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DÉVISSER, verbe.
I.− Emploi trans.
A.− Défaire (ce qui est vissé). Dévisser un bouchon, un couvercle, un écrou. Anton. visser, revisser.Elle dévissa (...) avec un couteau les vis de la porte (Goncourt, Journal,1864, p. 57).Il dévissa le capuchon de son stylo (Beauvoir, Mandarins,1954, p. 262).
1. [P. méton. de l'obj.]
a) Détacher ou desserrer (un objet fixé par une ou plusieurs vis). Dévisser un verrou. Il passe beaucoup de temps à dévisser, à revisser les commutateurs électriques (Duhamel, Journ. Salav.,1927, p. 30).
b) Ouvrir un objet fermé par une pièce mobile vissée. Dévisser un bocal, un tube. Moyses dévissa son stylographe (Fargue, Piéton Paris,1939, p. 49).
Emploi pronom. à sens passif. Être défait par le desserrage de vis ou d'un pas de vis. Cela se visse et se dévisse à volonté : c'est une boîte (Hugo, Misér.,t. 1, 1862, p. 959).Un encrier et poudrier se dévissant en trois parties (Grandjean, Orfèvr. XIXes.,1962, p. 59).
2. P. anal. [L'objet désigne une partie du corps]
a) Tordre, forcer (comme si on allait séparer, sortir d'une articulation). Dévisser le bras, le cou de qqn. Ah toi, si tu parles, je te dévisse la tête (Audiberti, Femmes bœuf,1948, p. 123).
Rem. On rencontre ds la docum. dévissé, ée, adj. dans ce sens. Synon. distendu. Remi dont la taille, par un caractère de race, semblait dévissée (France, Chat maigre, 1879, p. 190).
Arg. Dévisser le coco, la poire, le pompon, la tronche à qqn. L'étrangler, lui tordre le cou. Aucun idiome n'est plus métaphorique que l'argot. − « Dévisser le coco », tordre le cou; − « tortiller », manger (Hugo, Misér.,t. 2, 1862, p. 198).Dévisser son billard. Mourir. Le vieux polichinelle nommé Changarnier a dévissé son billard, hier au soir (Flaub., Corresp.,1877, p. 317).
Emploi pronom. réfl. indir. Se dévisser la tête, le cou. Prendre des positions anormales, forcées (pour essayer de voir, etc.) :
1. ... le dimanche, je suivais des familles dans la rue, des familles qui traînent des enfants par la main, des enfants qui se dévissent le cou pour regarder en arrière. Cocteau, Théâtre de poche,1949, p. 148.
Arg. Se dévisser le tempérament, le trou de balle. Faire des efforts démesurés. Synon. se décarcasser.On a beau se dévisser le trou de balle pour lui faire plaisir, il n'est jamais content (Bruant1901).
b) Dévisser son regard, ses yeux de. Les détacher d'un objet ou d'une personne sur lesquels ils sont fixés. Ernest regardait le cercueil, rien que le cercueil, sans pouvoir en dévisser ses yeux (Jouve, Scène capit.,1935, p. 60).
B.− Au fig.
1. [L'obj. désigne une pers.]
a) Séparer quelqu'un de ce à quoi il était fortement attaché, retenu :
2. Le conseiller Dollinger vient de mourir. Ce que l'honneur n'avait pas pu faire, la mort s'en est chargée. Elle a dévissé de son rond de cuir le magistrat inamovible. A. Daudet, Contes du lundi,1873, p. 23.
En partic. Perturber l'équilibre de quelqu'un. Synon. fam. déboussoler.Son changement de résidence l'avait complètement dévissé (Flaub., Corresp.,1867, p. 344).
b) P. ext. Renvoyer, destituer. Celui-là ne se laissera pas dévisser (Clemenceau, Vers réparation,1899, p. 373).
2. [L'obj. désigne un inanimé abstr.] Analyser en séparant les éléments. Synon. démonter.Il (...) dévissait le style le plus abstrus avec l'adresse d'un expert (Huysmans, Là-bas,t. 1, 1891, p. 37).
II.− Emplois subjectifs intrans.
A.− ALPINISME. Lâcher prise et tomber. (Quasi-) synon. décrocher.P. ext. La métaphore « dévisser », usitée par les alpinistes, est parfois appliquée à une chute à grande vitesse [du skieur] en haut d'une « bosse » (Comment parlent les sportifsds Vie Lang.,1953, p. 140).
B.− Arg. et pop.
1. S'en aller, partir (au sens concr. ou métaph.). Est-ce que t'es marié, toi? Non... Oh! ben, comme ça, t'es peinard, tu peux dévisser en douce (Aymé, Brûlebois,1926, p. 188).
Emploi pronom. réfl., spéc. Changer de place, bouger. Les piocheurs travaillent trois heures de suite sans se dévisser (Lévy-Pinet1894, p. 308).
2. Mourir. Y a des choses qu'on ne refuse pas sur l'oreiller, ou au moment de dévisser (Arnoux, Rêv. policier amat.,1945, p. 132).
3. Déraisonner (cf. Esn. 1966).
Rem. On rencontre ds la docum. a) Dévissage, subst. masc. Action de dévisser, fait de se dévisser; p. méton., état de ce qui est dévissé. Dévissage d'un raccord, d'une lampe. Jean entreprend toute une série de manœuvres : ouverture du capot, dévissage des bougies, injection d'essence, etc. (Romains, Knock, 1923, I, p. 2).b) Dévissoir, subst. masc. Système permettant de dévisser. Des fusils à deux balles, des baïonnettes à dévissoirs (Malraux, Cond. hum., 1933, p. 298). Ce mot n'est pas attesté ds les dict. gén. des xixeet xxesiècles.
Prononc. et Orth. : [devise], (je) dévisse [devis]. Ds Ac. 1835-1932. Étymol. et Hist. 1. 1768 (Encyclop. t. 27, Métallurgie, Le charbon minéral ou de terre, p. 1a); 2. arg. 1846 dévisser le coco (Féval d'apr. Esn. 1966); 1862 dévisser son billard (Colombey, Esprit des voleurs, p. 291 ds Larch. 1872, p. 118). Dér. de visser*; préf. dé-* (lat. dis-). Fréq. abs. littér. : 56 (dévissé : 18). Bbg. Pauli 1921, pp. 45-46.