| * Dans l'article "DÉMOLIR,, verbe trans." DÉMOLIR, verbe trans. A.− 1. Rompre la liaison d'un édifice en l'abattant pièce à pièce, en détachant toutes ses parties, de manière à le rendre inutilisable : 1. − Irons-nous habiter ce château, messieurs?
− Notre projet, répliqua Victor, qui vit l'air embarrassé de Maurice à cette demande de Léonide, est pour le moment de le démolir de fond en comble et d'en vendre les matériaux à la commune.
Gozlan, Le Notaire de Chantilly,1836, p. 111. − Emploi abs. L'art de démolir n'a plus de secrets pour mes amis, depuis que j'ai dirigé la démolition d'une poissonnerie (Champfl., Avent. MlleMariette,1853, p. 100). − Emploi pronom. passif. Le fracas d'un édifice qui se démolit (Hugo, Dern. jour condamné,1829, p. 47). 2. P. anal. [L'obj. désigne une chose] Mettre en pièces et de ce fait rendre inutilisable. Qu'attendait-il pour entrer sans crier gare, pour d'un coup de pied démolir cette table? (Mauriac, Génitrix,1923, p. 395). − Spéc., MAR. ,,Mettre en pièces les différentes parties d'un navire qui ne peut plus rendre aucun service`` (Soé-Dup. 1906). Ils démolissent un vieux bateau pour faire du bois (Alain, Propos,1911, p. 122). 3. P. ext. et p. exagér., fam. Réduire à néant pour mettre hors d'état de nuire : 2. Frémissant derrière la porte, je me tenais prêt à frapper dans le cas où il aurait réussi à la forcer, mais je ne pouvais faire une sortie et démolir cet ivrogne âgé sans m'exposer à la plus extrême rigueur des lois danoises, qui seraient implacables contre un Français.
Bloy, Journal,1900, p. 397. − Expr. fam. Démolir la carcasse, la figure. Rosser d'importance pour donner une correction. Je sautai sur lui, et, en six coups de poing, je lui démolis la figure (Taine, Notes Paris,1867, p. 14).J'aurai du plaisir à lui démolir la carcasse (Van der Meersch, Empreinte dieu,1936, p. 103).Je vais te démolir, numérote tes os (cf. Zola, Assommoir,1877, p. 772). B.− Au fig. 1. [L'obj. désigne une pers.] a) Épuiser physiquement en minant la santé ou les forces : 3. − (...) Il s'en va, comme ça, sans avertir d'avance, sans laisser un sou... Ah! Voilà de quoi briser la plus sereine philosophie... Pour quelqu'un qui a besoin de ménagements, ce sont des coups à vous démolir... Je rentre tranquillement, sans penser à rien, ne songeant qu'à me garer des chocs et des mouvements brusques; pour ma jambe et pan! Je lis ce billet... Mon sang est monté d'un bond dans ma tête, il est redescendu d'un autre bond : il m'a pris une faiblesse, je suis tombé.
Miomandre, Écrit sur de l'eau,1908, p. 226. − Emploi pronom. réfl. Coupeau la bouche pleine [dit :] (...) Faut pas te démolir, autrement tu en as pour quinze jours à te remettre sur tes pattes (Zola, Assommoir,1877, p. 469). b) Ruiner moralement en portant gravement atteinte au crédit, à la réputation, à l'influence. S'il admirait Lucien rue du Minage, il le démolissait partout ailleurs (Balzac, Illus. perdues,1843, p. 136).Il rédige à la fois le rapport qui expose l'affaire et le réquisitoire qui démolit le type (Vercel, Cap. Conan,1934, p. 94). − Emploi pronom. réfl. Il faut chercher à se démolir soi-même. C'est le plus grand service qu'on puisse se rendre à soi-même; il vaut bien mieux relever son erreur que de la laisser relever par d'autres (C. Bernard, Princ. méd. exp.,1878, p. 253). 2. [L'obj. désigne un ensemble abstr. présentant une cohérence interne] Détruire en minant par la critique. Démolir une idée, une doctrine, une œuvre. L'auto américaine se répand dans le monde, instrument d'évasion, outil de vitesse, qui (...) démolit la famille, tourne la loi, mène la terre vers les catastrophes et les belles aventures (Morand, New York,1930, p. 257): 4. ... cet homme, même fît-il serment qu'il n'a pas de système, est plus dépendant du sien que tout autre homme, précisément parce qu'il ne se connaît pas, n'a pas analysé le système qui l'entraîne et n'est pas libre de le démolir pour en construire un second supérieur au premier.
