| DISTANCER, verbe trans. A.− Laisser à distance (derrière soi), dépasser. Ce cheval eut bientôt distancé tous les autres (Ac.1878-1932).Une onze chevaux noire démarre devant une église, (...) rivalise avec vous de vitesse, (...) se laisse distancer (Butor, Modif.,1957, p. 19): 1. ... poursuite fervente d'un lapin sous les taillis, (...) Ma mère m'a doué de pattes rapides, certes, mais courtes : la bête au derrière blanc me distança.
Colette, Sept dialogues de bêtes,1905, p. 108. ♦ Distancer + compl. second. : 2. ... ils jouaient, les coudes sur la fenêtre, à celui qui cracherait le plus loin. (...) Après cinq minutes de jeu, Gustave n'avait plus de salive et sa sœur le distançait d'un mètre et deux.
Aymé, La Jument verte,1933, p. 73. − Spéc. Disqualifier un cheval, un coureur qui, pendant la course, a commis une faute. Les arbitres ont distancé ce cheval à l'arrivée (Quillet1965). − Au fig. Laisser derrière soi en faisant mieux, en se montrant supérieur. À l'école primaire du quartier (...) l'élève Bayonne distança facilement ses camarades (Vogüé, Morts,1899, p. 38). ♦ Distancer en.Quant à leur [des Francs-Juges] police, elle avait une telle habitude de la machination (...) qu'elle distançait toujours en invention et en rapidité la police de l'État même (Jouve, Scène capit.,1935, p. 140). B.− Mettre une certaine distance (entre des choses, des personnes). 1. Éloigner. Les kilomètres qui se déroulent entre nous et nous distancent (Flaub., Corresp.,1851, p. 308).Une buée légère distançait les plans, au point que tout ce vallon je le reconnaissais à peine (Gide, Journal,1916, p. 552). − Au fig. Empêcher des rapports étroits, repousser; tenir à distance. Rien ne me distançait plus que l'apparence efféminée de tout son être, par quoi précisément d'autres sans doute eussent été séduits (Gide, Si le grain,1924, p. 597): 3. Ah! tout ça, mon vieux, ça nous distance. On est riche, on dédaigne les camarades (...) Jamais un mot, jamais une visite...
A. Daudet, Fromont jeune et Risler aîné,1874, p. 181. 2. Espacer. Il a taillé ses cubes et les a distancés selon la position que l'œuvre devait occuper (F. Delaunay ds Littré). − Emploi pronom. à sens passif. Elle [la rue] était à peine éclairée par des becs de gaz qui se distançaient de plus en plus, à mesure qu'elle s'allongeait vers les remparts (Huysmans, Là-bas,t. 2, 1891, p. 154). − [Dans le temps] Il prenait, en rentrant chez lui, la résolution de distancer ses visites jusqu'au jour où il les supprimerait (Maupass., Notre cœur,1890, p. 337). Rem. On rencontre ds la docum. le part. passé adj. distancé. Séparé par un intervalle. Des colonnes de pierre aux chapiteaux de lotus, symétriquement distancées, dessinaient dans le vignoble des allées (Gautier, Roman mom., 1858, p. 241). Prononc. et Orth. : [distɑ
̃se], (je) distance [distɑ
̃:s]. Ds Ac. 1878 et 1932. Conjug. Prend une cédille devant a et o : je devançai(s), nous devançons. Étymol. et Hist. A. 1366 distancee « placé à une distance qui permette d'apercevoir » (Oresme, L'Espere, Richel. 565, fo4dds Gdf.); av. 1602 se distancer « s'écarter » (St François de Sales, Controverses, avant-propos ds Hug.), ex. isolés. B. 1827 distancé « dépassé (dans une course) » (T. Bryon, Manuel de l'amateur de course, p. 47 ds Mack. t. 1, p. 206); 1844 verbe trans. (Balzac, Paysans, p. 256). A dénominatif de distance*, suff. -é*, dés. -er; B empr. à l'angl. to distance (1674, terme de sp., turf ds NED). Fréq. abs. littér. : 39 (distancé : 33). |