| EFFONDREMENT, subst. masc. I.− AGRIC. Action d'effondrer des terres, de les labourer profondément; résultat de cette action. Pratiquer l'effondrement d'une terre (Fén., 1970). Rem. Attesté ds la plupart des dict. gén. et spéciaux et Ac. 1835, 1878. II.− Action de s'effondrer, état de ce qui s'est effondré. A.− [En parlant d'un terrain, d'un édifice ou d'une partie d'un édifice] Éboulement, écroulement. Effondrement du sol, d'une maison, d'un pont. Ces forages de tunnels minaient le sol dans tous les sens et menaçaient Paris d'effondrement (Romains, Hommes bonne vol.,1932, p. 30).Le sentier se rétrécit pour s'élever sérieusement à travers l'effondrement des roches (Gide, Carnets Égypte,1939, p. 1066).L'effondrement du toit obstruait toute la partie nord de la plate-forme (Sartre, Morts ds âme,1949, p. 193). − En partic., GÉOL. Affaissement brusque du sol provoqué par une secousse sismique, l'action des eaux souterraines, etc. Les plissements et les effondrements de l'écorce solide. Tu me parlais de l'effondrement des continents (...) De quoi s'agit-il? Du prochain effondrement de l'Asie et de l'Amérique (Abellio, Pacifiques,1946, p. 320). B.− P. ext. [En parlant d'une pers.] Abattement physique, abandon moral; fait de se laisser aller, état d'une personne qui s'abandonne. Sans doute les détournements de Robidet étaient plus importants encore que je n'avais pu imaginer, à voir son effondrement sur sa chaise d'accusé (Gide, Journal,1909, p. 275).Son mari vieillissait dans le sens de l'effondrement, de la pesanteur (Nizan, Conspir.,1938, p. 112): 1. Pour la première fois de sa vie, elle voyait Rose-Anna dans une robe poussiéreuse et les cheveux défaits. Et l'accablement de celle qui, à travers tous les malheurs, était pourtant jusque-là restée vaillante, lui apparut comme le signe certain de leur effondrement à tous, de son effondrement à elle en particulier.
Roy, Bonheur d'occasion,1945, p. 319. C.− P. métaph. ou au fig. 1. [Avec l'idée de destruction, d'anéantissement matériel, physique] Anéantissement, destruction, disparition. L'effondrement d'un empire, d'une société, d'une fortune. C'est assez d'avoir vu l'effondrement d'une civilisation magnifique pour ne pas consentir à rechercher sa joie dans les ruines (Green, Journal,1940, p. 12).Il annonce la faillite du monde moderne, l'effondrement du capitalisme! (Martin du G., Thib.,Épil., 1940, p. 899). 2. [Avec l'idée de suppression, disparition de ce sur quoi repose l'acceptabilité, la validité de qqc.] Écroulement. a) [En parlant d'une idée, d'une théorie, de projets, d'espoirs] L'impression m'est venue tout à coup d'un effondrement des rêves, des espérances, des ambitions de ma jeunesse (Bernanos, Journal curé camp.,1936, p. 1056).Déjà sapée par les succès des Russes, elle entrevoit déjà sans doute l'effondrement de ses espoirs (Gide, Journal,1943, p. 238): 2. Il n'est pas de système idéologique qui puisse sans effondrement immédiat manquer, depuis Hegel, à pourvoir au vide que laisserait, dans la pensée même, le principe d'une volonté n'agissant que pour son propre compte et toute portée à se réfléchir sur elle-même.
Breton, Les Manifestes du Surréalisme,2eManifeste, 1930, p. 113. b) [En parlant d'un sentiment, d'une valeur morale] Moralement, la rupture brusque avec le passé, l'effondrement des anciennes valeurs (Martin du G., Thib.,Épil., 1940p. 981).Un effondrement du moral, une crise de conscience (Queneau, Loin Rueil,1944, p. 22).L'effondrement de leur courage, de leur volonté et de leur patience (Camus, Peste,1947, p. 1275). 3. [Avec l'idée de mouvement descendant, de chute, d'abattement, etc.] a) Littér. [En parlant d'un phénomène atmosphérique, de nuage, etc.] Tomber. C'était, [une averse] (...) l'effondrement soudain et magnifique du ciel tropical (Jammes, Corresp.[avec Gide], 1893-1938, p. 85).Le jour commençait à s'infiltrer au travers des lanières d'eau, puis une déchirure claire est apparue dans cet effondrement de nuages (Butor, Modif.,1957, p. 218): 3. ... le radeau s'avançait sur l'eau qui maintenant paraissait calme dans le matin grésillant, au milieu de l'effondrement silencieux des masses de brouillard qui fondaient sous une lumière verte comme le jour au fond des forêts...
Giono, Batailles dans la montagne,1937, p. 92. b) Usuel. [En parlant d'une valeur ou d'une matière première cotée en bourse, d'une monnaie] Baisse du cours importante et brutale. Effondrement du cours du caoutchouc; effondrement monétaire. Ils ne peuvent exporter leurs capitaux, et, quand ils le peuvent, ils redoutent l'effondrement des changes (Fargue, Piéton Paris,1939, p. 200). Rem. 1. On rencontre ds la docum. quelques emplois p. compar. Vers le milieu du livre, il y a comme un effondrement du plan qui, pareil à un échafaudage trop fragile, cède tout d'un coup, menaçant d'emporter la construction entière (Green, Journal, 1934, p. 243). 2. Les emplois au fig. ne sont attestés que ds les dict. gén. de la fin du xixeet du xxes., depuis Ac. 1878. Prononc. et Orth. : [efɔ
̃dʀ
əmɑ
̃]. Pour [ε] ouvert à l'initiale, cf. effondrer. Enq. : /efõdʀ
əmã/. Le mot est admis ds Ac. 1762-1932. Étymol. et Hist. 1. Av. 1562 agric. « action d'effondrer les terres » (Gouberville, Journal, éd. Tollemer, p. 658 ds Hug.); 2. a) 1848 « action de s'effondrer, affaissement » (Flaub., Champs et grèves, p. 391 : les effondrements du sol [ici : parties effondrées]); b) 1862 spéc. géol. (Hugo, Misér., t. 2, p. 548); 3. 1862 fig. « disparition, écroulement, anéantissement » (Id., ibid., t. 1, p. 858); 4. 1864 fig. « accablement, prostration » (Dierx, Poèmes, p. 102); 5. 1891 fin. « baisse des prix, des valeurs » (Zola, Argent, p. 208). Dér. de effondrer*; suff. -ment1*. Fréq. abs. littér. : 268. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 4, b) 119; xxes. : a) 643, b) 684. |