| FRINGUER, verbe. A.− Emploi intrans., vieilli. Gambader, manifester, par des gestes, la fougue, l'allégresse. Le danseur (...) l'avait lâchée [la femme] et (...) il fringuait, tel un poulain échappé, dans ce bal (Lorrain, Phocas,1901, p. 106).La folie de la jeunesse les faisait un peu trop fringuer de joie et les poussait, comme à cent hasards à cent farces fantasques (Pourrat, Gaspard,1922, p. 139). − En partic. [En parlant de chevaux] Bill [le poney] qui a le sentiment inné des convenances, ne fringuait plus, allongeait un sabot triste (Arnoux, Solde,1958, p. 146). B.− Emploi trans., pop. Habiller, vêtir. Être bien, mal fringué. Synon. frusquer (pop.), nipper (fam.).À travers ses doigts entr'ouverts il regarde à quel genre d'homme il a affaire et comme l'homme est plutôt mal fringué le saint-père est un peu inquiet (Prévert,Paroles,1946,p. 154).« ... − Salut les voyageurs! » dit Vincent gaiement; il siffla d'admiration : « Comment que tu es fringuée!... » (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 96): ... il me reste les quatre-vingts de l'housteau, c'est entendu que la famille me fringue : mais s'il y a un ressemelage de souliers, des mouchoirs à acheter, une chemise, des fixe-chaussettes, tu ne penses pas que j'attends les vacances?
Aragon, Beaux quart.,1936, p. 362. − Emploi pronom. réfl. Il se fringuait comme l'oncle Arthur... en fier artiste exactement, avec barbiche, lavallière, tatanes longuettes (Céline, Mort à crédit,1936, p. 189). Rem. La docum. atteste un emploi vx, fringuer (un verre). Y verser de l'eau et l'agiter afin de le rincer. Ce déjeuner avait été (...) une merveille (...) les couverts et les cristaux fringués à miracle (Richepin, Miarka, 1883, p. 93). Prononc. et Orth. : [fʀ
ε
̃ge]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1462 intrans. « gambader, sauter, danser » (Cent Nouvelles Nouvelles, éd. F. P. Sweetser, XLVII, 91); b) 1507 part. prés. adj. fringant « vif, alerte » (N. de La Chesnayes, Condamnation de banquet, éd. P. L. Jacob, Recueil de farces, p. 451); 2. a) 1460-66 intrans. « se faire valoir, parader, poser » (Martial d'Auvergne, Arrêts d'amour, éd. J. Rychner, VIII, 58); b) 1478-80 part. prés. adj. fringant « qui a de l'éclat, brillant, pimpant, élégant » (G. Coquillart,
Œuvres, éd. M. J. Freeman, Droitz nouveaux, 19); c) 1590 trans. « rincer (des verres) » (Tabourot des Accords, Escraignes dijonnoises, 19 ds Hug.); d) 1878 (Rigaud, Dict. jargon paris., p. 162 : Fringuer. Habiller. − Se fringuer, s'habiller. − Bien fringué, bien mis). Dér. de fringues*, étymol. I; dés. -er. Le sens de « rincer, laver (des verres) » semble venir de ceux de « rendre brillant, propre » ou de « remuer, faire sauter l'eau dans » et il n'est pas nécessaire d'avoir recours à une orig. germanique (a. h. all. hreinjan « purifier » d'où all. rein « pur » à l'orig. de fringue selon G. Paris ds Revue critique, 1867, p. 332). Fréq. abs. littér. : 11. Bbg. Bugge (S.). Étymol. rom. Romania. 1875, t. 4, p. 357. − Gebhardt (K.). Les Francoprovençalismes de la lang. fr. R. Ling. rom. 1974, t. 38, p. 194. − Lew. 1960, p. 13, 14, 157. − Nicholson (G.G.). Ét. étymol. R. Ling. rom. 1929, t. 5, pp. 41-50. − Straka (G.). En relisant Menaud, maître-draveur. Mél. Imbs (P.) 1973, p. 286. − Thurneysen 1884, p. 99. |