| CONTAGION, subst. fém. A.− MÉDECINE 1. Transmission d'une maladie d'une personne à une autre. Contagion directe ou indirecte; contagion médiate ou immédiate : 1. Quelle existence, digne Hénarès, que celle qui nous reste dans une ville où la rencontre d'un ami peut être un accident funeste; où une main pressée dans la vôtre peut déposer le germe de la contagion; où un embrassement donne la mort!
Latouche, L'Héritier, Dernières lettres de deux amans de Barcelone,1821, p. 149. SYNT. La contagion des oreillons; la crainte de la contagion; un agent, un foyer, un mode, des risques de contagion; la contagion menace, gagne, se communique, s'étend, se répand; échapper, résister, s'exposer à la contagion; lutter, se prémunir contre la contagion; être sujet à la contagion; être à l'abri de la contagion; être atteint par la contagion. − Rare. Fait d'être contagieux : 2. Car celui-là seul remplit ses jours de qui la charité non contente de panser les plaies du voyageur meurtri, pardonne à la Madeleine d'être belle comme au lépreux sa contagion, et supporte sans envie l'ostentation des argentiers, l'orgueil des savants, le mépris léger des princes.
Toulet, Le Mariage de Don Quichotte,1902, p. 155. 2. P. méton. Maladie contagieuse, épidémie. Les ravages de la contagion; être emporté par la contagion. 3. P. ext. Transmission par mimétisme, d'une réaction, d'un comportement. La contagion du bâillement, du rire, des larmes (cf. Maupassant, Contes et nouvelles, t. 1, Jour de fête, 1886, p. 1058).Pleurer, rire par contagion. 4. PSYCH. Contagion mentale. Transmission d'une idée ou d'un ensemble d'idées délirantes à une ou plusieurs autres personnes (Méd. Biol. t. 1 1970). Contagion nerveuse, névropathique (cf. E. et J. de Goncourt, Journal,1889, p. 1029): 3. Était-ce un de ces demi-hallucinés qui foisonnent dans ces crises de psychose collective que sont les révolutions? Car c'était bien une contagion de folie qui soulevait ces parisiens, ces civilisés, d'une colère de sauvages.
P. Bourget, Nos actes nous suivent,1926, p. 18. SYNT. La contagion collective (R. Martin du Gard, Les Thibault, L'Été 1914, 1936, p. 453). La contagion générale, démente. La contagion des colères rassemblées (Lemaitre, Les Contemporains, 1885, p. 272). B.− Au fig., p. anal. Transmission de toute chose bonne ou mauvaise par fréquentation, influence, imitation. Un amour de contagion. Un amour inspiré par contagion (cf. Stendhal, Lucien Leuwen, t. 3, 1836, p. 398). SYNT. Les forces, les phénomènes de contagion; le pouvoir, la vertu de contagion; se communiquer, se répandre par contagion ou comme une contagion; agir, émouvoir, haïr par contagion. 1. [Le déterminant désigne ce qui est transmis] a) [En parlant d'un sentiment, d'un état moral, d'une idée] :
4. On ne pouvait se défendre de les envier et de les aimer, dans une contagion enchantée de tendresse. Ils dégageaient un charme qui retournait les cœurs.
Zola, Le Docteur Pascal,1893, p. 184. SYNT. a) La contagion des affections, de l'amour, de la tristesse, de l'angoisse, de l'ennui. b) La contagion de la franchise, de la foi, de la haine, du mystère, de la paix, de la sérénité, du vice. c) La contagion de l'erreur, des idées, des préjugés, de la sottise; la contagion du libéralisme, du positivisme. b) [En parlant d'une attitude, d'un comportement, d'un intérêt pour qqc.] Une contagion de partage (Frapié, La Maternelle,1904, p. 271). SYNT. Une contagion d'activité, de commérages, de silence, de suicide; la contagion du cigare, de la mode, du style; la contagion d'architecture. − Dans le domaine de l'art.Inspiration. Il y eut (...) dès le premier tiers du siècle XVIIIe, une sculpture aux formes entortillées, modelé tourmenté, par contagion de la rocaille (L. Hourticq, Hist. gén. de l'Art,La France, 1914, p. 284). 2. [Le déterminant désigne ce qui provoque la contagion] La contagion de l'exemple, du mauvais exemple : 5. Cette étude perpétuelle que mettait le philosophe à séparer son ame de la contagion de son corps, et à s'affranchir des passions afin d'être plus libre et plus léger au moment de partir pour l'autre vie, a dégénéré en abstractions de la vie contemplative, et a engendré toutes les vertus chimériques, connues sous les noms de célibat, d'abstinences, de jeûnes...
Dupuis, Abr. de l'orig. de tous les cultes,1796, p. 521. SYNT. La contagion de l'âme, de l'atmosphère, des villes; la contagion de la Cour, du trône. − Au plur. Dangers. Les contagions de son temps (cf. Sainte-Beuve, Causeries du lundi,t. 1, 1851-1862, p. 393). 3. P. méton. Influence, effet. Aucune déclaration, nulle preuve de passion insensée n'eut de contagion plus violente que ces symphonies de fleurs (Balzac, Le Lys dans la vallée,1836, p. 119). Rem. 1. On rencontre ds les dict. le subst. masc. contagionnisme. ,,Doctrine médicale selon laquelle toute maladie infectieuse se transmet par contagion externe`` (Méd. Biol. t. 1 1970). 2. On rencontre ds la docum. et les dict. contagionniste, adj. et subst. ,,Partisan du contagionnisme`` (Méd. Biol. t. 1 1970). Préjugés contagionistes [sic] (G. Sand, Un Hiver à Majorque, 1842, p. 46). Prononc. et Orth. : [kɔ
̃taʒjɔ
̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1375 [éd. 1531] domaine moral (R. de Presles, Cité de Dieu, X, Esp. sur le chap. 9 ds R. Hist. litt. Fr., t. 8, p. 489); 1538 (R. Estienne, Dictionarium latinogallicum : contagio, contagium, attouchement dommageable et dangereux); 1596 « peste » (Hulsius). Empr. au lat. class. contagio (composé à partir de cum et de la racine de tangere « toucher ») « contact, contagion, contamination », fig. « influence pernicieuse ». Fréq. abs. littér. : 428. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 612, b) 349; xxes. : a) 579, b) 761. |