| COU, subst. masc. A.− Partie amincie du corps qui, chez les vertébrés, unit la tête au tronc (cf. aussi col) : 1. Je me suis endormie sous la lucarne, et voilà maintenant que j'ai le torticolis. Mon pauvre cou... Elle le frotte à deux mains en riant.
Bernanos, Dialogues des Carmélites,1948, 5etabl., 12, p. 1709. SYNT. a) Cou et subst. Le cou du cheval, de l'éléphant; naissance du cou; vertèbres, muscles du cou. b) Cou et adj. (adj. relatifs au port du cou). Cou engoncé, rentré, tendu; (adj. relatifs à la forme du cou). Cou flexible, long, potelé. c) Cou et verbe. Couper, tordre, serrer le cou à qqn. Rem. La forme du cou évoque souvent 2 notions opposées, celle de la grâce et celle de la force, notions traduites par l'image du cygne : Mon Dieu! s'écria la blonde Gaillefontaine, en redressant son cou de cygne avec un sourire amer (Hugo, N.-D. Paris, 1832, p. 287) et du taureau : Front très peu haut, mais assez large; visage sans nuances, comme taillé au couteau; cou de taureau continué tout droit par la tête, où l'on sent que la passion monte congestionner aussitôt le cerveau (Gide, Journal, 1905, p. 186). − P. méton. (cf. gorge serrée). Il se leva brusquement, le cou serré. Seules des larmes glissaient sur son visage (Barrès, Barbares,1888, p. 109). − Arg. Se jeter qqc. dans le cou. Boire ou manger (cf. Esnault, Notes compl. « Poilu », 1956). − Loc. et expr. 1. Loc. expr. ♦ Sauter, se pendre, se jeter au cou de qqn. Embrasser avec effusion. Ils voudraient que les femmes leur sautassent au cou, leur fissent des avances (Renan, Drames philos., Eau Jouvence, 1881, V, 1, p. 502). ♦ Prendre ses jambes à son cou. Se sauver : 2. [Alexandre à Paul] Et savez-vous je les ai revues ces beautés... mais le lendemain ce n'était plus pareil et j'ai pris mes jambes à mon cou.
L. de Vilmorin, La Lettre dans un taxi,1958, p. 79. ♦ Casser, tordre le cou. Tordre le cou à un poulet. P. métaph. Et j'ai tordu le cou à la muse pour ne jamais l'entendre crier, geindre et bonimenter (Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 208).Arg. Tordre le cou à une bouteille. La boire. ♦ Se rompre, se casser le cou. Se blesser, généralement à la suite d'une chute. Les filles faillirent se rompre le cou en descendant l'escalier (Brillat-Sav., Physiol. goût,1825, p. 363). ♦ Saisir qqn par la peau du cou. − P. métaph. Les [les préceptes de Boileau] saisissant par la peau du cou (Gide, Journal,1946, p. 290). 2. Expr. fig. a) Mettre la corde au cou à qqn. ,,Le mettre sous sa sujétion`` (Ac.). Se mettre la corde au cou. ,,Se mettre sous la domination de qqn`` (Ac.). En partic. Se marier. Laisser la bride sur le cou. Laisser à quelqu'un toute sa liberté. Il n'aimait ni les discussions, ni les soucis et laissait à ses enfants la bride sur le cou (Beauvoir, Mém. j. fille,1958, p. 35).Se monter le cou. Afficher un optimisme excessif. Et comme Yves, tout pâle, ne pouvait que répéter : « Ça, ce serait chic... » Jean-Louis le supplia encore de ne pas se monter le cou (Mauriac, Myst. Frontenac,1933, p. 74). b) Jusqu'au cou. Complètement. Être dans le pétrin jusqu'au cou. Être dans l'embarras. Le ministère est tombé (...) nous sommes dans le pétrin jusqu'au cou (Maupass., Bel ami,1885, p. 283).Être endetté jusqu'au cou. Être dans une situation financière inextricable. B.− [P. anal. de forme] 1. Col d'un vase, goulot d'une bouteille : 3. Sous le couvercle soulevé [du panier], parmi des paquets de linge, passaient le coin d'un peigne enveloppé dans du papier, et le cou d'un litre mal bouché.
