| DÉBARRASSER, verbe trans. Ôter ce qui encombre. A.− Enlever, retirer. 1. [Souvent avec un compl. secondaire désignant qqc. de gênant] a) [Le compl. d'obj. désigne un lieu] Débarrasser une chambre. Vernyct, (...) débarrassa le plancher des morts qui l'encombroient (Balzac, Annette,t. 4, 1824, p. 240). b) [Le compl. d'obj. désigne une chose] On le [le minerai] débarrassa à la main des impuretés qui souillaient sa surface (Verne, Île myst.,1874, p. 140).Allez. Fais voir ce qu'il y a dans tes poches! Débarrasse tes poches! (Audiberti, Femmes Bœuf,1948, p. 123). c) [Le compl. d'obj. désigne une pers.] Céluta s'assit sur la pierre du foyer, débarrassa sa fille de ses langes trempés d'eau (Chateaubr., Natchez,1826, p. 363): 1. Les masses de tissu conjonctif hypertrophié, dont il débarrasse les patients, atteignent parfois soixante-dix kilos, ...
Gide, Voyage au Congo,1927, p. 723. − P. ext. Dérober, voler. Cette bourse à son cou dont par un coup de rasoir adroit il a débarrassé le légitime propriétaire (Claudel, Poète regarde Croix,1938, p. 108). − Emploi pronom. Louise se débarrasse de son chapeau, de sa pèlerine, de ses gants (Curel, Nouv. idole,1899, III, 1, p. 230). 2. [Sans compl. secondaire] Je voudrais tant pourtant être un peu plus que Marthe, que l'homme de peine qui débarrasse et ouvre les portes (Rivière, Corresp. [avec Alain-Fournier], 1907, p. 250). ♦ Débarrasser la table ou, absol., débarrasser. Enlever le couvert de la table. − Au fig. Débarrasser le plancher. Partir. ♦ Absolument : 2. ... je me fais vieux, on ne me veut plus dans les gros ménages; alors, si on ne me veut pas non plus dans les petits, faut que je crève?
− Tu peux crever, qu'il fait, sec comme un sarment. Il en restera toujours trop de ta qualité. Allez, débarrasse!
Giono, Un de Baumugnes,1929, p. 62. B.− 1. Délivrer (de ce qui incommode) en écartant. Débarrasser qqn de qqn ou qqc.Débarrasser la famille d'un gaillard vraiment malpropre (Zola, Dr Pascal,1893, p. 200).Elles [les libellules géantes] (...) nous débarrassent de moustiques dont elles sont extraordinairement friandes (Green, Journal,1937, p. 95): 3. − Je suis un amateur d'âmes, dit Daniel en souriant. Il ajouta avec émotion : la tienne doit être exquise, pour peu qu'on la débarrasse de tout ce qui la gêne.
Sartre, La Mort dans l'âme,1949, p. 129. 2. Emploi pronom. Se libérer de ce qui constitue une gêne. Se débarrasser de qqn ou de qqc. a) Se débarrasser d'un rival, d'un concurrent, d'un mari. Une guêpe dont on ne peut pas se débarrasser (Duranty, Malh. H. Gérard,1860, p. 215): 4. ... on avisera au moyen de se débarrasser pour toujours de ces voisins dont la tyrannie devenait de jour en jour plus insupportable.
Baudry des Lozières, Voyage à la Louisiane,1802, p. 37. b) Se débarrasser d'une besogne, d'une corvée, d'un préjugé, d'une manie. On voudroit se débarrasser du poids du temps (Crèvecœur, Voyage,t. 1, 1801, p. 165): 5. Depuis l'Antiquité, je sais bien que l'art a tendu sans cesse à se débarrasser des liens et des formes du monde visible.
Quinet, Allemagne et Italie,1836, p. 35. Rem. On rencontre ds la docum. a) l'adj. débarrassé, ée. Qui n'a plus son encombrement habituel et qui dans l'occasion gênerait. Dans la grange débarrassée, à la lueur des lanternes vénitiennes, on danse (Pesquidoux, Chez nous, 1921, p. 71). Le bois plein d'ombre hier est maintenant tout clair et débarrassé (Claudel, Feuilles Saints, 1925, p. 629); b) le subst. fém. débarrassée, région. Débarras, délivrance de ce qui embarrassait. Les voilà partis! quelle débarrassée! (Humbert, Nouv. Gloss. genev., 1852, p. 137); c) le verbe trans. désembarrasser, synon. de débarrasser. Ah! désembarrasser mon esprit de cette insupportable logique! ... (Gide, Immor., 1902, p. 464). Pronom. [Le roi de Navarre :] Ni remises, ni temporisements. Au lieu de se désembarrasser des lourdes affaires, les faut accomplir au bref (D'Esparbès, Roi, 1901, p. 183). Prononc. et Orth. : [debaʀase], (je) débarrasse [debaʀas]. Ds Ac. 1718 s.v. desbarrasser ou desembarrasser. Ac. 1740 donne également cette var. mais aussi la forme mod. débarrasser, attestée régulièrement jusqu'en 1932. Étymol. et Hist. 1544 debaracee de mon enfantement (en parlant d'une femme) (Catherine de Médicis, Corresp., I, 8, col. 1, févr. ds Barb. Misc. 7, no8); 1584 se debarrasser de « se délivrer de » (J. de Barraud, trad. de Guevarre, Epistres dorees, IV, 52 a [trad. de l'esp.] ds Hug.); av. 1655 débarrasser (une chose) « la dégager de ce qui l'encombre » (Cyrano de Bergerac, Lettres diverses, p. 15 ds IGLF); spéc. au fig. 1843 débarrasser le plancher (Dupeuty et Cormon, Les Cuis. paris., I, 11 ds Quem. Fichier). Issu, par substitution de préf., de desembar(r)asser (attesté dep. 1535, Coutumes d'Ypres, 17, 1 d'apr. K. Baldinger ds Z. rom. Philol., t. 67, p. 9), empr. à l'esp. desembarazar « id. », attesté dep. 1495 (Nebrija d'apr. Cor., s.v. embarazar), dér. de embarazar (embarrasser*); cf. avec debaracee, supra 1544, et embarrassée « enceinte » attesté dans les dial. (v. FEW t. 1, p. 260 a), l'adj. esp. embarazada « enceinte ». Fréq. abs. littér. Débarrasser : 1 812. Débarrassé : 767. Fréq. rel. littér. Débarrasser : xixes. :a) 1 878, b) 3 080; xxes. : a) 3 010, b) 2 641. Débarrassé : xixes. : a) 667, b) 1 309; xxes. : a) 1 477, b) 1 101. Bbg. Gohin 1903, p. 363. − Gottsch. Redens. 1930, p. 218. − Quem. 2es. t. 3 1972. |