| ENDORMEUR, EUSE, subst. A.− [Correspond à endormir I A] Rare. Personne qui a la faculté de provoquer sciemment le sommeil. Synon. usuels hypnotiseur, magnétiseur.La voix lointaine d'un somnambule que son endormeur ferait parler (Goncourt, Journal,1887, p. 683). − En partic., vx. Malfaiteur qui use de somnifères pour endormir ses victimes. Ce vin (...) auquel se mêle un narcotique et que la bande des endormeurs a rendu célèbre (Hugo, Misér.,t. 2, 1862, p. 174). − Emploi adj. [En parlant d'un inanimé concr.] Qui, en raison de sa nature, incline au sommeil. L'air lourd et endormeur du wagon (Zola, Lourdes,1894, p. 80).Cigares engourdisseurs; vous, endormeuses cigarettes (Larbaud, Barnabooth,1913, p. 55). B.− [Correspond à endormir I B] P. ext. Personne qui, malgré elle, donne envie de dormir ou qui fait dormir à force d'ennuyer. Synon. fam. raseur.Tristes prédicateurs, endormeurs d'auditoires (Béranger, Chansons,t. 1, 1829, p. 113). C.− [Correspond à endormir I D] Au fig. Personne ou chose qui agit sur le psychisme de quelqu'un. 1. Péj. Personne qui trompe la vigilance d'autrui et le berce d'illusions. Synon. enjôleur, flatteur.Ne l'écoutez pas, c'est un endormeur (Ac.1835, 1878). − HIST., vx. Partisan, en 1793, des moyens légaux et du recours à la douceur, plutôt que des méthodes de la terreur. Les sans-culottes des tribunes le [Robespierre] traitaient d'endormeur (Lefebvre, Révol. fr.,1963, p. 345). 2. Laudatif, poét. Ce qui procure l'oubli, la tranquillité ou la paix de l'âme. Je suis l'endormeuse, la joie, la vie, le bonheur inépuisable! (Flaub., Tentation,1874, p. 184).Dans les chypres et les muscats de Rivesalte, Endormeur des soucis, ô Léthé, tu t'exiles (Moréas, Syrtes,1884, p. 26). − Emploi adj. Adieu, Meuse endormeuse et douce à mon enfance Qui demeures aux prés, où tu coules tout bas (Péguy, Jeanne d'Arc,1897, 1repièce, p. 187). Prononc. et Orth. : [ɑ
̃dɔ
ʀmœ:ʀ], fém. [-ø:z]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. [1. 1299 endormeur de gens (sens obsc.) (s. réf. ds DG). Il s'agit peut-être du même texte que La Curne et Littré citent d'apr. Du Cange, s.v. dormitabilis et datent du xvies. : Consuet. Mss. S. Genov., fol. 34 vo: Endormeur de genz, Fallax, fraudulentus homo]; 2. 1680 « flatteur, personne qui trompe » (Rich. : endormeur de couleuvres); 3. 1782 « empoisonneur » (L.-S. Mercier, Tabl. Paris, t. 3, p. 280); 4. 1801 « personne ennuyeuse » (S. Mercier, Néol., t. 1, p. 222); 5. 1849 « celui ou ce qui procure la paix » (Flaub., Tentation, p. 431). Dér. du rad. de endormir*; suff. -eur2*. Cf. le fém. endormeresse « celle qui trompe » (ca 1461, G. Chastellain, Déprécation pour Pierre de Brezé ds
Œuvres, éd. J. Kervyn de Lettenhove, t. 7, p. 49 : l'endormeresse des fols). Fréq. abs. littér. : 26. |