Zola, La Conquête de Plassans,1874, p. 906. 2. Spéc. Cou de cygne a) MAR. ,,Forte cheville que porte la ferrure terminant l'extrémité d'en dedans d'un gui et qui vient s'introduire dans le piton d'un cercle placé sur le mât`` (Gruss 1952). b) MÉCAN. ,,Partie de l'avant-train d'une voiture à quatre roues qui est courbée`` (Chesn. 1857) : 4. Les voitures les plus ordinaires [à Brunswick] sont des calèches à quatre roues (...) Ces voitures sont à flèche, assez rarement à cous de cygne.
Stendhal, Journal,t. 2, 1808, p. 437. c) AMEUBL. Motif style Empire : 5. Mes yeux, accoutumés aux lits étoilés, aux fauteuils à cous de cygne, aux chenets en sphynx, (...) regardaient avec une sorte de terreur les grands bahuts sculptés...
Hugo, Alpes et Pyrénées,1885, p. 110. Prononc. et Orth. : [ku]. Ds Ac. depuis 1694. Rouss.-Lacl. 1927, p. 167, rappelle que ,,les graphies archaïques sol, fol, col, etc., quand ces mots n'étaient pas liés à une voyelle suivante, devaient se lire sou, fou, cou, etc.`` Homon. coud (de coudre), coup, coût. Quillet 1965 signale que certains écrivent se monter le cou alors qu'il faudrait écrire se monter le coup. Cou-de-cygne [kuḓsiɳ]. Au plur. des cous-de-cygne. Écrit avec trait d'union uniquement ds Pt Lar. 1906, Lar. encyclop. et Lar. Lang. fr.; écrit sans trait d'union ds Ac. 1835 et 1878, Besch. 1845, Lar. 19e-20e, Guérin 1892, Rob., Quillet 1965. Certains dict. renvoient à col-de-cygne (cf. Pt Lar. 1906, Lar. 20e, Quillet 1965). Étymol. et Hist. A. 1. « Partie du corps », a. fr. col, v. ce mot; cou sing. ca 1170 (B. de Ste-Maure, Ducs Normandie, éd. C. Fahlin, 13756); 4equart xives. jusques au cou (Froiss., II, III, 114 ds Littré); 1644 se jeter au cou de qqn (Corn., Le Ment., II, 5, ibid.); av. 1650 la bride sur le cou (Vaugelas ds Trév. 1704); 2. élément de composition dans la dénomination de certains oiseaux 1767 cou rouge « rouge-gorge » (Salerne, Hist. nat. éclaircie dans une de ses parties, l'ornithologie, Paris ds Roll. Faune t. 2, p. 260); 1829 cou-coupé (Boiste). B. P. anal. 1. 1172-74 col del pié (G. de Pont-Ste-Maxence, St Thomas, éd. E. Walberg, 1936, vers 2085; var. kou del pé, ms. Bibl. nat. 13513, 1remoitié xiiies. ds Gdf. Compl.); 2. 1690 « partie étroite et allongée d'une bouteille » (Fur.); 3. élément de composition dans la dénomination de certains végétaux 1732 cou de chameau (Trév.); 1832 cou-de-cigogne (Raymond); 4. 1808, 13 avr. cou de cygne « partie courbe qui dans une voiture à quatre roues, réunit la caisse à l'avant-train » (Stendhal, supra ex. 4). Doublet de col*, à partir du régime plur. cous de ce mot. Fréq. abs. littér. : 5 707. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 6 229, b) 11 582; xxes. : a) 10 107, b) 6 670. Bbg. Darm. Vie 1932, p. 141. − Dauzat Ling. fr. 1946, p. 14. − Gottsch. Redens. 1930, passim. − Guiraud (P.). Mél. d'étymol. arg. Cah. Lexicol. 1970, t. 16, no1, p. 70. − Rog. 1965, p. 24. |