| DÉLICIEUX, EUSE, adj. A.− [En parlant d'une chose concr.] Qui est rempli ou qui remplit de délices. Odeur délicieuse. Jardins délicieux, qui semblent sortir par enchantement du désert (Lamart., Voy. Orient,t. 1, 1835, p. 385).Vous savourez au coin d'un bon feu une délicieuse liqueur (Balzac, Corresp.,1839, p. 561): 1. ... nous allons sentir les lilas. C'est une senteur délicieuse; (...) si nous pouvons la humer quand nous serons entre les morts, elle nous fera pleurer de regret. Ce que vous sentez maintenant, c'est le seringa, dont l'arôme est enivrant.
Duhamel, Chronique des Pasquier,Suzanne et les jeunes hommes, 1941, p. 100. Rem. On rencontre délicieux souvent associé à un terme quasi-anton. La cité dure, délicieuse et pourrie, comme une blancheur derrière le règne des flots (Montherl., Bestiaires, 1926, p. 579). B.− [En parlant d'une pers., d'un aspect de son comportement] Qui a du charme. Délicieuse enfant, fille. Arrondissant à demi son bras (...) et prenant de l'air le plus simple du monde une délicieuse attitude (Ponson du Terr., Rocambole,t. 2, 1859, p. 173).Elle a une moue délicieuse, hausse les épaules d'un geste enfantin (G. Leroux, Parfum,1908, p. 38): 2. ... il offrit galamment la main à sa chère, délicieuse et exécrable femme, à cette mystérieuse femme à laquelle il doit tant de plaisirs, tant de douleurs, et peut-être aussi une grande partie de son génie.
Baudelaire, Petits poèmes en prose,1867, p. 197. − P. iron. Amusant. Que Trub avait donc une physionomie comique et un délicieux costume! Une longue redingote noire lui battait les talons (L. Daudet, Morticoles,1894, p. 123). C.− [En parlant d'une chose abstr., d'une sensation physique, d'une impression morale] Qui procure un plaisir extrême et raffiné. Julien eut un instant délicieux; il errait à l'aventure dans le jardin, fou de bonheur (Stendhal, Rouge et Noir,1830, p. 322).Le docteur Pascal et Clotilde rentrèrent doucement à la Souleiade et y passèrent une soirée délicieuse (Zola, DrPascal,1893, p. 79): 3. L'échec laisse au rêve beaucoup de champ, beaucoup de jeu. Comme nous avons échoué, le désert prend dans notre esprit des couleurs délicieuses. Petit à petit, il passe au rang de souvenir sublime. Voilà bien une consolation qui ne va pas sans paradoxe.
Duhamel, Chronique des Pasquier,Les Maîtres, 1937, p. 58. SYNT. Délicieuse attente, douceur, émotion, façon, ivresse, sensation. PARAD. (Quasi)-synon. agréable, charmant, délectable, délicat, enchanteur, exquis, grisant, plaisant, ravissant, savoureux, suave, succulent; (quasi)-anton. abominable, affreux, amer, déplaisant, désagréable, détestable, horrible, pénible, mauvais, médiocre. Prononc. et Orth. : [delisjø], fém. [-ø:z]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. Ca 1121 (Voyage de St Brendan, éd. E. G. R. Waters, 1743 : flurs delicius); début xiiies. (Clef d'amors, éd. G. Doutrepont, 1177 : dame deliciouse). Empr. au b. lat. deliciosus « doux, agréable (des choses) » et « voluptueux (des personnes) ». Fréq. abs. littér. : 3 596. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 5 387, b) 4 429; xxes. : a) 7 159, b) 4 016. Bbg. Duch. Beauté 1960, p. 159. − Gohin 1903, p. 230. − Matoré (G.). Proust ling. In : [Mél. Wartburg (W. von)]. Tübingen, 1968, t. 1, p. 286. |