| DÉGÉNÉRER, verbe intrans. A.− [Le suj. désigne un être vivant (hum., animal, végét.) ou un groupe d'individus] Perdre les qualités et la vigueur originelle de sa race ou de son espèce. Un noble coursier dont le sang dégénère et s'avilit au cinquième croisement de sa race (Musset, Le Temps,1831, p. 102).Le haut de la société s'abâtardit et dégénère (Hugo, Ruy Blas,1838, p. 331): ... la pluralité des êtres vivants sont soumis à la nécessité inflexible de la mort. Au bout d'un temps de fonctionnement, qui varie fortement suivant les espèces et légèrement suivant les individus, ils s'affaiblissent, dégénèrent, et finissent par périr, soit d'une mort naturelle qui n'est que la conclusion de leur déclin, soit d'une mort accidentelle qu'a favorisée la baisse de leur résistance.
J. Rostand, La Vie et ses problèmes,1939, p. 109. − Au fig. Perdre ses qualités, diminuer de mérite. Ce fut un héros dans sa jeunesse, mais depuis il a bien dégénéré (Ac.1798-1932).Cette excellente auberge qui, dit-on, n'a pas dégénéré (Mmede Chateaubr., Mém. et lettres,1847, p. 13). − Dégénérer de.[Le suj. désigne une pers.] Avoir moins de valeur que ses ascendants. Le prince Adélestan n'était point dégénéré de ses ancêtres (A. France, Île ping.,1908, p. 212). ♦ Au fig. Cette animalité (...) dégénérait de l'intelligence en ceci seulement (Gracq, Syrtes,1951, p. 132). B.− P. ext. Dégénérer en.[Le suj. désigne un inanimé abstr. ou concr.] Se transformer en un état inférieur ou pire. [Ces] sages précautions qui empêchent l'autorité de dégénérer en tyrannie (Marat, Pamphlets, Suppl. Offrande Patrie, 1789, p. 69). − MÉD. [Le suj. désigne une maladie] Évoluer (généralement dans le sens de la gravité). Dégénérer en cancer, fièvre, folie, ulcère. Une rechute de bronchite, qui dégénéra en pneumonie (Rolland, J.-Chr.,Révolte, 1907, p. 594). Rem. 1. Comme en témoignent qq. ex. supra, dégénérer se conjugue avec l'auxil. avoir quand il exprime l'action et avec l'auxil. être quand il marque l'état. 2. Littré indique à juste titre : ,,Dégénérer prend la préposition de quand nous voulons marquer l'origine dont on s'est écarté; et la préposition en, quand nous voulons marquer l'imperfection dans laquelle une chose est tombée.`` Prononc. et Orth. : [deʒeneʀe], (je) dégénère [deʒenε:ʀ]. Fait partie des verbes qui changent [e] fermé en [ε] ouvert devant syll. muette sauf au fut. et au cond. dégénérerai(s). Enq. : (il) dégénère /deʒeneʀ/. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. xives. intrans. « perdre les qualités naturelles de sa race » (Oresme ds Meunier : Tel homme ... se desnature et degenere ou forligne); spéc. 1458 « en parlant de personnes, avoir moins de valeur que ceux dont on est issu » (Débat des héraulx d'armes, éd. L. Pannier, p. 51 : En ne forligne ny ne degenere la voye de ses nobles predecesseurs); 2. fin xvies. se dégénérer en « changer de bien en mal » ici contexte méd. (A. Paré, XV, 16 ds Littré); 1663 p. ext. (Molière, Dépit amoureux, V, 8 : Ces gens, avant l'hymen, si fâcheux et critiques Dégénèrent souvent en maris pacifiques). Empr. au lat. class. degenerare « s'abâtardir »; fig. « abâtardir, altérer ». Fréq. abs. littér. : 241. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 502, b) 285; xxes. : a) 190, b) 327. |