Vigny, Lettre à Lord***, 1829, p. 268. − Emploi abs. Les jeunes gens les plus dégourdis (...) savent ce qui se cache de vent derrière les rythmes savants et les sonores rengaines lyriques. Qu'on propose de démolir, et l'on trouvera toujours des bras. Voulez-vous que nous fondions une école qui n'aura d'autre but que de tout jeter bas? (Gide, Faux-monn.,1925, p. 1199). − Emploi pronom. passif. Le propre de ces études [les sciences historiques] est aussitôt qu'elles ont atteint leur perfection relative, de commencer à se démolir (Renan, Avenir sc.,1890, p. XIV). Rem. On rencontre ds la docum. a) Démolissant, ante, part. prés. adj. Forces démolissantes (Hugo, Travaill. mer, 1866, p. 250). b) Démolissement, subst. masc. Synon. de démolition (cf. ce mot A). On eût dit que quelque fée géante avait (...) débarrassé le passage de tout le déchet de démolissement que le châtelain n'aurait jamais eu le moyen de faire enlever (Sand, Péché de M. Antoine, 1847, p. 88). Elle aurait bientôt fait d'achever sa baraque. Oui, oui, plus que trois ou quatre bouchées, la place serait nette comme torchette. Au milieu de ce démolissement général, Coupeau prospérait (Zola, Assommoir, 1877, p. 646). Prononc. et Orth. : [demɔli:ʀ], (je) démolis [demɔli]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. [1383 demoliant (Varin, Archiv. administ. de la ville de Reims, t. III, p. 526 ds Littré)]; 1. 1458 « défaire une construction pièce par pièce » (Greban, Mystère de la Passion, éd. O. Jodogne, 25298); 2. fig. 1475-1538 (Gringore, éd. A. Montaiglon et Ch. d'Hericault, I, 187 : à l'estomach fais guerre, Tant qu'on en voit ses membres demolis); 3. 1826 « ruiner (une doctrine) » (Lamennais, Religion, p. 35); 4. 1833 pop. « tuer » (Mérimée, Mosaïque, p. 136). Empr. au lat. demoliri « mettre à bas, descendre ». Fréq. abs. littér. : 447. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 483, b) 817; xxes. : a) 996, b) 450. DÉR. Démolissage, subst. masc.a) Synon. de démolition (cf. ce mot A).On n'a pas osé le franc démolissage, de peur d'ameuter les passions contre la richesse de cette maison Rotschild, qui jetait à terre un hôtel de deux millions (Goncourt, Journal,1889, p. 983).b) Synon. de démolition (cf. ce mot B).Il [Danjou] commença à voix basse un démolissage du joli jeune homme si malheureusement déparé par le nez de sa mère; il raillait son duel, sa blessure (A. Daudet, Immortel,1888, p. 233).Un jour viendra où, pour manifester un esprit large et paraître érudit, un mauvais moine renchérira sur le système de démolissage de la nouvelle école (Huysmans, Oblat,t. 1, 1903, p. 229).− [demɔlisa:ʒ]. − 1reattest. 1882 (Goncourt, Journal, p. 162); du rad. du part. passé de démolir*, suff. -age*. − Fréq. abs. littér. : 3. BBG. − Gottsch. Redens. 1930, p. 215. |