| DROIT2, DROITE, adj., adv. et subst. I.− Adjectif A.− [En parlant d'une ligne] 1. Ligne droite, et, p. ell., droite (infra III). a) Qui ne présente ni angle, ni courbure. La plus simple des lignes est la ligne droite, dont un fil tendu nous offre l'image (Hadamard, Géom. plane,1898, p. 3).La ligne droite est le plus court chemin d'un point à un autre (P. Lavedan, Urban.,1926, p. 52). b) Loc. En ligne droite, en droite ligne. Suivant une ligne droite (infra II A 1).(Personnes, objets) disposés, placés en ligne droite; marcher, s'avancer, se propager en ligne droite. La propriété de la lumière de se transmettre en ligne droite (Cournot, Fond. connaiss.,1851, p. 2).Des belles allées à la française, élancées en droite ligne entre des arbres de haute futaie (Boylesve, Leçon d'amour,1902, p. 6).Des fumées s'élevaient, montaient en droite ligne vers le ciel (Maran, Batouala,1921, p. 101): 1. Si nous regardons une pierre tomber de la fenêtre d'un train, nous voyons une trajectoire parabolique (...). Pour le voyageur, la pierre est tombée en ligne droite...
Ruyer, Esquisse d'une philos. de la structure,1930, p. 289. Rem. Dans ce sens, la loc. en ligne droite est la plus usitée. − P. ext. Directement, sans intermédiaire, sans détour. ♦ [Dans l'espace] La lingerie, toute de soie, semblait venir en droite ligne de la rue de la Paix (Benoit, Atlant.,1919, p. 175).Le (...) régiment, venu d'Èvres en ligne droite sans avoir eu à faire le crochet par Beauzée (Romains, Hommes bonne vol.,1938, p. 114): 2. Ce n'est pas la première fois que Pierre Corneille se tourne vers l'Espagne, et son Matamore, on l'a vu, en vient en ligne droite.
Brasillach, Pierre Corneille,1938, p. 136. ♦ [Dans le temps] Des coutumes venues en ligne droite de la restauration (Estaunié, Ascension M. Baslèvre,1919, p. 1): 3. Il avait pour épouse Gertrude de Méranie, ou d'Andechs, de la maison peut-être la plus illustre de l'empire à cette époque. Elle descendait en droite ligne de Charlemagne...
Montalembert, Hist. de Ste Élisabeth de Hongrie,1836, p. 7. 2. P. anal. Droit fil. Sens des fils (cf. chaîne II A 1 b) d'un tissu; plus rare, sens des fibres d'un bois (cf. Champly, Nouv. Encyclop. prat., t. 9, 1927, p. 159). Couper un tissu dans le droit fil. Anton. biais* : 4. Hubert s'était mis à tendre un métier. Il avait posé les deux ensubles sur la chanlatte et sur le tréteau, bien en face, de façon à placer de droit fil la soie cramoisie...
Zola, Le Rêve,1888, p. 42. − P. méton. Le biais est travaillé de toutes les façons, le droit fil est souvent nervuré (Jardins des modes,janv. 1951, p. 17). − Au fig. De droit fil. Franchement : 5. ... le clochard, suffit qu'on li défende une chose, soit de droit fil ou de ruse, pour qu'il tienne bientôt pus dans s'peau, du besoin de se l'envoyer, de droit fil ou de ruse également itou...
M. Stéphane, Ceux du Trimard,1928, p. 189. B.− P. ext. 1. Dont le dessin ou la forme a la ligne droite comme élément de référence. Tronc droit; ciseaux droits; nez droit. Quelques individus ont la peau très foncée, avec des cheveux frisés, d'autres ayant au contraire la peau claire avec des cheveux ondulés ou droits (Haddon, Races hum.,1930, p. 237).Parfois un grand morceau de route droite succédait aux lacets (Malègue, Augustin,t. 1, 1933, p. 41).Des vases de cuivre rouge à large panse, col droit et anse anguleuse (T'Serstevens, Itinér. esp.,1963, p. 201). SYNT. Escalier, sabre droit; dossier droit, chaise droite; manteau droit, tunique droite (anton. cintré, ée); veston droit (anton. croisé). 2. En partic. a) [En parlant d'un corps au repos, avec une notion de verticalité, de perpendicularité]
α) [En parlant d'un obj.] Debout, dressé, vertical. Mur, pli droit; flamme, fumée droite. Anton. couché, penché, oblique.Il revit un temple au dieu du soleil des anciens Incas du Pérou. Ces pierres droites sur la montagne (Saint-Exup., Vol nuit,1931, p. 121): 6. Les fureurs du peintre commençaient dès que Céline avait franchi sa porte. Pour la vingtième fois, il la suppliait de ne pas accrocher sa capeline sur le coin d'un cadre, et elle s'entêtait à ne pas la pendre à un porte-manteau (...); le cadre penchait forcément (...) et elle soutenait que c'était sans importance, que sa coiffe n'abîmait pas la dorure, qu'il n'était pas utile que le tableau fût droit.
