| FESSE, subst. fém. Souvent au plur. A.− [Chez l'être humain] 1. Chacune des deux éminences charnues formées de tissus musculo-adipeux situées au-dessous et en arrière de la crête iliaque. a) [En emploi libre] Fesses maigres, musclées; gras de la fesse. Synon. du plur. croupe (fam.), cul (vulg.), derrière (fam.) fessier, miches (vulg.).Les fesses fermes et en pointe de l'adolescence sont dues à un tissu graisseux dense et résistant (Richer, Nouv. anat. artist.,t. 2, 1920, p. 77).La mère, chaque fois qu'elle soulève une fesse pour se défatiguer de la station assise, en profite pour péter (Montherl., Pte Inf. Castille,1929, p. 591).Le patron (...) rêvait aux moyens de faire relier en peau de fesse de femme certain livre érotique dont il examinait les gravures d'un regard luisant, avec un sénile tremblotement du chef (Aymé, Travelingue,1941, p. 47): 1. ... la jambe lestement pliée sous elle, ce qui fait que la fesse ne pose pas; cette lourde partie de la femme devient gracieuse en se détachant et se laissant caresser de l'œil dans sa rondeur.
Michelet, Journal,1842, p. 459. SYNT. Fesses charmantes, flasques, gentilles, larges, mignonnes, molles, nues, pointues, velues; fesse droite, gauche; convexité, muscles, naissance, raie des fesses; appliquer, donner une claque sur les fesses; botter les fesses de qqn; flanquer, mettre son pied aux, dans les fesses; pincer, piquer, serrer les fesses; à (grands) coups de botte, de pied dans les fesses. ♦ P. méton. Partie du vêtement correspondant aux fesses. Des pantalons (...) percés aux fesses (Giraudoux, Folle,1944, I, p. 44). b) Loc. fam. et vulg. Rem. Dans la plupart des loc. fesses (au plur.) est une var. atténuée de cul. − Botter, cirer, frotter les fesses de qqn; donner sur les fesses. Corriger, battre, fesser quelqu'un; menacer d'une correction. Il serait heureux de la voir battre. − Si j'étais toi, dit-il à son gendre, je lui tannerais les fesses (Giono, Colline,1929, p. 19).− Si tu rentres chez le père sans ton compte de galoches, gare à tes fesses! (Bernanos, Mouchette,1937, p. 1273). ♦ Se claquer, se taper (sur) la/les fesse(s). Synon. se claquer, se taper (sur) les cuisses.L'autre, qui s'était mis debout, se donna une claque sur la fesse, en criant : − Ah! tu sais, baise cadet!... Garçon, deux litres de vieille! (Zola, Assommoir,1877, p. 458).Non, je ne suis pas fin, oh! je le sais bien... Mais quand je lâche un gros calembour en me claquant la fesse, je fais gicler de la vie (Aymé, Brûlebois,1926, p. 84). − [Indiquant une position; la direction de qqn, qqc. par rapport à une pers.] ♦ Envoyer qqn fesses par(-)dessus tête. Renverser, culbuter quelqu'un par un choc brutal. Synon. cul* par(-) dessus tête.« Père l'antique », ayant accroché par le cou l'autre godelureau (...), l'envoya fesses par-dessus tête demander au plancher des vaches si le « balayeur des fanfarons » avait encore, quoiqu'il grisonnât, du poil quelque part! (Cladel, Ompdrailles,1879, p. 59). ♦ Poser ses fesses. S'asseoir. Il entra dans une fureur dangereuse. (...) on avait tout chauffé, sans y en laisser... à lui... lui qu'avait fricoté, et pas encore posé ses fesses! (Benjamin, Gaspard,1915, p. 40). ♦ Avoir (qqn, qqc.) aux fesses. Par derrière, dans le dos. Synon. avoir (qqn, qqc.) au cul*.On est fin prêt pour barrer. Même qu'on a le zef aux fesses (Esn.Poilu1919, p. 237).Être recherché, poursuivi. Avoir, foutre la police aux fesses (de qqn). L'aurait tôt fait (...) d'fair si belle escandale equ' j'aurais quasiment toute la paroisse aux fesses (Martin du G., Gonfle,1928, I, 7, p. 1196). − [Indiquant un état, une posture qui résulte d'un sentiment de crainte, de malaise, de gêne] ♦ Serrer les fesses; avoir les fesses qui jouent du tambour, des castagnettes, qui crient bravo. Avoir peur. À cette voix enrouée, Gervaise s'éveilla comme d'un cauchemar (...) le trac lui serra les fesses (Zola, Assommoir,1877, p. 688). ♦ Être assis sur une fesse. Être dans une position inconfortable (tant moralement que physiquement). Dans l'antichambre (...) les deux visiteurs n'attendirent guère. Assis sur une fesse ils n'en menaient pas large (Arnoux, Crimes innoc.,1952, p. 292). ♦ Ne pas savoir sur quelle fesse s'asseoir. L'autre tourne sa casquette comme une chique et ne sait sur quelle fesse s'asseoir (Goncourt, Journal,1857, p. 369). − Au fig.
