet [de voyage] avec passion et frivolité (Noailles, Domination,1905, p. 54). 3. Emploi abs. La frivolité. Disposition, inclination pour tout ce qui est sans importance, léger ou vain. La dissipation et la frivolité ne sont pas de si grandes sottises (Chamfort, Max. et pens.,1794, p. 56).Toujours chanceuse [la réussite], sans cesse comprise par la distraction, l'étourderie et la frivolité (Jankél., Je-ne-sais-quoi,1957, p. 115): 2. La frivolité est un état fort sérieux. Ce n'est point la même chose que légèreté, ni qu'insouciance, ni qu'ignorance; ce n'est point du tout naïveté. L'ingénu n'est nullement frivole; au contraire il prend tout sérieusement et porte sa lanterne dans tous les coins. Le frivole sait très bien où sont les mauvais coins, mais il s'en détourne. Qui n'a pas chanté dans la nuit pour se donner du courage?
Alain, Propos,1921, p. 287. B.− Gén. au plur. Actions, objets frivoles. 1. Actions, occupations légères, futiles. Synon. bêtises, futilités.Toutes les personnes qui lorgnaient (...) les deux sœurs pouvaient les croire occupées de frivolités en admirant leurs rires ingénus (Balzac, Fille Ève,1839, p. 176).La Copine allait à ses frivolités de vieille femme (...) parlottes empoisonnées, déjeuners provinciaux (Colette, Chéri,1926, p. 220): 3. Son enfance [de la grande Mademoiselle], d'ailleurs, et sa première jeunesse se passèrent dans les frivolités, dans une vie toute de cérémonial et de divertissement, dans les bals, les comédies, les collations, sans que personne fût là pour l'avertir qu'il y avait au monde quelque chose de plus sérieux.
Sainte-Beuve, Caus. lundi,t. 3, 1851, p. 505. − Spéc. Aventures galantes. Synon. fredaines.Les amis du plaisir (...) n'ont point à user de leur propre cœur pour les frivolités passagères (Barrès, Barbares,1888, p. 151).Des femmes de Lima en mal de frivolités, de liberté, de plaisirs défendus (Morand, Folle amour.,1956, p. 247). 2. Propos, écrits frivoles. Dire, écrire des frivolités; s'entretenir, parler de frivolité(s). Que mes amis plus sévères, qui traitent ces petits volumes de frivolités, se rassurent; je n'en ferai plus (Renan, Feuilles dét.,1892, p. 111).Tout en nous entretenant de mille frivolités, nous nous étions insensiblement séparés du reste de la société (Milosz, Amour. initiation,1910, p. 58). 3. Sens concr. a) Objets insignifiants, sans grande utilité ou considérés comme tels. Synon. babioles.Un chapelet d'argent? Frère Jérôme ne veut plus de frivolités (Salacrou, Terre ronde,1938, p. 195). b) Accessoires de la toilette féminine (bijoux, vêtements) généralement sans valeur. Marchande, magasin de frivolités. Synon. colifichets, franfreluches : 4. ... elle choisit entre mille objets, essaye un chapeau, puis un autre, ajoute ou retranche une fleur, compose sa parure d'une simple gaze ou d'une riche broderie, et, après quatre heures de ce travail, charge son coureur de cartons, et remonte dans sa voiture pour se parer le soir de ces brillantes frivolités.
Janin, Âne mort,1829, p. 139. c) BROD. (gén. au sing.). Feston de dentelle exécuté avec une navette et un (ou deux) crochet(s), et dont l'assemblage permet d'obtenir des fleurs, des rosaces, etc. Un fauteuil garni d'une têtière en frivolité (Martin du G., Vieille Fr.,1933, p. 1033).Passer de longues soirées (...) sous la lampe (...) à travailler la mignardise, la frivolité ou à tirer l'aiguille à petits points (Guèvremont, Survenant,1945, p. 50). Prononc. et Orth. : [fʀivɔlite]. Ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. Av. 1718 « caractère de ce qui est frivole » (Abbé Regnier des Marais ds Trév. 1752); 2. 1760 « chose frivole » (Caracioli, Le Livre de quatre couleurs, p. 28 ds Fr. mod. t. 37, p. 126); 3. 1812 « dentelle » (Jouy, Hermite, t. 2, p. 177). Dér. de frivole*; suff. -ité*. Fréq. abs. littér. : 312. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 473, b) 198; xxes. : a) 381, b) 587. |