| DÉTRAQUER, verbe trans. A.− Vx. Déranger dans sa marche, son mécanisme. − Spécialement 1. CHASSE. ,,Détraquer un piège, le détendre`` (Baudr. Chasses 1834). 2. MAN. ,,Faire perdre (à un cheval) ses bonnes allures, son allure ordinaire`` (Ac. 1835-1932). B.− Usuel 1. Déranger (quelque chose) dans son fonctionnement. Détraquer une machine, une montre, un moteur. (Quasi-) synon. déglinguer (fam.), déranger, dérégler. − P. métaph. Aujourd'hui, c'est dimanche, un jour qui détraque la semaine (Colette, Ingénue libert.,1909, p. 201). − Emploi pronom. à sens passif. La machine, la mécanique, la pendule, le système se détraque. Le soleil était arrêté (...). Et c'est pourquoi tout se détraquait (Cendrars, Lotiss. ciel,1949, p. 72): C'était la vieille machine gouvernementale qui continuait à marcher d'elle-même, par la force acquise, avec des grincements et des heurts, et qui se détraquerait, qui tomberait en poudre, dès que naîtrait la société nouvelle.
Zola, Travail,t. 1, 1901, p. 108. 2. P. anal. a) Un aliment détraque l'estomac. − Emploi pronom. réfl. indir. Se détraquer l'estomac, les nerfs. Pop. Se détraquer le trognon. Devenir fou (d'apr. France 1907). b) Au fig. et fam. Détraquer le cerveau, l'esprit. Rendre fou. Comme il faut peu de chose pour détraquer une tête humaine! (Mérimée, Lettres Ctesse de Montijo, t. 1, 1870, p. 282).Un souffle d'alcool (...) émasculait les hommes, détraquait les femmes, empoisonnait l'enfant dans l'œuf (Zola, Fécondité,1899, p. 74). − Emploi pronom. à sens passif. Pourtant cette machine [la formule classique] si bien réglée s'est détraquée un jour (Zola, Doc. littér.,Victor Hugo, 1881, p. 46).T'as pas idée de ce qu'on devient en taule. La machine se détraque (Carco, Montmartre,1938, p. 248). Rem. On rencontre ds la docum. a) Détraquant, ante, part. prés. et adj., rare. Qui désempare, rend fou. Ce qu'il y a d'affolant, de détraquant, de désespérant, ce n'est pas la catastrophe elle-même (Bloy, Journal, 1897, p. 248). b) Détraqueur, subst. masc. Celui qui détraque. Constatons que cette dégénérescence de leur armée [des Turcs] est notre œuvre, à nous, les détraqueurs d'Occident (Loti, Turquie agonis., 1913, p. 45). Prononc. et Orth. [detʀake], (je) détraque [detʀak]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1464 se detraquer « se séparer, en suivant chacun un chemin différent » (Bibl. Ec. des Chartes, 1854, p. 273 ds DG); 1564 « déranger dans sa marche » (Thierry); 1578 estomach détraqué (Joub., Err. pop., 2ep., ch. XVII ds Gdf. Compl.); 1601 ames turbulentes et detraquees (Charron, Sagesse, livre I, ch. XLII, ibid.). Dér. du m. fr. trac « chemin, trace, piste », v. traquer; préf. dé-*; dés. -er; cf. av. 1590 pour destrasquer les saints du saint trac de la Foy (Du Bartas, Le Triomphe de la Foy, ch. 2, p. 435 ds Hug.). Fréq. abs. littér. : 345. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 88, b) 522; xxes. : a) 967, b) 527. |