α) [Indiquant un comportement, une manière d'agir] ♦ N'y aller que d'une fesse. Agir mollement, sans entrain, sans s'engager complètement. Ils ne vont à la tranchée que d'une fesse (Esparbès, Chevauchée Gd S.,1937, p. 105): 2. Rosso n'a-t-il pas eu honte d'exhiber aux rieurs la honte de sa pauvre mère (...). Tandis qu'elle monte sur son fils ridiculement et d'une fesse (le proverbe existait déjà), tandis qu'il vous la fait voir par le côté triste et grotesque, il la rend infiniment touchante par l'expression.
Michelet, Journal,1857, p. 366. ♦ Avoir le feu aux fesses. Être pressé, agir rapidement; courir très vite. Synon. avoir le feu au cul*.Me voilà donc en train de courser le gamin qui avait bien cent mètres d'avance sur moi, et le feu aux fesses par-dessus le marché (Aymé, Jument,1933, p. 57). ♦ Y a pas à tortiller (du cul et) des fesses. À chercher des détours, à hésiter. Synon. tourner autour du pot.S'il avait été tué, on lui aurait trouvé son corps, on l'aurait eu vu d'l'observatoire. Y a pas à tortiller du cul et des fesses (Barbusse, Feu,1916, p. 255).
β) [Indiquant un sentiment] ♦ [Pour témoigner sa satisfaction, sa joie] Se taper les fesses par terre. Synon. se taper le derrière, le cul* par terre.La joie était à son comble. On se tenait les côtes. On se tapait les fesses contre terre (Maran, Batouala,1921, p. 48). ♦ Avoir chaud aux fesses. ,,Avoir une chaude alarme`` (Littré, Rob.). ♦ [Pour énoncer un jugement de valeur par rapport à qqn, qqc.] Se battre les fesses d'une chose. S'en moquer. Va, je m'en bats les fesses, et n'en fais pas le fin (Larchey, Excentr. lang.,1862, p. 145).De mes fesses. De peu de valeur. Synon. de mon cul*, de mes deux.C'est − y q' t'es bête ou q' tu t'affaisses, sacré journaliste d'mes fesses? (BruantSuppl.1905, p. 437).On en est à se traiter de cafard, de saloperie volante, de con bénit, (...) de fumier de lapin et de républicain de mes fesses (Aymé, Jument,1933, p. 101). ♦ [Pour indiquer le mépris, l'exaspération, l'irritation] Je vous crache aux fesses. Synon. je vous pisse au cul*, à la raie.Vous avez parlé? Salaud! F... − Charogne! La Gouvernante. − Je vous signalerai. F... − Je vous crache aux fesses (Audiberti, Mal court,1947, III, p. 187).Mes fesses (!). Synon. mon cul* (!).Mes fesses, répondit Dominique qui paraissait excédé (Aymé, Puits,1932, p. 167). ♦ [Interjection servant à marquer un sentiment] Mille fesses. Dans ce temps-là, mille fesses, il y avait des femmes et des uniformes d'officier! (Aymé, Brûlebois,1926, p. 26). ♦ [Avec l'idée de renvoi; pour remettre qqn à sa place] Occupe-toi de tes fesses. Synon. mêle-toi, occupe-toi de tes affaires, de ce qui te regarde.Il eût été préférable que toutes ces grognasses s'occupassent de leurs fesses et que les types fissent, en passant, un peu de gringue à Ivich, pas trop : juste assez pour qu'elle se sente jolie (Sartre, Mort ds âme,1949, p. 57).[Mado à son amant :] T'es tout drôle. Pourquoi qu'tu prépares tes valises?... − Ta gueule!... Occupe-toi d'tes fesses (Le Breton, Rififi,1953, p. 200). 2. Fréq. dans des loc. Anus. Synon. trou du cul*.Si tu te crois plus malin que moi, tu n'as qu'à acheter toi-même. Ou alors gardes tes billets pour te torcher les fesses (Aymé, Uranus,1948, p. 183). ♦ Il n'y a pas plus de (qqn ou qqc.) que de beurre aux fesses. Synon. que de beurre au cul* : 3. − L'armistice, dit Guiccioli, qui riait toujours.
