| EFFORT, subst. masc. I.− [L'effort est celui d'un être vivant] Mise en œuvre de toutes les capacités d'un être vivant pour vaincre une résistance ou surmonter une difficulté. Selon M. de Biran, le type du sentiment de la volonté est dans le sentiment de l'effort (Cousin, Hist. philos. XVIIIes., 1829, p. 178). A.− [En parlant de capacités physiques] Effort musculaire; entraînement à l'effort. Un grand cheval peut exercer un effort moyen d'une centaine de kilogrammes (Haton de La Goupillière, Exploitation mines,1905, p. 750).Elle est cassée à angle droit, et souffre longtemps avant de pouvoir se redresser. Se reposant entre chaque effort, elle enfile ses bas, son jupon (Martin du G.Vieille France,1933, p. 1053). − Fam. Synon. de hernie.Attraper, se donner un effort. ♦ Au fig. : 1. ... cet homme [Duclos] qui dîna en ville jusqu'à la fin, et qui pérorait du matin au soir, avait enroué sa voix et donné comme un effort à son esprit, il lui fallait à tout prix du montant naturel ou factice.
Sainte-Beuve, Causeries du lundi,t. 9, 1851-62, p. 214. − ART. VÉTÉR. L'effort de boulet. Entorse de l'articulation du boulet. Il [le colonel] apprenait aussi que Jupiter [un cheval] avait un effort de boulet (Gyp, Mariage civil,1892, p. 103).Effort de tendon. Tuméfaction du tendon ou de la bride carpienne. Effort de genou, de couronne, d'épaule, de hanche. B.− [En parlant de capacités intellectuelles] Un effort de compréhension, d'imagination, d'intelligence, de mémoire, de réflexion : 2. Et moi, de plus en plus, à peu près une demi-douzaine de fois par jour, je suis plongé par tel événement de la vie dans tout un monde de réflexions que j'aperçois prêt à s'ouvrir à l'effort d'attention le plus léger, et que je n'ai jamais le temps de suivre.
Du Bos, Journal,1927, p. 290. Rem. Effort peut prendre une nuance péj. dans des ex. du type : un travail qui sent ou trahit l'effort. Ces premières pages de M. Thiers sont d'un heureux augure... elles n'ont pas d'efforts, et elles ont de la portée (Sainte-Beuve, Portr. contemp., t. 4, 1846-69, p. 66). Je ne veux plus que l'effort se fasse sentir (Verlaine, Corresp., t. 1, 1873, p. 103). C.− [En parlant de capacités morales] Glorifier l'effort : 3. La Prusse, j'en conviens, avait besoin d'un effort de vertu pour oublier ce qu'elle avait souffert, elle, son roi et sa reine.
Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 2, 1848, p. 527. Rem. 1. L'examen des syntagmes où effort est associé à un adj. fait apparaître en premier lieu l'amplitude de l'effort (grand, immense, suprême, moindre, petit) ensuite sa situation dans le temps de l'action ou sa durée (premier, dernier, long), son efficacité ou son impuissance (vain) et enfin justifie les classements des divers domaines que nous avons retenus dans la présentation de notre article à savoir que l'effort est a) humain, b) musculaire ou physique, c) intellectuel, d) moral. 2. L'effort peut être celui d'un groupe, d'une communauté, d'un peuple, d'une nation, etc. L'effort militaire d'un pays. Quelle que soit la suite réservée à ces nouvelles négociations, l'heure est venue pour la France d'orienter elle-même son effort militaire (De Gaulle, Mém. guerre, 1959, p. 333). D.− Expr. Faire + effort 1. [Effort sans déterminant] ♦ Faire effort sur soi-même. S'obliger à faire une chose bien qu'on éprouve à cela une forte répugnance (cf. prendre sur soi) : 4. ... si quelques gens ne se plaisent pas à Versailles, qu'ils fassent effort sur eux-mêmes qu'ils se détachent du colifichet pour se hausser à l'idée de l'ordre et de la raison.
Barrès, Mes cahiers,t. 10, 1913, p. 128. ♦ Faire effort pour. S'efforcer de. En entendant ces paroles, M. Bergeret fit effort pour contenir sa joie (France, Mannequin,1897, p. 350). 2. [Effort + déterminant] ♦ Faire un petit effort. Faire plus qu'il n'était prévu. Fam. (en matière d'argent, de dépenses) : 5. Deuxième créancier. − C'est dur! c'est dur! encore de l'argent! encore de l'argent! encore de l'argent! mais il vaut mieux faire un petit effort que de perdre tout.
Claudel, Le Livre de Christophe Colomb,1929, p. 1153. ♦ Faire un dernier effort. Faire une ultime tentative en vue du but recherché : 6. Le sergent fit un dernier effort pour rentrer dans ses songes heureux, pour refuser notre univers de dynamite, d'épuisement et de nuit glacée; mais trop tard. Quelque chose s'imposait qui venait du dehors.
Saint-Exupéry, Terre des hommes,1939, p. 248. − Loc. adv. Sans effort. Facilement. Écrire sans effort. Avec effort. Difficilement. II.− P. anal. [L'effort est produit par une chose] Manifestation d'une force. Efforts du vent, de la tempête, des eaux. Ce massif boisé marque sur ce point de la presqu'île [la Hague] le dernier effort de la végétation normande (Feuillet, de Trécœur,1872, p. 84): 7. ... un bruit singulier, comme le claquement de toile d'une voile en pleine mer, l'effort d'un cordage qui crie en se tendant, a passé dans l'air au-dessus de moi. C'était un ballon...
A. Daudet, Robert Helmont,1874, p. 146. − PHYS. et MÉCAN. Effort de traction, de compression*, de flexion*, de torsion*, de cisaillement*. ♦ Spéc. [En parlant d'une locomotive] Effort de traction. Charge que peut tirer une locomotive dans un plan horizontal : 8. Le travail produit par une locomotive est égal à l'effort de traction multiplié par la vitesse.
Bricka, Cours de ch. de fer,t. 2, 1894, p. 520. Rem. On rencontre ds la docum. le région. efforce, subst. fém. Le toit n'était guère bien couvert, et le four était moitié égrôlé par l'efforce de la gelée (Sand, Le Champi, 1850, p. 120). Prononc. et Orth. : [efɔ
̃:ʀ]. Transcrit avec [ε] ouvert à l'initiale, sous l'influence des lettres redoublées ds Littré, Barbeau-Rodhe 1930 et, à titre de var. ds Warn. 1968. Enq. : /efoʀ/. Le mot est admis ds Ac. 1694-1932. Homon. éphore. Étymol. et Hist. 1. a) Ca 1100 « activité d'un être qui emploie ses forces dans un but » (Roland, éd. J. Bédier, 1197 [ici, loc. a esforz « à toute force »]); b) 1547 p. ext. « action, force produite par quelque chose » (Melin de Sainct-Gelays,
Œuvres, éd. P. Blanchemain, t. 1, p. 64 : le temps et ses efforts); 2. a) 1559 « effet, résultat d'un effort » (O. de Magny, Odes, II, 171 : Il sentoit pour vous les effortz De l'amour et de sa puyssance); b) 1678 « douleur, lésion due à un effort musculaire excessif » (G. Guillet, Les Arts de l'homme d'épée, 1repartie). Déverbal de (s')efforcer*. Fréq. abs. littér. : 13 502. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 14 840, b) 13 130; xxes. : a) 20 059, b) 25 662. Bbg. Couture (B.). Vocab. de l'industr. du bât. Banque Mots. 1974, no8, p. 191. − Darm. Vie 1932, p. 49. |