| DÉVASTATEUR, TRICE, adj. Qui produit une dévastation*; dont la nature, la tendance est de dévaster* (quelque chose). A.− 1. [À propos d'un animé, d'une force humaine ou naturelle; correspond à dévaster A 1] a) [L'obj. est concr.] Qui détruit ou endommage gravement (un lieu, ses richesses, sa population); qui rend désert. La bande féroce et dévastatrice des aventuriers; cyclone, torrent, volcan dévastateur. Synon. destructeur.Le phylloxéra, la bête dévastatrice pullulait (Pesquidoux, Livre raison,1925, p. 75).Le granit peut résister à l'action dévastatrice du vent et de l'humidité (Drieu La Roch., Rêv. bourg.,1939, p. 188): 1. Établissez la communauté, et vous aurez bientôt un peuple chasseur, guerrier, dévastateur, et une agriculture abandonnée aux esclaves.
Joubert, Pensées,t. 1, 1824, p. 381. SYNT. Armées, populations, races dévastatrices, soldats dévastateurs; conflit dévastateur, guerre, lutte, révolution dévastatrice; entreprise dévastatrice; effets, mouvements, moyens dévastateurs; porter une main dévastatrice sur (qqc.). − Emploi subst. Une même erreur (...) sanctifie le double héroïsme des dévastateurs et des victimes (SenancourRêveries,1799, p. 125).Quant au brochet, c'est un terrible dévastateur (Pesquidoux, Chez nous,1923, p. 17). b) [L'obj. est plus abstr.] Si la concurrence est nécessaire, si (...) elle est un postulé de la production, comment devient-elle si dévastatrice? (Proudhon, Syst. contrad. écon.,t. 1, 1846, p. 179). − Emploi subst. Je suis le démagogue horrible et débordé, Et le dévastateur du vieil A B C D (Hugo, Contempl., t. 1, 1856, p. 49). 2. [À propos d'une force inanimée s'attaquant à l'homme; correspond à dévaster A 2 a] Qui apporte la maladie, la mort. Rien ne permet de savoir (...) si telle ou telle épidémie ne se transformera pas en une dévastatrice pandémie quasi mondiale (R. Schwartz, Nouv. remèdes et mal. act.,1965, p. 132).Des maladies comme la variole, la peste, le choléra, le typhus (...) ne constituent plus les grands fléaux dévastateurs qu'elles représentaient dans l'Antiquité et au Moyen âge (QuilletMéd.1965, p. 188). B.− Au fig. [À propos des passions, des sentiments violents, d'un mal intérieur] Qui apporte le désordre, la destruction à l'intérieur de l'être. Synon. destructeur.On peut prendre les passions comme des forces dévastatrices, en soi-même et chez les autres (Alain, Beaux-Arts,1920, p. 162).Laisser passer au-dessus de ma tête le flot de paroles et d'images dévastatrices (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 129): 2. Créateur, compilateur et dévastateur, son génie [de Picasso] brasse et confond toutes les valeurs, bouleverse l'ordre normal des choses, bafoue la logique et dresse chaque jour un symbole nouveau de la décomposition universelle.
Lhote, Peint. d'abord,1942, p. 93. − Emploi subst. Mais qu'élevé sur ses propres ruines, le fantôme masqué d'une splendeur illusoire, applaudisse stupidement à sa dépravation colossale; l'on est attéré, l'on accuse la nature de n'avoir pas enchaîné le dévastateur, d'avoir produit Ahriman (Senancour, Rêveries,1799, p. 118). Rem. On trouve ds la docum. la forme dévasteur utilisée deux fois comme adj. masc. par Zola : L'Antéchrist, le démon dévasteur, la bête annoncée qui purgerait la terre de l'impureté devenue trop vaste (D. Pascal, 1893, p. 343). P. méton. Le grondement de l'incendie mettait comme un râle de meurtre, ce galop dévasteur qu'elle venait d'entendre du fond de son sommeil (ibid., p. 322). Prononc. et Orth. : [devastatœ:ʀ], fém. [-tʀis]. Ds Ac. 1798-1932. Étymol. et Hist. [1502, J. d'Auton ds Dauzat 1973] 1. Subst. a) 1581 « celui qui ravage un pays » (Ph. de Marnix, Ecrits polit. et histor., 185 ds Hug.), attest. isolée; de nouv. 1755 (V. de Mirabeau, L'Ami des hommes, t. 3, p. 324); b) 1856 au fig. (Hugo, Contempl., t. 1, p. 49); 2. adj. a) 1604 « qui dévaste un pays » (P. Le Loyer, Hist. des spectres, III, 5 ds Hug.), attest. isolée; de nouv. 1755 (V. de Mirabeau, op. cit., t. 1, p. 330); b) 1799 au fig. (Senancour, Rêveries, p. 236). Empr. au b. lat.devastator « celui qui ravage ». Fréq. abs. littér. : 82. Bbg. Gohin 1903, p. 265. |