| EMPIRER, verbe. I.− Emploi trans., vieilli ou littér. [Le suj. désigne une pers. ou un inanimé] Rendre pire. A.− [Le compl. d'obj. dir. désigne une situation, un fait] Empirer la misère, une position, une situation. Lui-même empira son affaire par son silence farouche (Taine, Notes Paris,1867, p. 104). ♦ Emploi pronom. à sens passif. Il était impossible que notre situation s'empirât (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 2, 1823, p. 462). − Spéc. [Le compl. d'obj. dir. désigne un état, un mal physique ou moral] Empirer un état. Quelque pauvre diable dont les recettes des sorcières ou les talismans du marabout ont empiré le mal (Tharaud, Fête arabe,1912, p. 42). ♦ Emploi pronom. réciproque. Il [Maxime] était un produit défectueux, où les défauts des parents se complétaient et s'empiraient (Zola, Curée,1872, p. 425). B.− Rare 1. [Le compl. d'obj. dir. désigne une pers.] Rendre pire d'un point de vue moral. Il a (...) empiré les hommes, gâté les mœurs déjà mauvaises en multipliant les manufactures (Michelet, Journal,1848, p. 696). 2. [Le compl. d'obj. dir. désigne un inanimé concr.] :
1. J'ai pensé qu'il valait mieux la donner telle que je l'ai faite [une feuille] que de la laisser courir défigurée et empirée par les sottises des imprimeurs.
Courier, Lettres de France et d'Italie,1821, p. 900. II.− Emploi intrans. Devenir pire. A.− [Le suj. désigne une situation, un fait] Empirer encore, tous les jours; une position empire; les choses empirent. Elle connaissait, au contraire, à plusieurs signes, que les affaires ne feraient qu'empirer (France, Dieux ont soif,1912, p. 50). − Spéc. [Le suj. désigne un état, un mal physique ou moral] Empirer à vue d'œil; un mal, une maladie empire; sembler empirer; aller (en) empirant. L'état de monsieur votre fils, loin d'avoir empiré, s'améliore sensiblement (Gautier, Fracasse,1863, p. 438). B.− [Le suj. désigne une pers. ou un inanimé concr.] 1. [Le suj. désigne une pers., un de ses attributs physiques ou une collectivité] Devenir pire sous l'effet d'un agent physique ou moral. L'harmonie doit (...) marquer au deuxième couplet que le malade empire (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 387).Ma jambe empire tellement que le DrJullien m'ordonne l'Hôpital Saint-Louis (Verlaine, Corresp.,t. 2, 1893, p. 243): 2. ... il y a bien des jours où on se dit qu'il vaudrait mieux être comme elle, et ne pas voir les vilaines gens et les méchantes choses. Le monde devient bien laid; il empire, de jour en jour...
Rolland, Jean-Christophe,La Révolte, 1907, p. 588. 2. Rare. [Le suj. désigne un inanimé concr.] Et le vent peu à peu empire (Saint-Exup., Terre hommes,1939, p. 236). Rem. 1. Certains dict. signalent que l'emploi intrans. se rencontre, aux temps composés, avec l'auxil. avoir ou être suivant qu'il indique l'action ou l'état. Sa maladie a beaucoup empiré, est empirée (Ac. 1835, 1878). Il semble que la constr. avec l'auxil. être soit vieillie. 2. On rencontre le part. passé du verbe en emploi adj. empiré, ée, vieilli. [En parlant d'une situation, d'un fait et en partic. d'un mal] Rendu, devenu pire. Voilà donc mes affaires empirées (Balzac, Lettres Étr., t. 2, 1850, p. 23). Prononc. et Orth. : [ɑ
̃piʀe], (il) empire [ɑ
̃pi:ʀ]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. Ca 1050 part. passé ampairet « devenu pire » (Alexis, éd. Ch. Storey, 10); ca 1135 empirier « endommager, gâter, blesser » (Couronnement Louis, éd. E. Langlois, 1056). Emperier, du b. lat. *impejorare (composé de in- exprimant le renforcement et du b. lat. pejorare « aggraver »); refait en empirer d'apr. pire*. Fréq. abs. littér. : 178. Bbg. Meillet (A.). Rech. sur la synt. comparée de l'arménien. B. Soc. Ling. 1910-1911, t. 16, p. 124. |