| CORNETTE1, subst. fém. I.− Usuel, vx (jusqu'au début du xxes.) A.− Coiffure. 1. Coiffure de femme, faite d'une bande de tissu nouée sur le devant de la tête et dont les extrémités ont l'aspect de petites cornes. Cornette empesée, cornette en organdi, cornette d'indienne; garnitures de cornette; mettre, rajuster sa (une) cornette. Les petites cornettes que l'on voit chez nous rue Vivienne sont très recherchées des ladies, elles les appellent cornettes à la comtesse, à l'éventail, à la parisienne (L'Observateur des modes,t. 1, 1818, pp. 14-15). − Spécialement a) Coiffure que les femmes portaient pour la nuit. Cornette de nuit; en cornette et en camisole/et en peignoir. Elle va se mettre au lit, à peine vêtue, en cornette (Musset, Quenouille Barb.,1840, p. 319). b) Coiffure de femme du peuple. Ses cheveux gris fourrés sous la cornette, et sa pauvre robe de toile tombant en franges sur les sabots (Erckm.-Chatr., Hist. paysan, t. 2, 1870, p. 368). c) Coiffure régionale. Une regrattière de la rue Jacob à la cornette lorraine (E. de Goncourt, Maison artiste,1881, p. 32).La grande cornette des Vannetaises (A. France, P. Nozière,1899, p. 312). d) Coiffure de veuve. Les joues pâles étaient serrées dans la cornette que l'usage provincial imposait aux veuves (Adam, Enf. Aust.,1902, p. 39): 1. Les cornettes [de la veuve Guérin], garnies d'un triple rang de dentelles (...) étaient peu en rapport avec l'idée qu'il s'était faite d'une veuve sérieuse et rangée.
G. Sand, La Mare au diable,1846, p. 115. − Loc. Jeter sa cornette par-dessus les moulins. Jeter son bonnet par-dessus les moulins, se dévergonder. Porter cornette (vx, en parlant d'un homme). ,,Être dominé par sa femme`` (Lar. 19e). Laver la cornette à une femme. ,,La gourmander, lui faire des reproches`` (Lar. 19e). 2. En partic. Coiffure spécifique de certains ordres de religieuses qui a son origine dans le chaperon du Moyen-Âge et correspondent à un costume bien défini. La cornette de la bonne sœur. Quelle âme en paix sous cette blanche cornette! (E. de Guérin, Lettres,1841, p. 425): 2. La sœur en me voyant s'enfuit parce qu'elle n'avait pas de cornette. Je contemplai, pour la première et la dernière fois de ma vie, ses cheveux courts et gris de vieux petit garçon.
Mauriac, La Robe prétexte,1914, p. 128. − Spéc. La grande coiffure aux bords déployés des sœurs de St-Vincent de Paul, ordre hospitalier (portée jusqu'en 1964). Les ailes de la cornette avaient palpité (Coppée, Bonne souffr.,1898, p. 31).Les pointes de sa cornette relevées par une épingle (Druon, Gdes fam., t. 1, 1948, p. 35). − Loc. (début xxes.). Prendre la cornette. Prendre le voile. À la cornette! À bas la cornette! Injure anticléricale employée contre les religieuses, surtout au moment des lois de séparation de l'Église et de l'État. Crier « À la cornette! » (...) pour narguer la religieuse (Alain-Fournier, Meaulnes,1913, p. 213). B.− P. méton. 1. Jeune femme. Grâce à mes dix cornettes, elle [la maison] n'a plus besoin de rien (Mmede Chateaubr., Mém. et lettres,1847, p. 262).Le sale Marat fit une horreur profonde à cette cornette propre et attifée, et lui donna la force de se servir de ce couteau (Barb. d'Aurev., 3eMemor.,1856, p. 58). 2. Femme trompée. Une cornette est moins ridicule qu'un cornard (Nouv. Lar. ill.). Emploi adj. Femme cornette. − Subst. masc. Mari trompé. Synon. cornard. II.− P. anal., MAGISTRATURE. ,,Longue et large bande de taffetas, que les Conseillers au Parlement portoient autrefois au cou, pour marque d'honneur, et que François Ieraccorda aux professeurs du Collège Royal de Paris`` (Ac. 1798). ,,Chaperon que certains magistrats portaient d'abord sur la tête, puis sur l'épaule`` (Lar. 19e). Rem. On rencontre en Suisse romande, en emploi anal., cornette. Pâte alimentaire en forme de cornette ou de coude. On précipitera dans le potage une poignée de cornettes (J. Montandon, Le Valais à table, Sion 1975, p. 121). Prononc. et Orth. : [kɔ
ʀnεt]. Ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 2emoitié xiiies. « corne, pointe d'une coiffure de femme » (Contenance des femmes, éd. Jubinal, Nouv. Rec., II, p. 176); 1396 « bande, draperie [issue de la pointe] couvrant la tête des femmes, retombant par derrière » (Compte ds Gay); 1532 « pièce de taffetas noir que portaient autour du coû les universitaires et les parlementaires » (Rabelais, Pantagruel, éd. L. Saulnier, V, 113); 2. av. 1514 p. anal. de forme avec cette draperie « enseigne » (Lemaire de Belges, Pompe funeralle de Phelipes de Castille ds Hug.); d'où 1554 « troupe de cavalerie » (Amyot, Diodore, XVII, 12, ibid.); 1578 « celui qui porte l'enseigne » (H. Estienne, Dial. du lang. franç. ital., I, 369, ibid.). Dér. de corne*; suff. -ette*. Fréq. abs. littér. : 87. |