Huysmans, Les Sœurs Vatard,1879, p. 224. ♦ Piano droit. Piano dont les cordes et la table d'harmonie sont verticales. Anton. piano à queue. ♦ MATH. Angle droit (cf. angle I A 1) et subst. un droit (cf. angle ex. 2). Prisme droit. Prisme dont les bases sont perpendiculaires aux autres faces. Anton. oblique.
β) [En parlant d'une partie du corps] Dressé. Avoir, tenir la tête droite. L'écureuil (...) sautait de branche en branche, les petites oreilles droites à peine pointant (Pergaud, De Goupil,1910, p. 135).Elle portait une grande robe un peu (...) solennelle (...) avec une collerette rigide, dorée, qui maintenait droit le cou (Vailland, Drôle de jeu,1945, p. 19). − P. méton. [En parlant de la pers. phys.] Qui n'est ni courbé, ni voûté, qui se tient bien. Être droit comme un chêne, comme un peuplier; avoir la taille droite. Un peloton de cavaliers, avec, en tête, un sous-off de dragons, droit sur ses étriers, la crinière au vent (Martin du G., Thib.,Été 14, 1936, p. 752).Une femme, assise très droite (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 51). ♦ Emploi subst. : 7. − Francs-tireurs! à mon commandement! Ils sont là, la poitrine bombée, la tête haute, les bras collés au corps raide... trente-cinq... des grands et des petits, des droits et des tordus.
Triolet, Prem. accroc,1945p. 370. b) [En parlant d'un mouvement ou d'un corps en mouvement] Qui s'effectue, qui se déplace en un mouvement rectiligne horizontal ou vertical. (La) chute droite (des flocons de neige). − En partic., ESCR. Coup droit. Attaque qui consiste en un mouvement rectiligne de la pointe du fleuret (cf. Lar. encyclop., s.v. escrime). − Spéc., ANAT. Muscle droit. Muscle dont l'action s'exerce parallèlement ou perpendiculairement au plan de symétrie du corps. ♦ Emploi subst. Excepté dans les singes et les cétacés, le grand oblique et le grand droit postérieur sont généralement fort considérables (Cuvier, Leçons d'anat. comp., t. 1, 1805, p. 236). c) Loc. prép., vx. Au droit de. Au niveau de, en face de, à la perpendiculaire de. M. Hirsch (...) a fait, sur la vaporisation dans les chaudières au droit du foyer, de très remarquables expériences (Ser, Phys. industr.,1888, p. 246): 8. ... je vis glisser devant moi (...) un petit bâtiment. Il longea un moment la côte, puis, virant au droit de la passe du port et franchissant la limite des patrouilles, piqua vers le large et se perdit bientôt à l'horizon.
Gracq, Le Rivage des Syrtes,1951, p. 44. 3. Comme il faut, régulier. a) Loc. adv. Au droit (vx). Sur le parcours, au bon endroit. Pourtant il y a de bons riches, puisque vous l'êtes, vous, madame Blanchet, c'est le tout de se trouver au droit pour les rencontrer (Sand, F. le Champi,1850, p. 73). b) TENNIS. Coup droit. Renvoi de la balle effectué du côté habituel. Anton. revers (cf. Rob., Lar. Lang. fr., Lar. encyclop., Lexis 1975). c) NUMISM., emploi subst. Synon. de avers (cf. ce mot A). C.− P. métaph. ou au fig. 1. [Dans le domaine de la morale] a) [En parlant d'une ligne de conduite] Conforme aux principes de la morale, de la religion. Droit chemin (cf. chemin II B 2); ligne droite : 9. « On vous montre la voie droite : vous n'avez qu'à suivre. C'est vrai pour la religion, c'est vrai pour la discipline de l'esprit, pour l'habitude de raisonner qui fut toujours en honneur à Mongazon; c'est vrai aussi pour le latin. »
