| DIAPRER, verbe trans. A.− Faire chatoyer, scintiller; donner une certaine réverbération à (une surface), soit par un jeu de couleurs vives et variées, soit par un jeu de lumières nuancées. Cette douce réverbération qui diaprait le plafond (Hugo, Dern. jour condamné,1829, p. 44).Des jacinthes, des mandragores, des cyclamens qui diapraient le vert de la prairie (Nerval, Voy. Orient,t. 3, 1851, p. 190).Des lueurs entraient par les fenêtres qui diapraient tout de taches vives (La Varende, Bric-à-brac,1953, p. 246): 1. Le Moulin de la Galette [par Renoir] est peint [...] avec de longues touches caressantes comme les taches de soleil qui diaprent les vestons bleus, les robes de jaconas et les verdures de ce bal tournoyant.
Mauclair, Les Maîtres de l'impressionnisme,1904, p. 116. − Emploi pronom. à sens passif. Devenir diapré. Je vis entrer Madeleine en compagnie de plusieurs jeunes femmes (...) avec des ombrelles tendues qui se diapraient d'ombre et de soleil (Fromentin, Dominique,1863, p. 147): 2. Parfois, à la surface des eaux croupies, s'étale une irisation merveilleuse, et les papillons les plus beaux n'ont rien de pareil sur leurs ailes; la pellicule qui s'y diapre est formée de matières décomposées. Sur les étangs, la nuit éveille des phosphorescences, et les feux des marais qui s'élèvent semblent celles-là mêmes sublimées.
Gide, Paludes,1895, p. 108. B.− Au fig. Parer d'ornements divers. Diaprer ses phrases de mots grecs et latins. Synon. consteller.Mon imagination prêtait au mirage et diaprait généreusement mes incertitudes (Gide, Retour Tchad,1928, p. 908): 3. ... ce n'est pas seulement aux villes et aux fleuves qu'ils donnent une individualité, comme le font les peintures allégoriques, ce n'est pas seulement l'univers physique qu'ils diaprent de différences, qu'ils peuplent de merveilleux, c'est aussi l'univers social : alors chaque château, chaque hôtel ou palais fameux a sa dame ou sa fée, comme les forêts leurs génies et leurs divinités les eaux.
Proust, Le Côté de Guermantes 1,1920, p. 11. − Emploi pronom. à sens passif. Ah! que toute chose s'irise; que toute beauté se revête et se diapre de mon amour (Gide, Nourr. terr.,1897, p. 165). Prononc. et Orth. : [djapʀe]. Ds Ac. dep. 1835 et, s.v. diapré, ée, part. passé, ds Ac. 1762 et 1798. Le [a] conserve de son orig. un reste de timbre vélaire et/ou de durée, en dépit, en partic., de Buben 1935, p. 44 : ,,On prononce a antérieur et bref dans les mots qui (...) s'écrivent sans accent circonflexe malgré la disparition d'un s ou d'un autre son voisin : (...) diaprer (a. fr. diasprer)``. Étymol. et Hist. Ca 1274 dyasprer (Adenet Le Roi, Berte, éd. A. Henry, 3223). Dér. avec dés. -er de l'a. fr. diaspre subst. masc. « drap de soie à ramages ou arabesques » (ca 1160, Eneas, éd. J. Salverda de Grave, 4511) lui-même empr. au lat. médiév. diasprum de même sens (xies. ds Du Cange; au sens de « sorte de pierre » xives. ds Nierm.), altération du lat. class. jaspis « jaspe » (le i- initial était souvent écrit di- dans les textes lat. du moyen âge) cf. les correspondants rom. : ital. diaspro, esp. diaspero (REW3, no4251a). Fréq. abs. littér. : 15. |