| COSAQUE, subst. masc. et adj. I.− Substantif A.− Habitant du sud-est de la Russie. 1. Anciennement, colons guerriers, nomades et pillards, qui fournissaient une cavalerie irrégulière à l'armée tsariste. Les Cosaques zaporogues (habitant au-delà des cataractes du Dniepr et particulièrement farouches); hetman des cosaques (leur chef); cosaque de la garde : 1. Je fais l'histoire d'un Cosaque nommé Stenka Razine, qu'on a fait mourir à Moscou après qu'il eût pendu et noyé un nombre très considérable de boyards.
Mérimée, Lettres à une inconnue,1870, p. 156. 2. Mod. Habitant des régions occupées par ces peuplades, et en ayant conservé certaines coutumes (vestimentaires, etc.). Cosaques du Don, de la Volga, de l'Oural; être déguisé en cosaque. 3. P. ext., vx; emplois cour. au XIXes. a) Soldat de l'armée russe (les cosaques formant une unité réputée de l'armée russe). Un régiment de cosaques : 2. Les Cosaques! Les Cosaques! criait-on de tous les côtés. (...) Notre héros regarda la grande route; naguère trois ou quatre mille individus s'y pressaient, (...). Après le mot cosaques, il n'y vit exactement plus personne...
Stendhal, La Chartreuse de Parme,1839, p. 61. b) Russe. Il se souvint d'avoir rivé son clou, et vertement, à une espèce de Cosaque, un certain Mi... Milanof (A. Daudet, Tartarin de T.,1872, p. 97). c) HIST. [À une époque où la Russie apparaissait comme l'incarnation de l'autocratie] P. appos. Qui a les caractères de l'autocratie russe. Synon. autoritaire, conservateur; s'oppose à républicain.Cet écroulement des trônes, ce sera le Czar qui l'aura causé. L'Europe cosaque aura fait surgir l'Europe républicaine (Hugo, Actes et par., 2,1875, p. 100). B.− Au fig. 1. Personnage effrayant, brutal. Allez donc un peu plus doucement, espèce de cosaque! (Paris la nuit ds Bruant1901, p. 77). − En partic. Mufle. [Godefroid] Papa! Mettons-la à la porte! ... [Beautendon, indigné] Une femme? Cosaque! (Labiche, Perle Canebière,1855, VI, p. 198). 2. Rare. Pillard : 3. Je ne parle ici que des voleurs profès, qui sont les cosaques réguliers de notre civilisation. Quant au paysan qui vole une gerbe, ce sont là des cosaques irréguliers, de purs accidents.
Vidocq, Mémoires de Vidocq,t. 4, 1828-29, p. 75. 3. Arg. de Saint-Cyr. Recrue maladroite, gaffeur. Ils [les recrues] pourraient commencer à porter au dehors l'uniforme de l'École sans paraître trop cosaques (Titeux, Saint-Cyr,1898, p. 406). Rem. On rencontre dans ce sens les verbes cosaquer « faire une bévue » et décosaquer (trans.) « dresser (une recrue) ». II.− Emploi adj. A.− Qui est d'origine ou de type cosaque. Bonnet, pantalon, toque cosaque (ou à la cosaque). − [P. ell. du déterminé danse] Cosaque, subst. fém. Danse en mesure à 2/4 aux mouvements vifs et bruyants, imitée de la façon de danser des cosaques. Danser la, une cosaque, à la cosaque. On commença par des danses russes, dont les airs sont très agréables et qui ressemblent beaucoup à la cosaque qu'on a dansée à Paris il y a peu d'années (Voyage de La Pérouse,t. 3, 1797, p. 139). ♦ Loc. pop. Je veux te faire danser une cosaque. Je veux te rosser. Rem. Attesté ds Besch. 1845, Guérin 1892. B.