| DÉSAGRÉGATION, subst. fém. Action de désagréger ou fait de se désagréger; état qui en résulte. A.− Décomposition d'un corps en ses éléments constitutifs. La désagrégation des roches; les produits de la désagrégation. Anton. agrégation.La formation des nitrates (...) comporte (...) la désagrégation biochimique de molécules complexes (Plantefol, Bot. et biol. végét.,t. 1, 1931, p. 355): 1. C'est la science qui nous habitue à considérer le corps comme un assemblage de parties et aussi l'expérience de sa désagrégation dans la mort.
Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception,1945, p. 493. − P. anal. L'introduction de barres innombrables (...) la désagrégation des ligatures (...) sont les symptômes les plus ordinaires de l'oubli des règles traditionnelles d'exécution (Bénédictins, Paléogr. mus.,t. 2, 1889, p. 16).Désagrégation de la cadence plane du cantique « Benedictus es » (Bénédictins, Paléogr. mus.,t. 2, 1889p. 136).La fréquence des changements de ton n'apporte qu'un élément de désagrégation dans les compositions (D'Indy, Compos. mus.,t. 2, 1897-1900, p. 322). − P. métaph. Quelle richesse, ce poète, de désagrégation du donné, de combinaisons nouvelles, et donc d'inventions du vrai, de nouveautés qui étaient toujours! (Valéry, Mauv. pens.,1942, p. 155). B.− Au fig. 1. Destruction des principes d'unité, de cohésion, d'un ensemble organisé. a) [En parlant d'un groupe hum.] La désagrégation de la classe bourgeoise (Sartre, Sit. II,1948, p. 223): 2. C'est une nation [l'Autriche] composée de huit ou neuf nationalités disparates, rivales. Et l'autorité centrale s'affaiblit de jour en jour. La désagrégation est presque fatale.
Martin du Gard, Les Thibault,L'Été 1914, 1936, p. 94. b) [En parlant d'une pers.] :
3. La cloche d'un couvent de Chartreux (...) fait surgir en son esprit les images conjuguées de la solitude claustrale et de la mort, associée cette fois-ci non point à la désagrégation de l'être, mais à son resserrement bienfaisant dans un espace protégé.
Béguin, L'Âme romantique et le rêve,1939, p. 28. − Spéc., PSYCHOL. Désagrégation psychique, psychologique, mentale. ,,Incapacité de la subordination des fonctions psychiques entre elles et incapacité de leur synthèse, à laquelle s'ajoute parfois une diminution globale qualitative et quantitative des fonctions psychiques`` (Lafon 1963). Dans certains cas que nous reverrons, l'abaissement se manifeste par de la désagrégation mentale (Janet, Obsess. et psychasth.,1903, p. 87). 2. Dégénérescence ou destruction progressive d'une personne ou d'une chose. L'âge du retour, du déclin, de la désagrégation a commencé pour moi (Amiel, Journal,1866, p. 89).Cette désagrégation d'affection fut le résultat des heures lentes et du rapport quotidien (...). Germaine n'aimait plus sa mère ou l'aimait mal! (Estaunié, Bonne-Dame,1891, p. 242): 4. Un être purement critique n'est qu'un demi-homme, et même n'est-il pas la meilleure moitié. Il fait plus de mal que de bien, car il favorise toutes les désagrégations, morales et sociales.
Amiel, Journal intime,1866, p. 94. Rem. On rencontre ds la docum. un ex. où le compl. du nom désigne l'agent de l'action. Les désagrégations continues de l'oubli (Proust, Fugit., 1922, p. 592). Prononc. et Orth. : [dezagʀegasjɔ
̃]. Ds Ac. 1878 et 1932. Étymol. et Hist. 1798 (Bull. des Sciences de la Soc. Philomatique de Paris, an VI, p. 143); 1862 au fig. (Hugo, Misér., t. 2, p. 28). Dér. de désagréger*; suff. -(a)tion*. Fréq. abs. littér. : 71. |