| CORNU, UE, adj. A.− [Correspond à corne I A] Qui porte une (ou plusieurs) corne(s). 1. [En parlant d'animaux] a) Qui a deux cornes sur la tête. Bétail cornu; auroch, bœuf, bouc cornu. Les bêtes cornues, nous ne voulons pas parler des bipèdes mariés qui lors traversaient le Pont-Neuf, mais bien des bœufs (Gautier, Fracasse,1863, p. 294).Les vaches cornues s'immobilisent à travers la route (Triolet, Prem. accroc,1945, p. 376). − Emploi subst. La terre imprégnée gardait les empreintes des chevaux et des cornus (Montherlant, Bestiaires,1926, p. 434). b) Qui a des bois sur la tête. Élan, isard cornu. Sur le désert blanc, galope le chevreuil cornu (Flaub., Tentation,1856, p. 551). c) Qui a une ou plusieurs cornes médianes sur le nez. La tribu des rhinocérotidés, inermes ou cornus (Teilhard de Ch., Phénom. hum.,1955, p. 133). d) Vipère cornue. Vipère qui a des excroissances surmontant les sourcils. Les deux plumes noires de son chapeau [de MmeRézeau] ressemblent vaguement aux appendices de la vipère cornue (H. Bazin, Mort pt cheval,1949, p. 316). e) Qui a deux tentacules rétractiles sur la tête. Des escargots cornus sortant du joint des briques argentaient les vieux murs de baves phosphoriques (Gautier, Albertus,1833, p. 176). 2. [En parlant d'êtres myth.] Démon cornu, le dieu cornu des Celtes, Méphisto cornu. Les touareg redoutent les « ilhinen », les génies au front cornu (Benoit, Atlant.,1919, p. 109): Vous avez inventé le diable.
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Vous n'avez rien trouvé de mieux que le satyre.
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Toujours le pied fourchu, toujours le front cornu.
Hugo, Religions et religion,1880, p. 63. 3. Fig. Mari cornu. Mari trompé (cf. corne I A 3 b avoir, porter des cornes). B.− [Correspond à corne I B] Qui présente une ou plusieurs pointes ou saillies en forme de corne. Bonnet, paquet cornu; roches cornues. Un second portique vient après, en bois de cèdre, d'une forme compliquée et très cornue (Loti, Exilée,1893, p. 214).La tête couverte d'un capuchon cornu (Colette, Dialog. bêtes,1905, p. 104).Je songe aux eaux-fortes moyenâgeuses : castels cornus, donjons crénelés (Farrère, Homme qui assass.,1907, p. 33). − Rare. [Avec un compl.] Le grand-temple de Sérapis, dont la façade était cornue de deux longs obélisques roses (Louÿs, Aphrodite,1896, p. 164). C.− Fig. [En parlant de créations de l'esprit] Extravagant, bizarre. Idées, raisons, visions cornues. Synon. biscornu.Tout est donc cornu ici, les idées et les bouteilles (Hugo, N.-D. Paris,1832, p. 331). Prononc. et Orth. : [kɔ
ʀny]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1150 « qui a des coins ou angles saillants, à deux pointes » chaillos cornus (Roman de Thèbes, 3026 ds T.-L.); 2. fin xiies. « qui a des cornes » cerastre cornu (A. de Paris, Alexandre, éd. Eliott Monographs, br. III, 18, 375); fam. 1608 « mari trompé » (Jean de Schelandre, Tyr et Sidon ds Anc. théâtre fr., 8, 225). Du lat. cornutus, dér. de cornu (corne*). Fréq. abs. littér. : 99. Bbg. Ernout (A.). Philologica. 2. Paris, 1957, p. 17. − Lew. 1960, p. 235. |