| DEMI, IE, adj., subst. et loc. adv. I.− Emploi adj. [Coordonné par et à un subst. ou un numéral; varie en genre, mais non en nombre] A.− [Coordonné à un subst.] Qui a la valeur d'une moitié s'ajoutant à la quantité exprimée par le substantif. Il a deux ans et demi; il est une heure et demie. − Expr. proverbiale. À malin, malin et demi (ou après des subst. de sens voisin, désignent des pers. : fripon, fourbe, trompeur, etc.). Qui oppose les mêmes procédés, qui se montre le plus habile dans l'art de ruser. Sur ce modèle : à corsaire, corsaire et demi (cf. Leclercq, Désœuvr. coméd., 1835, 13, p. 474). ♦ Vieilli. En diable et demi. Excessivement. Battre quelqu'un en diable et demi (Ac.1878). B.− [Coordonné à un numéral, le subst. figurant dans le cont. antérieur] 277 pages de mon écriture, 302 et demie d'impression dans la troisième édition (Vigny, Journ. poète,1837, p. 1063).Souper à huit heures; à neuf et demie ou dix, nous sommes au lit (M. de Guérin, Corresp.,1832, p. 58).Total des heures dépensées : 158 et demie (Verne, Tour monde,1873, p. 30). − [Le subst. peut n'être pas explicité lorsque le sens est évident] Les soirées d'été, de sept à neuf et demie (Stendhal, H. Brulard,t. 1, 1836, p. 193).Un placement qu'il a fait chez moi à quatre et demi du cent (Dumas père, Monte-Cristo,t. 1, 1846, p. 348). ♦ L'« ellipse » peut avoir pour conséquence le non accord en genre. Je m'imagine que vous me permettrez de venir quelquefois à votre heure entre 7 et demi et 8 et demi (Gobineau, Corresp.[avec Tocqueville], 1843, p. 71). II.− Subst. masc. A.− Subst. de l'inanimé 1. Moitié d'une unité. Synon. moitié : 1. ... si maintenant je construis le même nombre avec des demis, des quarts, des unités quelconques, ces unités constitueront encore, en tant qu'elles serviront à former ce nombre, des éléments provisoirement indivisibles, et c'est toujours par saccades, par sauts brusques pour ainsi dire, que nous irons de l'une à l'autre.
Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience,1889, p. 72. − Rare, vx. Un demi, au lieu de et demi. MlleSergent, ravie, transcrit sur son calepin : « Anaïs 65, Claudine 68, (...) Marie Belhomme 44 et un demi (Colette, Cl. école,1900, p. 215). 2. Grand verre de bière. Les demis de bière, on les appelle des gendarmes (Renard, Journal,1895, p. 279).Avec chacun une choucroute devant soi, et un beau demi de bière blonde (Queneau, Pierrot,1942, p. 78). − [Suivi d'un subst. en appos., avec ou sans trait d'union] [Je] suis allé boire tristement un « demi-blonde » dans une brasserie déserte (Green, Journal,1929, p. 15).Le patron coiffeur (...) qui a une tête comme une demi-blonde (Aragon, Beaux quart.,1936, p. 170).L'homme qui était à sa table posa son demi brune (Aragon, Beaux quart.,1936p. 233). − Demi sans faux-col, sans cravate. Sans mousse. Moi, dit Moûlu, ce serait plutôt un bon demi sans cravate (Sartre, Mort âme,1949, p. 246). B.− [Le subst. désigne une pers.] . SP. Joueur occupant, dans une équipe de football ou de rugby, une position intermédiaire entre les avants et les arrières. Poste de demi de mêlée (Le Figaro,19-20 janv. 1952, p. 8, col. 6): 2. − Eh bien, il y tâte, votre copain, me dit l'entraîneur ravi. Il doit faire un fameux trois-quarts centre.
− Il préfère jouer demi d'ouverture, dis-je.
Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 205. − [Suivi d'un subst. en appos., avec ou sans trait d'union] Le demi aile (Montherl., Olymp.,1924, p. 290).Place de demi-centre (cf. Camus, Peste,1947, p. 1338). Rem. S'il existe indiscutablement un subst. masc. demi, dont ni le sens ni le genre ne sont conditionnés par un subst. « antécédent », l'existence d'un subst. fém. demie est, d'un point de vue synchronique, douteuse. Dans le cas de demie « moitié d'une heure » ou de demie « moitié d'une bouteille », ou encore de voulez-vous une baguette? − Non, seulement une demie, le segment demie est toujours dans la dépendance d'un subst. III.− Loc. adv. À demi. Exprime qu'un procès n'est réalisé qu'incomplètement, partiellement. Synon. à moitié, presque; anton. tout à fait, complètement, totalement, etc. − [Après la forme fléchie d'un verbe] La tête minuscule (...) disparaît à demi sous les plis d'un cache-nez (Bernanos, Mauv. rêve,1948, p. 946). − [Devant un part. passé, un adj.] Des barques, à la voile énorme, à demi gonflée par le souffle du soir (Gide, Carnets Égypte,1939, p. 1070). ♦ Rare. [Placé par effet stylistique après l'adj. ou le part. passé] La loi, prévoyante à demi (Reybaud, J. Paturot,1842, p. 430).Un employé séché dans son bureau trop chaud, le corps ankylosé à demi (Taine, Notes Paris,1867, p. 149). − Plus rarement, modifiant un subst. Dans cette ferme à demi villa (Malraux, Espoir, 1937, p. 798) ou un adv. Alors, dit Bloch à demi ironiquement (Proust, Guermantes,1920, p. 244). Prononc. et Orth. : [d(ə)mi]. Ds Ac. dep. 1694. Placé devant le nom qu'il qualifie, demi adj. est invar. et se rattache au nom qu'il précède par un trait d'union : une demi-heure. ,,Quand il suit le nom, il s'y joint par et, et s'accorde en genre seulement : deux heures et demie`` (Grev. 1969, p. 330). Dans midi et demi(e), minuit et demi(e) on rencontre les 2 genres. Placé devant un adj., demi adv. reste de même invar. et se joint à l'adj. qu'il précède par un trait d'union : demi-morte, etc. À demi, loc. adv., s'écrit sans trait d'union. Ds le corpus les syntagmes demi + mot suiv. s'écrivent parfois en 1 seul mot, ex. : demidieu, 6 occurr.; demijour, 8 occurr.; demimesure, 3 occurr.; demisiècle, 4 occurr.; demisommeil, 3 occurr.; demitour, 5 occurr.; demicirculaire, 2 occurrences. Étymol. et Hist. A. Adj. 1. ca 1100 devant subst. « qui forme la moitié d'un tout » (Roland, éd. J. Bédier, 785); spéc. 1119 (Ph. de Thaon, Comput, 2320 ds T.-L. : Vint et nof jurz E demi); 2. 1181-91 devant part. ou adj. « à moitié » (Chr. de Troyes, Perceval, éd. F. Lecoy, 3123 : Et il l'a bien demie traite [l'épée]). B. Subst. 1. 1174-76 fém. « moitié » (G. de Pont Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 2584); 2. 1611 masc. « id. » (Cotgr.); spéc. 1895 « grand verre à bière qui à l'origine contenait un demi-litre » (Renard, Journal, p. 279 : Demis de bière); 1907 sp. (Nouv. Lar. ill. Suppl.). C. Loc. adv. av. 1465 a demy « à moitié » (Charles d'Orléans, Poésies, éd. P. Champion, p. 361). Du lat. vulg. *dĭmĕdius, réfection d'apr. medius du lat. class. dīmidius, -a, -um « demi ». Fréq. abs. littér. : 7 626. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 10 121, b) 13 844; xxes. : a) 10 573, b) 10 018. Bbg. Gir. t. 2 Nouv. Rem. 1834, p. 28. − Gottsch. Redens. 1930, p. 362. − Grundt (L.-O.). Ét. sur l'adj. invarié en fr. Bergen-Oslo-Franso, 1972, pp. 84-87, 181-182. − Quem. 2es. t. 4 1972. − Schroeder (W.). Die Bedingte Diphtongierung betonter Vokale im Sübfranzösischen Alpengebiet. Volkstum und Kultur der Romanen. 1932, t. 5, p. 164. |