| ENSEIGNE1, subst. fém. A.− Vx ou vieilli 1. Marque, indice servant de signe de reconnaissance. Synon. indication.Sur les faîtes du château s'élevoit un « heaume », enseigne éclatante de la demeure d'un chevalier hospitalier (Chateaubr., Génie,t. 2, 1803, p. 488).Étaient-ce les habitants qui avaient roulé anciennement ces blocs détachés pour en faire l'enseigne de leur mort et le signe de leur immortalité? (Lamart., Tailleur pierre,1851, p. 416): 1. ... je ne vois pas à quelles enseignes on tiendrait plus rigueur à Nicole qu'on ne fait aux anciens disciples de Lamennais, à Gerbet, à Lacordaire, à Rohrbacher et aux autres.
Bremond, Hist. littér. du sentiment relig. en France, t. 4, 1920, p. 465. − Locutions a) adv., vx. À bonne(s) enseigne(s). Avec de bonnes raisons, avec des garanties. Il ne veut payer qu'à bonnes enseignes. Il ne faut se fier à lui qu'à bonnes enseignes (Ac.1835-1932).Je ne retournerai chez elle qu'à bonnes enseignes (Constant, Journaux,1814, p. 424).Ce n'est pas qu'il eût été impossible que les circonstances m'eussent amené à embrasser l'islamisme (...) mais ce n'eût été qu'à bonne enseigne (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène,t. 1, 1823, p. 505). b) conj., littér. À telle(s) enseigne(s) que. Cela est si vrai que, à tel point que. Si fait, à telles enseignes que c'est lui qui m'a demandé de l'argent (Scribe, Varner, Mariage raison,1826, II, 1, p. 396).À telle enseigne que j'ai supprimé dans ma dernière chronique le paragraphe sur les affaires de Syrie (Bernanos, Imposture,1927, p. 400). − P. compar. L'âme, dont elle [la beauté] est comme l'enseigne (Karr, Sous tilleuls,1832, p. 259). 2. Spéc., domaine milit. a) HIST. Signe de ralliement pour une troupe ou un corps de troupe, en partic. dans l'armée romaine, consistant en une pique portant des emblèmes; p. ext., drapeau. Les enseignes de guerre des Gaulois (Chateaubr., Martyrs,t. 2, 1810, p. 86).Cent aigles l'escortaient en empereur romain. Ses régiments marchaient, enseignes déployées (Hugo, Feuilles automne,1831, p. 777).Cf. aussi chariot ex. 2. − MAR. Pavillon de navire. Tous les chiffons marins, depuis le guidon de pêche jusqu'aux enseignes de guerre, pendent le long des mâts (Hugo, Travaill. mer,1866, p. 321). − Au fig. Combattre, marcher, se ranger sous les enseignes de quelqu'un (Ac. 1798-1932). Sa majorité de demain [à Bayonne], d'ores et déjà consentante à rallier son enseigne, comme il ralliait lui-même le drapeau gouvernemental (Vogüé, Morts,1899, p. 369). b) P. méton., vx − Charge de porte-drapeau. Avoir l'enseigne. Avoir à porter l'enseigne; recevoir, détenir la charge de porte-enseigne. Il [le marquis de Lassay] veut le guidon et bientôt l'enseigne de la compagnie des gendarmes de la garde du roi (Sainte-Beuve, Caus. lundi,t. 9, 1851-62, p. 166). − Corps d'infanterie qui marche sous une enseigne. La Suède avait trente-deux enseignes de sept cents hommes de pied chacune (Hugo, Rhin,1842, p. 421). B.− Usuel, COMM. Indication (sous forme d'emblème, d'objet symbolique, d'inscription) apposée sur un établissement commercial pour le signaler au public; indication de la raison sociale d'un commerce. Enseigne d'auberge; enseigne électrique, lumineuse, rouge; servir d'enseigne. Cette galoche qui avait été l'enseigne d'un marchand de chaussures (Flaub., Bouvard,t. 1, 1880, p. 107).Les enseignes au néon semblaient des friandises géantes (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 11): 2. Il y pendait [à une brasserie], pour enseigne, une peinture sur tôle représentant deux grenadiers attablés sous une tonnelle et débouchant tous deux en même temps leur cannette de bière d'une main libérale et assez heureuse pour que chaque jet de la liqueur mousseuse, échappée de la bouteille d'un soldat, après avoir décrit une courbe hardie, allât retomber dans le verre du camarade.
France, Le Petit Pierre,1918, p. 178. − Par brachylogie. Tenir enseigne (à). Un sabotier (...) qui tenait enseigne « Aux beaux sabots bretons » (Queffélec, Recteur,1944, p. 50). − Au fig. La foi punique est une mauvaise enseigne; la perfidie est un fâcheux prospectus (Hugo, Rhin,1842, p. 481).Où ira cet homme qui cherche? À qui s'adressera-t-il? Aux philosophes d'abord, là où il y a en grosses lettres enseigne de vérité (Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 3, 1848, p. 369). − Loc. fig. Être logé à telle enseigne. Être dans telle situation fâcheuse. Je n'eus garde de lui dire à quelle enseigne j'étais logé (About, Roi mont.,1857, p. 135).Nos adversaires n'étaient pas logés à meilleure enseigne que nous (Joffre, Mém.,t. 2, 1931, p. 274).Loger, être logé à la même enseigne. Être dans la même situation fâcheuse ou délicate. Elles logeaient toutes à la même enseigne, chez misère et compagnie (Zola, Assommoir1877, p. 761).Le réalisme, le surréalisme sont ici logés à la même enseigne (Paulhan, Fleurs Tarbes,1941, p. 38). − Proverbe. À bon vin point d'enseigne. « À bon vin point d'enseigne »; c'est-à-dire qu'il ne faut point d'efforts pour exprimer des sentimens qu'on éprouve réellement (Leclercq, Prov. dram.,Manie prov., 1835, 1, p. 12). Prononc. et Orth. : [ɑ
̃sε
ɳ]. Enq. : /ãseɳ/. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. Cf. enseigne2. |