| FRATERNEL, ELLE, adj. A.− 1. Qui est propre, qui appartient à un frère. Louis acquitte les dettes fraternelles (Chateaubr., Mém.,t. 3, 1848, p. 551).La voix fraternelle reprit : « Qu'y a-t-il? Tu es malade? » (Duhamel, Passion J. Pasquier,1945, p. 218). 2. Qui concerne les liens d'affection entre les enfants issus de mêmes parents. Attachement, dévouement fraternel. Il n'y a pas de frère qui ait un cœur plus fraternel que le tien pour moi, que le mien pour toi (Lamart., Corresp.,1832, p. 290).Tout est fraternel dans Oreste, tout est Oreste! (Giraudoux, Électre,1937, I, 8, p. 87). ♦ Expr. La corde fraternelle. Je n'ai pas la corde fraternelle (Colette, Cl. école,1900, p. 34). − Emploi subst., fam. Synon. de frère.Je comptais que mon fraternel m'enverrait des pépettes pour les manœuvres (Bruant1901, p. 232). − Au fig. Qui se sent de la même parenté, de la même famille. Nos deux esprits ont quelque chose de si fraternel, que je crois que c'est deux éditions du même ouvrage (Balzac, Mém. jeunes mariées,1842, p. 363).J'en conclus que les esprits fraternels se rejoignent vite, qu'on a peu de vrais « amis inconnus » (Proust, J. filles en fleurs,1918, p. 571). B.− P. anal. [En parlant de pers. qui ne sont pas de la même famille] 1. [Qualifie la force affective de liens unissant entre elles deux pers. unies comme deux frères ou comme un frère et une sœur] Affectueux, amical, cordial. Charité, confiance, amitié fraternelle. Gilbert avait compris que ce riche avait une âme fraternelle, une espèce de tendresse dévouée et singulière (R. Bazin, Blé,1907, p. 265): 1. Blérot était mon ami d'enfance, mon plus cher camarade; nous n'avions rien de secret. Nous étions liés par une amitié profonde des cœurs et des esprits, une intimité fraternelle, une confiance absolue l'un dans l'autre. Il me disait ses plus délicates pensées, jusqu'à ces petites hontes de la conscience qu'on ose à peine s'avouer soi-même. J'en faisais autant pour lui.
Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Sage, 1883, p. 916. − P. ext. Plein d'amitié, d'amour. Je souhaitais les hommes fraternels, libres et heureux (Saint-Exup., Pilote guerre,1942, p. 370): 2. Les enfants m'entourent. Les femmes sourient et sanglotent. Les hommes me tendent les mains. Nous allons ainsi, tous ensemble, bouleversés et fraternels, sentant la joie, la fierté, l'espérance nationales remonter du fond des abîmes.
De Gaulle, Mém. guerre,1956, p. 230. 2. [Qualifie les manifestations du sentiment fraternel] Qui exprime l'affection, l'amitié. Un visage fraternel; passer un bras fraternel autour des épaules de qqn. J'eusse été heureux de serrer à Londres toutes ces mains si fraternelles et si cordiales (Hugo, Corresp.,1849, p. 8).Que le geste de ce rude Samaritain est attentif, délicat, fraternel! Quel moyen de résister tout à fait à cette tendresse inconnue? (Bernanos, Soleil Satan,1926, p. 171). SYNT. Accueil, baiser fraternel; accolade fraternelle; agapes fraternelles. − En partic. (dans la relig. cath.). Qui s'adresse à son prochain. Charité fraternelle. ♦ Correction fraternelle. Réprimande douce, discrète, faites dans un esprit de charité fraternelle. Ainsi selon les Constitutions, « pour l'exercice réciproque de la correction fraternelle », sœur Perpetua et la novice devaient avoir chaque mois une heure d'entretien seule à seule (Jouve, Paulina,1925, p. 174). REM. Fraternaliste, adj.Où l'on affiche un sentiment de fraternité. Dans l'entreprise fraternaliste, le président ne s'appelle plus président et encore moins monsieur le président, mais Paul, s'il se prénomme Paul (Elle,19 oct. 1970, p. 9, col. 1).Emploi subst. Personne qui affiche un sentiment de fraternité. Le président Feldman − Jean pour son équipe − est un fraternaliste de la première heure (Elle,19 oct. 1970, p. 9, col. 2). Prononc. et Orth. : [fʀatε
ʀnεl]. Enq. : /fʀateʀnel/. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. Mil. xiies. « qui concerne les relations entre frères (ici de chrétiens) » (Sanson de Nantuil, Proverba Salomonis ds Bartsch-Horning, 152, 26). Dér. du lat. class. fraternus « fraternel, de frère », dér. de frater (frère*); suff. -el*. Fréq. abs. littér. : 917. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 176, b) 1 166; xxes. : a) 1 371, b) 1 446. Bbg. Reinheimer-Rîpeanu (S.). Faux dérivatifs, faux dér. B. de la Soc. roum. de ling. rom. 1971/72, t. 8, pp. 61-67. − Thiele (J.). Zu Problemen und Methoden der romanistischen Wortbildungsforschung. Beitr. rom. Philol. 1975, t. 14, no1, p. 159. |