Thibaudet, Réflexions sur la litt.,1936, p. 252. b) [En parlant d'une pers., de ses attributs] Franc, honnête, ouvert, sans compromission. Homme, caractère droit; âme, nature droite. Un aveuglement qui n'exclut ni des intentions droites ni des vertus dignes de respect (Lamennais, L'Avenir,1831, p. 263).Le regard droit de ses yeux myopes trahit une âme d'une probité exemplaire (Green, Journal,1941, p. 91). 2. [Dans le domaine de l'esprit] Conforme à la raison, juste, sain, sensé. Jugement, raisonnement droit. Avec un sens droit du métier que l'on fait et une volonté persévérante, on arrive à l'estimable (Flaub., Corresp.,1852, p. 363).Aucune difficulté ne résiste à un esprit droit et qui raisonne juste (Mauriac, Th. Desqueyroux,1927, p. 250). II.− Adverbe A.− [Correspond à I A 1 b et B 2 b] 1. Suivant une ligne droite. Aller, se diriger (tout) droit (devant soi); tomber droit. Un homme ne peut marcher droit les yeux fermés (Cuvier, Leçons d'anat. comp.,t. 1, 1805, p. 487).Il regardait droit devant lui, sans rien voir (Druon, Gdes fam.,t. 2, 1948, p. 229). 2. Directement. Conduire droit à, chez; aller droit au but. Oriante, surmontant l'émoi de cet accueil violent, va droit à son agresseur (Barrès, Jard. Oronte,1922, p. 164).Je t'ai montré la porte de ma chambre; elle donne droit sur l'escalier (Gide, Faux-monn.,1925, p. 936). B.− [Correspond à I B 2 a] Verticalement. Se promener en tenant bien droit devant soi, sans en verser une goutte, un verre plein d'eau (Mounier, Traité caract.,1946, p. 267). ♦ Se tenir droit. Elle pleurait comme une madeleine, sans faire de bruit, et se tenait droit comme un piquet (Balzac, Langeais,1834, p. 340). Rem. Dans cette dernière constr., droit est plus souvent adjectif. C.− [Correspond à I C 1] Selon les principes de la morale. Filer droit. Nous autres, leurs prêtres, pourquoi nos enfants nous aimeraient-ils? (...) Nous sommes forcés de les faire marcher droit (Montherl., Ville dont prince,1951, I, 3, p. 872). III.− Subst. fém., MATH. Ligne telle que deux des points par lesquels elle passe sont nécessaires et suffisants à la définir. Je mets le cap sur le milieu du segment de droite qui joint Alexandrie au Caire (Saint-Exup., Terre hommes,1939, p. 213). SYNT. Droite euclidienne; droites concourantes, parallèles; congruence de droites; faisceau de droites; décrire une droite. ♦ Demi-droite. Portion de droite indéfinie dans un sens et limité dans l'autre par un point. On appelle bissectrice d'un angle la demi-droite issue du sommet qui partage cet angle en deux angles égaux (Roux, Miellou, Géom.,1946, p. 10). Prononc. et Orth. : [dʀwat], fém. [dʀwat]. Mais aussi [ɑ] post. ds Warn. 1968 (cf. droit1). Le mot est admis ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. Adj. 1. a) ca 1050 « juste, vrai, exact » dreit num (Alexis, éd. Chr. Storey, 215); b) ca 1100 « juste, honnête, franc » (Roland, éd. J. Bédier, 2441); c) 1130-40 « qui ne s'écarte pas de la raison, de bon sens » dreite veie (Wace, Conception N.-D., éd. W. R. Ashford, 1088); 2. a) ca 1100 « sans courbure, sans inclinaison » (Roland, 1043); b) 1155 « direct, sans détour » dreite veie (Wace, Brut, éd. I. Arnold, 762); c) 1160-74 « régulier, bien mis ou bien fait » (Wace, Rou, éd. A. J. Holden, 1317 et 1318). B. Adv. ca 1050 « directement, sans détour » (Alexis, 81). C. Subst. masc. dans la loc. adv. au droit de 1354-76 (Roy Modus, 124, 55 ds T.-L.). D. Subst. fém. p. ell. de ligne 1738 (Voltaire, Newton, II, 9 ds Littré). Du lat. class. directus « sans courbure, direct, à angle droit », d'où au fig. « direct, sans détour, juste », part. passé adj. du verbe dirigere (v. diriger). STAT. − Droit1 et 2. Fréq. abs. littér. : 4 844. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 7 589, b) 7 081; xxes. : a) 7 209, b) 5 994. Droite1 et 2. Fréq. abs. littér. : 11 007. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 10 106, b) 18 457; xxes. : a) 18 369, b) 17 251. BBG. − Gottsch. Redens. 1930, passim. − La Landelle (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 186, 226, 317. − Quem. Fichier. |