| FLÉTRIR1, verbe trans. A.− [Le compl. d'obj. dir. désigne un végétal] Faner entièrement. La chaleur, le vent flétrit les fleurs. Un miracle offrirait à nos bois quelque prodigieuse orchidée, mille mains aussitôt se tendraient pour l'arracher, la flétrir (Gide, Journal,1910, p. 302). − Emploi pronom. à sens passif. Des fleurs achevaient de se flétrir dans une flûte de porcelaine (Duhamel, Suzanne,1941, p 87). B.− P. anal. 1. [Le compl. d'obj. dir. désigne certaines parties du corps hum.] Faire perdre vitalité, éclat. La souffrance, les chagrins flétrissent le visage. Les yeux (...) sont soulignés par les plis dont l'âge s'est plu à flétrir la paupière (Béguin, Âme romant.,1939, p. 153): 1. Les vapeurs de ces marais ne tardèrent pas à flétrir ces traits, les plus beaux, dit-on, qui dans ce siècle eussent paru sur cette terre.
Stendhal, Amour,1822, p. 78. − Emploi pronom. à sens passif. Je vis son teint pâlir, ses joues se creuser, ses appas se flétrir... Oh! comme la beauté est une chose fragile et fugitive! (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 235). 2. [Le compl. d'obj. dir. désigne une chose, spéc. une étoffe] Décolorer, ternir. Le grand air flétrit les couleurs (Littré). C.− Au fig. 1. Dépouiller de sa fraîcheur. Flétrir l'âme, le cœur. Les chagrins ont flétri sa jeunesse (Ac.1932).L'habitude (...), loin de flétrir l'imagination, lui rend, au contraire, plus chers les mêmes mobiles d'activité (Maine de Biran, Influence habit.,1803, p. 103): 2. Tous ces hommes géométriques (...) croyaient avoir désséché pour toujours en nous ce qu'ils étaient parvenus en effet à flétrir et à tuer en eux, toute la partie morale, divine, mélodieuse, de la pensée humaine.
Lamart., Destinées poés.,1834, p. 378. − Emploi pronom. à sens passif. Si ma mauvaise étoile, enfin, est la plus forte, Si je sens par degrés mon âme se flétrir Et se miner mon corps (Brizeux, Marie,1840, p. 97). 2. Ôter l'innocence, la pureté; corrompre. En écoutant des moqueries sur ceux qui nous sont chers, on flétrit ce que l'affection a de pur et d'exalté (Staël, Allemagne, t. 4, 1810, p. 397): 3. L'amour qu'il avait eu pour Magdeleine était si pur et si céleste, qu'il eût cru le profaner et le flétrir par un désir...
Karr, Sous tilleuls,1832, p. 95. Rem. La docum. atteste l'emploi intrans. de flétrir (supra A). Se faner entièrement. Le blé qui ne pourrira pas, Qui ne flétrira point aux ardeurs de l'été (Péguy, Tapisserie N.-D., 1913, p. 678). REM. Flétrissant, ante, part. prés. adj.Qui flétrit (supra A). P. métaph. Quand l'âge aura sur nous mis sa main flétrissante, Que pourra la beauté, quoique toute-puissante? (Chénier, Élégies,1794, p. 45). Prononc. et Orth. : [fletʀi:ʀ], (je) flétris [fletʀi]. Demi-longueur ds Passy 1914 de la voyelle de 1resyll. Ds Ac. dep. 1694. Ac. 1694 et 1718 : flestrir. Étymol. et Hist. 1. a) intrans. 1remoitié du xiies. fleistrir « perdre sa forme naturelle, son port et ses couleurs (d'une plante) » (Psautier de Cambridge, 36, 2 ds T.-L.); b) trans. ca 1160 flestir (Enéas, éd. J. J. Salverda de Grave, 6194); 2. trans. ca 1160 flestir fig. « faire perdre son éclat, sa fraîcheur » (ibid. 6196). Dér. de l'a. adj. flaistre, flestre « flétri, flasque » (xiies. ds T.-L.); du lat. class. flaccidus « flasque, mou ». DÉR. Flétrissement, subst. masc.,littér. [En parlant d'une pers.] Action de se flétrir; résultat de cette action. Le blanchissement des cheveux, le flétrissement de la peau, etc... marquent les étapes de la durée (Carrel, L'Homme,1935, p. 197).Un flétrissement, une sorte de décoloration générale faisait d'elle une précoce vieille fille (Billy, Introïbo,1939, p. 244).− [fletʀismɑ
̃]. − 1resattest. a) 1912 p. métaph. (Faure, Hist. art, p. 342 : le lent flétrissement de la dernière fleur gothique eut un parfum pénétrant), b) 1935 « altération de la fraîcheur, de la beauté » (Carrel, loc. cit.); du rad. du part. prés. de flétrir1, suff. -(e)ment1*. − Fréq. abs. littér. : 3. BBG. − Gohin 1903, p. 231 (s.v. flétrissant). |