− Au fig. 1. [En parlant d'une pers.] Brutal, violent, grossier. À moins que tes Prussiens n'aient tout bu : car ils sont si cosaques! (Richepin, Cadet,1890, p. 288). − Loc. adv. À la cosaque. De façon brutale. Traiter qqn à la cosaque; faire l'amour à la cosaque. Synon. à la hussarde. 2. [En parlant de choses] a) Brutal. Nous avons ici un horrible froid; l'hiver n'est pas ordinairement aussi cosaque, mais il aura voulu se mettre à la mode (Mmede Chateaubr., Mém. et lettres,1847, p. 278). b) Solide. J'ai voyagé avec le Comte Branicki... C'est un cœur et un estomac cosaque, qui digèrerait du lion et du chameau (Mérimée, Lettres M. Panizzi,t. 1, 1870, p. 261). Rem. 1. On rencontre ds qq. dict. le subst. fém. cosaquerie, vx. a) Incursion brusque et rapide. b) ,,Méchanceté commise de gaîté de cœur pour le seul plaisir de nuire`` (Besch. 1845). C'est une vraie cosaquerie! (ibid.). c) ,,Mœurs des cosaques`` (Lar. 20e). d) Maladresse (cf. I B 3). 2. La docum. atteste le verbe trans. cosaquer. Attaquer à la manière des cosaques; p. métaph. (cf. Mérimée, Lettres ctesse de Boigne, 1870, p. 181). Prononc. et Orth. : [kɔzak]. Selon la règle, o est fermé devant [z]. Ainsi dans oser, osier, nervosité, mimosa, exposition, explosion, etc. On note cependant pour certains mots une tendance gén. à ouvrir l'o. Ainsi dans cosaque, créosote, filoselle, losange, mosaïque, myosotis, ozène, philosophe, prosaïque, prosélyte, prosopopée, théosophe. D'autres mots sont tangents. Ainsi on peut encore entendre [ɔ] ouvert dans nosologie, nosographie, mosarabe, roséole. Enfin dans 4 mots : rosaire, roseau, rosette, rosace [ɔ] ouvert est très discuté et dans hosanna l'o est douteux. À ce sujet cf. Kamm. 1964, p. 84. Le mot est enregistré au plur. ds Ac. 1752-1932. (Cf. aussi Gattel 1841). Étymol. et Hist. 1578 cosaques « nomades pillards des bords septentrionaux de la Mer Noire » (Négoc. du Levant, éd. E. Charrière, III, 752); 1606 cosaque (et cosache) « cavalier originaire d'Ukraine, au service du roi de Pologne » (B. Barezzi, La Légende de la vie et de la mort de Démétrius, trad. de l'ital. par Moeusyenbrouck, p. 308 ds Fr. mod., t. 22, p. 208). Empr. au pol. kozak, lui-même empr. aux lang. turques, par l'intermédiaire de l'ukrainien kozak (cf. turc quzzak « aventurier ») (Vasmer, p. 158; FEW t. 20, p. 39). Ce mot n'a pris d'extension en fr. qu'apr. les guerres napoléoniennes, où il désigne tout particulièrement les cosaques du tsar. Fréq. abs. littér. : 325. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 493, b) 738; xxes. : a) 515, b) 255. Bbg. Arveiller (R.). Mots orientaux, notes lexicol. In : Mél. Dauzat, Paris, 1951, pp. 23-32. − Dupuy (A.). Cosaque et cosaquer. Vie Lang. 1969, pp. 624-629. − Goug. Lang. pop. 1929 p. 186 (s.v. cosaquer). − Horning (A.). Zur Wortgeschichte. Z. rom. Philol. 1906, t. 30, pp. 456-457. − Jänicke (O.). Zu den slavischen Elementen im Französischen. In : [Mél. Wartburg (W. von)]. Tübingen, 1968, t. 2, p. 445. − Le Breton Grandmaison. Le Monde de la limonade. Vie Lang. 1971, p. 636. − Neuville (Commandant). Les Traditions à travers le vocab. de Saint-Cyr. 1974. − Sain. Sources t. 1 1972 [1925] p. 153. |