| DÉGRADATION1, subst. fém. A.− Destitution infamante. 1. Destitution infamante d'une charge, d'une fonction, d'une dignité. La dégradation d'un magistrat (Ac.). On ne procédait à la dégradation d'un prêtre que lorsqu'il était condamné à mort (Ac.1835, 1878). 2. En partic., mod. a) Dégradation civique. ,,Peine criminelle, infamante, (...) qui entraîne (...) privation des droits civiques et politiques et de certains droits publics, civils et de famille (...)`` (Cap.). b) Dégradation (militaire). Peine infamante consistant en la destitution d'un militaire de son grade et en son exclusion de l'armée. La dégradation de Dreyfus (Goncourt, Journal,1895, p. 713): 1. ... attendu qu'il est constant qu'Erlane Jean-René a déserté à l'ennemi et s'est rendu de plus coupable du crime de trahison, le tribunal le condamne à la peine de mort avec dégradation militaire...
Vercel, Capitaine Conan,1934, p. 216. B.− Au fig. Action de diminuer la valeur morale; p. méton., le résultat de cette action. Une dégradation de l'idéal prolétarien par le maquignonnage électoral (Bourget, Actes suivent,1926, p. 90): 2. ... il est certain que l'introduction démesurée des mots étrangers (...) est un des signes les plus infaillibles de la dégradation morale d'un peuple.
J. de Maistre, Essai sur le principe générateur des constitutions pol. et autres institutions humaines,1810, p. 100. C.− P. ext. 1. Action de mettre en mauvais état, de causer un dommage. Il a fait de grandes dégradations dans ces bois (Ac.). La dégradation des monuments publics est punie par la loi (Ac.1878-1932) : 3. Au long des maisons, (...) deux rangées de bornes en grès (...) étaient dressées pour les protéger (...) contre les dégradations des charrettes, qui menaçaient les murs par les longues fusées de leurs essieux.
Faral, La Vie quotidienne au temps de St Louis,1942, p. 15. − Au fig. Passage progressif à un état plus mauvais. La dégradation de la situation sociale, de la conjoncture économique (Lar. Lang. fr.). 2. Action d'affaiblir, de diminuer; résultat de cette action. Le principe de Carnot, ou principe de la dégradation de l'énergie (Poincaré, Valeur sc.,1905, p. 176): 4. ... je suis dans un état spécial, comparable à celui de certains psychasthéniques, c'est la première chute de potentiel, la première dégradation de la conscience avant le rêve.
Sartre, L'Imagination,1936, p. 65. − Perte de valeur : 5. Il n'y a plus de bornes à la fabrication du papier [monnaie] et par conséquent à sa dégradation. Le rouble est tombé à 28 ou 29 sous tournois...
J. de Maistre, Correspondance,t. 3, 1796-1821, p. 289. Prononc. et Orth. : [degʀadasjɔ
̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. a) 1486 [1reéd.] « destitution d'un personnage » (Expos. de la reigle M. S. Benoit, fo85 b ds Gdf. Compl.) [La date xives. (J. de Vignay), donnée dep. DG ne convient pas]; b) ca 1570 degradation d'armes (Carloix, Mémoires de la vie de François de Scepeaux, VI, 13 ds Littré); c) 1791 dégradation civique (Lepelletier, 4 juin ds l'Ancien Moniteur, VIII, 574 ds Ranft, Der Einfluss der französischen Revolution..., Darmstadt, 1908, p. 95); 2. 1539 « avilissement » (Apologie de Maistre Nicole Glotelet pour Clément Marot ds Marot,
Œuvres, La Haye, 1731, t. 4, p. 502); 3. a) 1690 « détérioration d'un édifice, d'un objet » (Fur.); b) 1883 phys. dégradation de l'énergie (E. Jouffret, Introduction à la théorie de l'énergie, Paris, p. 103). Empr. au b. lat. degradatio à l'orig. terme relig. « destitution d'un prêtre, d'un évêque ». |