| FANAL, AUX, subst. masc. A.− Feu ou lanterne placé(e) en un endroit élevé pour servir de repère ou de signal dans la nuit. Déjà il découvre le fanal qui brûle au sommet de la tour du château (Jouy, Hermite,t. 4, 1813, p. 72). − En partic. a) HIST. (notamment au Moy. Âge). Feu placé au sommet d'une colonne creuse dans les cimetières. (Quasi-) synon. lanterne des morts.Ce n'est pas ces massiers et ces portiers des morts Qui nous allumeront notre dernier fanal (Péguy, Tapisserie N.-D.,1913, p. 872).Pour moi, ce phare du cimetière [l'oculus], ce fanal autour duquel tournoient dans la nuit les ombres, c'est le signe le plus émouvant de l'appel jeté par l'église au profond des mystères de la lande, la marque de sa bonté (Barrès, Pitié églises,1914, p. 341). b) Vx, NAV. MAR. Feu placé au sommet d'une tour, signalant l'entrée d'un port et les routes de navigation à proximité des côtes. Le fanal du môle. Synon. mod. phare.La petite tour carrée du fanal, ancienne et noire, au bout de la brève jetée déserte (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 138). Rem. On rencontre ds la docum. la forme faneau pour désigner un phare. La réserve et les petits lieux de plaisance aussi bien que les faneaux du rivage s'illuminaient (Sainte-Beuve, Pensées, 1852, p. 44). Tout ce que je demande, c'est un petit faneau à avoir soin : le petit faneau de l'Île des Barques, par exemple. Ben logé, ben chauffé. De l'huile en masse (Guèvremont, Survenant, 1945, p. 125). B.− 1. Vieilli. Source lumineuse servant d'éclairage, lanterne. Les fanaux de résine éclairaient les rues sombres où la foule bigarrée se bousculait avec des cris (Flaub., Corresp.,1849, p. 121).Un conducteur de train rentrait du service, fanal en main (Hamp, Champagne,1909, p. 80).Reflets cuivrés du gaz, reflets lunaires des fanaux électriques, reflets sanglants des bougies derrière les vitres des maisons (Rolland, J.-Chr.,Buisson ard., 1911, p. 1354): 1. Dans l'espace vide qui les séparait de ceux qui n'étaient condamnés qu'à mort, les soldats s'accroupirent auprès de leur fanal. Peu à peu têtes et regards retombèrent dans la nuit, ne revinrent plus que rarement à cette lumière qui au fond de la salle marquait la place des condamnés.
Malraux, Cond. hum.,1933, p. 407. 2. P. ext. Falot ou lanterne servant à signaler la position d'un véhicule. Murillo vit, à la lueur des fanaux de la chaise de poste, se développer un gros homme vêtu de noir (Ponson du Terr., Rocambole,t. 5. 1859, p. 98).Quand il atteignit le pont, il aperçut le fanal du dernier tramway prêt à partir (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, En fam., 1881, p. 352).Les locomotives modernes comportent un groupe électrogène (turbo-dynamo) qui fournit le courant alimentant les lampes situées dans l'abri ainsi que les fanaux portés par la machine et le tender (Bailleul, Matér. roulant ch. de fer,1951, p. 52). − Spéc., MAR. Lanterne servant à indiquer la position d'un bâtiment, à éclairer le bord. Un homme de ronde était venu allumer un fanal, dans une cage grillée, et tous les objets de la cale s'étaient éclairés confusément (Loti, Mon frère Yves,1883, p. 36).Sur les bateaux, des hommes en sentinelle veillent, hissent un fanal au haut des mâts (Morand, Londres,1933, p. 318): 2. Tout cela se passait à la lumière de torches, de fanaux et de projecteurs. Tu n'imagines pas ce que c'était lugubre. Les vagues étaient assez fortes, et tout ce qui n'était pas dans la clarté disparaissait de l'autre côté de la colline d'eau, dans la nuit.
Gide, Faux-monn.,1925, p. 980. 3. Au fig. ou p. métaph. Ce qui guide ou éclaire. Et ce fanal intérieur ne sera bientôt plus qu'une main de bois qui, sur les grands chemins, indique la route aux voyageurs (Staël, Allemagne,t. 4, 1810, p. 347).Les illusions, les erreurs, les ombres de la nuit s'éloignent; le fanal de la vérité illumine le monde (Flammarion, Astron. pop.,1880, p. 434): 3. ... vos deux grands traités m'éclairaient sur mon univers intérieur, en même temps que la psychologie de Dieu m'éclairait sur l'univers extérieur, d'une lumière qui, même aujourd'hui, reste mon dernier, mon inextinguible fanal dans la tempête.
Bourget, Disciple,1889, p. 98. Prononc. et Orth. : [fanal], plur. [-o]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. I. 1372 mar. fanar (Quittance de Saige, Doc. hist. relatifs à la seigneurerie de Monaco, t. 1, p. 479 d'apr. R. Arveiller ds Fr. mod. t. 26, p. 51, s.v. etrope). II. 1548 id. phanal (Rabelais, Quart Livre, éd. R. Marichal, chap. 19, p. 108); 1554 fanal (P. Belon, Observations, p. 87 d'apr. L. Sainéan ds R. Et. rab. t. 8, p. 52). Il empr. à l'ital. fanale, attesté comme terme de mar. dep. ca 1308 (G. Villani ds Batt.), la forme I étant empr. au mot génois correspondant (lat. médiév. fanarium, 1283 à Gênes ds Du Cange; 1269 à Pise, ibid.); l'ital. fanale est empr. au gr. byz. φ
α
ν
α
́
ρ
ι
ο
ν « lanterne » (dér. de φ
α
ν
ο
́
ς « lumière »), le suff. étant prob. dû à l'infl. des adj. en -ale (Devoto; Vidos, p. 388). Fréq. abs. littér. : 250. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 234, b) 531; xxes. : a) 360, b) 361. Bbg. Hope 1971, p. 194. − La Landelle (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 289, 410. − Vidos 1939, pp. 388-390. |