Pinette s'illumina.
− C'était de la colle?
− Un peu! (...) Il y a Lequier qui est venu nous faire chier : il voulait des nouvelles, on lui en a donné.
− Alors, dit Pinette (...), pas d'armistice?
− Pas plus d'armistice que de beurre aux fesses.
Sartre, Mort ds âme,1949, p. 78. ♦ En avoir plein les fesses. ,,Être fatigué, las`` (Rob.). Synon. en avoir plein le cul*, le dos. 3. [Avec une connotation sexuelle; en insistant sur le caractère érogène et sur l'attraction sexuelle liés à cette partie du corps humain] Le sexe, les activités sexuelles. Chacun sa nature, n'est-ce pas. Toi, c'est d'être la grosse paysanne, avec les fesses qui te mènent le caractère (Aymé, Vouivre,1943, p. 163): 4. C'était plein de branleuses notre pourtour... tout des traînardes à vingt ronds... (...). Elles me connaissaient bien à force (...). Je les faisais monter dans le burlingue au moment des rafles (...). On s'est fait des drôles de suçages dans le « coin du commanditaire »... Moi, j'avais droit à toute la fesse... entièrement à l'œil...
Céline, Mort à crédit,1936, p. 469. ♦ [P. allus. littér. Il disoit qu'il n'y avoit qu'un antistrophe entre femme folle à la messe et femme molle à la fesse (Rabelais, Pantagruel, xvi)] On voit toujours le Vésuve sous leur jupon. Erreur! L'Italienne se rapproche de l'Orientale et est molle à la fesse, « folle à la messe », comme eût dit ce vieux Rabelais (Flaub., Corresp.,1852, p. 456). ♦ Affaire, histoire de fesses. Affaire, histoire d'amour physique; pornographique (d'apr. Lexis 1975). Synon. histoire de cuisse*, de cul*. ♦ Peloter les fesses, pincer les fesses. Synonyme de mettre la main au cul*. Ça n'empêche sûrement pas les femmes des poilus boches de manger tranquillement leur choucroute ni de se faire pincer les fesses par les embusqués (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 125).S'il fallait faire attention à tous les voyageurs qui vous pelotent les fesses ou essayent de vous glisser un rancart (Queneau, Loin Rueil,1944, p. 76). 4. P. méton. [Désignant une pers.; souvent avec un déterminant qui précise la caractéristique ou la valeur symbolique de la pers.] a) Femme. I' déch'son fric avec des fesses (BruantSuppl.1905, p. 282). ♦ Y a de la fesse. Il y a des femmes (considérées comme des partenaires sexuelles possibles). Une ouvrière passe et nous regarde. Volpatte me donne un coup de coude, l'avale des yeux, le cou tendu, puis me montre plus loin deux autres femmes qui s'approchent; et, l'œil luisant, il constate que la ville abonde en élément féminin : − Mon vieux, il y a d'la fesse! (Barbusse, Feu,1916, p. 323).Tâchez de radiner par ici. Dis aux copains qu'il y a de la fesse et que tous les soirs je joue de la mandoline avec une jolie marraine de guerre (Cendrars, Main coupée,1946, p. 9). b) [Entrant dans la formation de dénominations ou appellatifs] − Quelle grue! s'écria-t-il, en redevenant grossier. Je vas t'asseoir sur ton panier aux crottes, tu sais, madame Belles-fesses! (Zola, Ventre