Police de caractères:

Surligner les objets textuels
Colorer les objets :
 
 
 
 
 
 

Entrez une forme

options d'affichagecatégorie :
DÉSERTER, verbe trans.
A.−
1. Laisser ou rendre un lieu désert (cf. désert I A); le quitter, ne pas s'y rendre. La clientèle matinale désertait peu à peu l'épicerie (Bernanos, Crime,1935, p. 802).Les impulsions de toutes sortes qui conduisent le public à fréquenter ou à déserter les salles de spectacle (Arts et litt.,1935, p. 7601).
Emploi pronom. passif. Devenir désert. J'arrivais, le matin et le soir, aux heures où (...) la pension se désertait. Un grand silence régnait alors dans les salles vides (Gide, Si le grain,1924, p. 492).
P. méton. Pendant les premiers jours de la chaleur (...) les soirs étaient désertés. Mais à présent, la première fraîcheur amène une détente (...) Tous descendent alors dans les rues (Camus, Peste,1947, p. 1316).
Spéc. Faire d'un lieu un désert (cf. désert II A 1).
Au fig. :
1. Mais le nihilisme, s'il n'est pas, essaie d'être; et cela suffit à déserter le monde. Cette fureur a donné à notre temps son visage repoussant. La terre de l'humanisme est devenue cette Europe, terre inhumaine. Camus, L'Homme révolté,1951, p. 304.
2. Péj. Abandonner (ou cesser de se rendre en) un lieu auquel se rattachent une fonction ou une tâche particulière et, p. ext., ne pas s'acquitter de celles-ci. Vous désertez votre maison, sans motif (A. France, Lys rouge,1894, p. 90).Comme la religion semblait tolérante! (...) : le chrétien pouvait déserter la messe et marier religieusement ses enfants (Sartre, Mots,1964, p. 80).
Loc. Les rats aussi désertent le navire qui va couler (Gracq, Syrtes,1951, p. 266).
Déserter son poste. Ce serait très mal (...) si tu désertais ton poste, au moment du danger (Zola, Débâcle,1892, p. 195):
2. ... en se voyant seul au chevet du vieillard (...) comment se défendre d'un mouvement de rancune envers ce frère fugitif, qui, en un pareil moment, désertait son poste? Martin du Gard, Les Thibault,La Sorellina, 1928, p. 1162.
Abs., ARM. Déserter. Abandonner son poste, quitter illégalement l'armée et, p. ext., trahir. Il parlait de déserter, de passer un jour ou l'autre les lignes et de se rendre (Van der Meersch, Invas. 14,1935, p. 388).La mauvaise femme, la fille damnée pour qui les soldats désertent et deviennent assassins (Mauriac, Journal 2,1937, p. 126).
P. anal. :
3. Tant qu'il existe au monde quelqu'un qui souffre et à qui nous pouvons faire un peu de bien, nous en aller, c'est déserter... Bourget, Le Sens de la mort,1915, p. 122.
B.− Au fig. Abandonner et, p. ext., renier, trahir.
1. [L'agent est une pers.]
a) [L'obj. est du domaine de l'activité ou du comportement humain] Flétrissons celui qui, désertant l'ouvrage, Alerte et bien portant, ose tendre la main (Maupass., Contes et nouv.,t. 1, Pain maudit, 1883, p. 1237).Je dis toujours tout ce que je crois devoir dire. Mais ne désertons pas la question véritable (Duhamel, Cécile,1938, p. 51).
Emploi abs. :
4. Je (...) ne suis pas sûr de retrouver les vrais motifs qui, vers mes seize ans, m'engagèrent dans une voie toute nouvelle. Étais-je seulement alors conscient de ces motifs? J'étouffais. Je m'évadais, je fuyais, je désertais. Guéhenno, Journal d'un homme de 40 ans,1934, p. 106.
b) [L'obj. est du domaine des idées, de la fidélité à une idée] Déserter une cause. C'est parce que le colonel Picquart n'a pas voulu déserter ses convictions qu'il a subi sa disgrâce (Clemenceau, Iniquité,1899, p. 305).Des déserteurs à la deuxième puissance, je veux dire des hommes qui ont déserté d'abord le drapeau de l'Allemagne et ensuite le drapeau de la France (Jaurès, Guêpier marocain,1914, p. 405).
c) [L'obj. est une pers.] Bonichon a l'horreur du vide. Elle aime mieux encor d'être battue que désertée (Toulet, Almanach,1920, p. 61):
5. ... Jacques en revenant à la foi aurait eu le sentiment d'abandonner, de déserter une fois pour toutes ceux qui ne faisaient pas retour. Du Bos, Journal,1927, p. 170.
Emploi pronom.
Se renier :
6. C'est un garçon intelligent [Sturel] mais d'une qualité mal appropriée à la pratique parlementaire, et quand il se déserterait pour suivre ses collègues sur le terrain de leurs intrigues, il n'acquerrait pas leur valeur spéciale. Barrès, L'Appel au soldat,1897, p. 479.
Se laisser aller. Voyons, se dit Durtal, il ne s'agit pas de se déserter, secouons-nous. Il lut les psaumes de la Pénitence et les litanies des Saints (Huysmans, En route,t. 2, 1895, p. 72).
2. [L'agent est une chose] Les capitaux désertent le commerce pour se précipiter à la bourse (Proudhon, Propriété,1840, p. 274).Lorsque la religion déserta les âmes (Tocqueville, Anc. Rég. et Révol.,1856, p. 251):
7. Décidément avec Tolstoï Gide joue de malheur : chaque fois que sous sa plume ce nom intervient, du même coup toute sa perspicacité le déserte... Du Bos, Journal,1927, p. 363.
Prononc. et Orth. : [dezε ʀte], (je) déserte [dezε ʀt]. Ds Ac. 1694-1932. Comparer désertions (1repers. du plur. du verbe à l'imp.) et désertion(s) (subst.), le 1erse prononce par [t], [-tjɔ ̃], le second par [s], [-sjɔ ̃]. Étymol. et Hist. 1. Ca 1100 « dévaster, rendre un lieu inhabité » (Roland, éd. J. Bédier, 1862); 2. fin xiiies. « abandonner, délaisser (quelque chose, un lieu) » (Rutebeuf [attribution douteuse], Vie du monde II, éd. Farral et Bastin, I, p. 403, 82); 1680 spéc. « abandonner son armée » (Rich.). Empr. au b. lat. desertare (formé sur desertus, part. passé de deserere « abandonner, négliger (quelqu'un) »; « abandonner (un pays); rendre inculte, dévaster » en lat. médiév. (début ixes. ds Nierm.). Fréq. abs. littér. : 682. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 855, b) 872; xxes. : a) 1 003, b) 1 101.