| DÉCHÉANCE, subst fém. A.− Action de déchoir; état de celui qui est déchu. L'état de déchéance et de mépris où Jean-François les Bas-Bleus étoit tombé (Nodier, Jean-François,1832, p. 4): 1. C'était le dernier degré de la misère et de l'abjection, une telle déchéance humaine, que Pauline le regardait avec remords, comme si elle se fût sentie coupable de laisser une créature dans un pareil cloaque.
Zola, La Joie de vivre,1884, p. 1114. − En partic. Décrépitude physique ou morale due à l'âge ou à la maladie. Un mince cadavre de vieille (...) masqué (...) par les mains qui voilaient la déchéance de son visage (Adam, Enfant Aust.,1902, p. 519). − Au fig. Synon. de désuétude.L'art du saintier est en déchéance depuis trois siècles (Huysmans, Là-bas, t. 1, 1891, p. 207). SYNT. Déchéance intellectuelle, mentale, physique, progressive, sociale; ma/sa propre déchéance. B.− [Correspond à l'aspect factitif ou à l'emploi trans. de déchoir (cf. déchoir rem. 3)] Action de faire déchoir; état de celui qui est déchu. 1. Privation d'une fonction officielle, en particulier de celle de chef d'État. Prononcer la déchéance. Synon. destitution : 2. ... le Sénat prononça la déchéance de ce même Napoléon auquel il devait son existence; la déchéance fut motivée sur des principes de liberté : que n'avaient-ils été reconnus avant l'entrée des alliés en France!
Staël, Considérations sur les princ. événements de la Révolution fr.,t. 2, 1817, p. 186. 2. Spécialement a) DR. Perte légale d'un droit pour n'avoir pas rempli les obligations y attenant. À/sous peine de déchéance. Tous approuvèrent la déchéance de puissance paternelle (Gide, Souv. Cour d'ass.,1913, p. 635).Prononcer la déchéance de l'entrepreneur jugé malfaisant ou insuffisant (Perroux, Écon. XXes.,1964, p. 626). b) FIN. Prescription libératoire d'une dette : 3. Puis, quand les dettes liquides lui manquèrent, il [Diard] en chercha de flottantes, et déterra, dans les États européens, barbaresques ou américains, des réclamations en déchéance qu'il faisait revivre.
Balzac, Marana,1833, p. 116. ♦ Déchéance quadriennale. ,,Prescription de 4 ans qui frappe les créanciers de l'État, des départements et des communes, même dans leurs droits justifiés`` (Barr. 1974). c) THÉOL. Perte de l'état de grâce originelle. Déchéance originelle : 4. ... l'amour naturel de soi, c'est l'amour qui est devenu naturel pour une humanité déchue; seulement, si l'on prend ainsi la nature dans son état concret, et en quelque sorte historique, il ne suffit pas d'en considérer la déchéance; car sa déchéance ne se mesure que par rapport à une grâce, et, comme ce qu'elle a conservé de cette grâce fait aussi partie de sa nature, on ne peut complètement décrire l'amour naturel de l'homme sans tenir compte à la fois de sa misère et de ses possibilités de redressement.
Gilson, L'Esprit de la philos. médiév.,t. 2, 1932, p. 90. Prononc. et Orth. : [deʃeɑ
̃:s]. Ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. 1174 decaance « fait de déchoir (ici au sens moral) » (G. de Pont-Ste-Maxence, S. Thomas, 3886 ds T.-L.); 2. 1636 « privation d'un droit » decheance de bourgeoisie (Monet); 3. 1792 « privation d'une fonction » (Robesp., Discours, Sur le jugement de Louis XVI, t. 9, 1792, p. 126 : S'il [Louis XVI] ne pouvoit être puni que de la déchéance). Dér. de déchoir*; suff. -ance*. Fréq. abs. littér. : 456. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 194, b) 293; xxes. : a) 918, b) 1 063. |