Paris,1873, p. 815).Lina R... connue dans un certain milieu sous le nom suggestif de Nana-les-grosses fesses (Aymé, Travelingue,1941, p. 258). c) [En guise de désignation injurieuse] Personne méprisable, de peu d'intérêt. Vieille fesse; fesse de rat; face de fesse; peau de fesse. Le substitut. − Pied-plat! flaire-fesse!... Non, mais qu'il l'ait jamais, ma place!... (...) Je lui ferai savoir comment je m'appelle (Courteline, Client sér.,1897, 1, p. 9).− Jague! Hé, remonte un peu les châsses! − Ferme-la, dis, fesse d'huître! Ces messieurs se croient obligés de dominer les drames moraux de la conscience humaine (...) par l'engueulade courte et ciselée (Fargue, Piéton Paris,1939, p. 135). ♦ Fesse-mathieu*. ♦ Vx. Fesse-cahier. ,,Copiste qui gagne sa vie à faire des écritures`` (Littré; cf. également Ac. 1798, 1835). B.− [Désignant une partie du corps chez certains animaux] Région du membre postérieur qui s'étend depuis l'origine de la queue jusqu'à la naissance de la corde du jarret. Fesse(s) de singe, de truie, de vache; angle, pointe de la fesse. Le cheval blanc allait toujours, allongeant la tête, et la queue droite, une petite queue de rat sans poil dont il se battait les fesses de temps en temps (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Mais. Tellier, 1881, p. 1188).Debout, elle [la chienne] est pareille − large du rein, bien pourvue en fesse, le poitrail en portique − à un minuscule cob bai (Colette, Mais. Cl.,1922, p. 217). Rem. 1. Ac. gastr. signale ,,dans la langue actuelle, on n'emploie plus guère le mot fesse. On dit culotte et, pour le veau seul quasi ou cul qui est le terme exact``. 2. Besch. 1845 signale ,,Art culin. et bouch. La fesse du bœuf se nomme cimier, celle du mouton gigot, celle du porc jambon``. C.− [P. anal. de forme] MAR., au plur. ,,Parties arrondies de la voûte d'un navire qui forment la transition de la voûte à la muraille`` (Gruss 1952). Les fesses noires de la grosse barque immobile (Claudel, Part. midi,1949, I, p. 1099). REM. Fesse-lièvre, subst. masc.Synon. pop. de gentilhomme à lièvre (v. gentilhomme A 1).L'orateur ecclésiastique pour qui les moindres fesses-lièvres sont ducs et pairs (La Varende, Gentilsh.,1948, p. 180). Prononc. et Orth. : [fεs]. Ds Ac. 1694-1932. Homon. fèces. Étymol. et Hist. 1. Ca 1200 (Courtois d'Arras, éd. E. Faral, 491); 2. 1736 mar. (Aubin). Du lat. vulg. fissa, d'une part « anus, cul », d'autre part « fesses » plur. neutre, pris comme fém., de fissum « fente » (part. passé subst. de findere « fendre »), cf. aussi les correspondants rom. (REW3, no3329); a évincé l'a. fr. nache, nage attesté du xiieau xvies. (T.-L., Gdf.) du lat. vulg. *natica, class. natis, plur. nates « fesses »; v. FEW t. 4 p. 582a. Fréq. abs. littér. : 486. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 154, b) 325; xxes. : a) 918, b) 1 208. Bbg. Chautard (É.). La Vie étrange de l'arg. Paris, 1931, p. 69. − La Landelle (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 201. |