| CONSEIL, subst. masc. I.− [Désigne ce qui tend à diriger la conduite de qqn] A.− Vx. Résolution mûrement pesée, détermination. Ne m'en parlez plus, le conseil en est pris. Je ne sais quel conseil prendre (Ac.1798-1932). − Spéc., plur. Desseins (de Dieu, de la Providence) concernant la conduite du monde : 1. Il entrait dans les conseils de Dieu d'accorder au vœu de l'obscurité et de l'innocence la conservation des jours qu'une vaine renommée menaçait d'atteindre et que devaient troubler tant de passions.
Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 1, 1848, p. 31. B.− Usuel. Avis donné à quelqu'un pour l'aider à diriger sa conduite. Donner, demander, suivre un conseil; un bon conseil. 1. [Avis donné par une pers.] Vous êtes une des rares personnes à qui je demanderais des conseils et des avis sur ce que j'ai à faire (Balzac, Correspondance,1838, p. 465).Suis le vieux conseil des Grecs : sois prudent dans le triomphe et crains l'excès, même dans le bien (Montherlant, Les Olympiques,1924, p. 302): 2. ... dans une pareille crise tu me dois d'écouter mes conseils et de ne prendre aucun parti sans m'avoir consultée.
Mmede Staël, Lettres de jeunesse,1791, p. 477. − (Être) un homme de conseil, (être) de bon conseil, prendre conseil de qqn. Rappelle-toi qu'il te reste une amie bonne au conseil et à l'exécution (A. Dumas Père, Les Demoiselles de Saint-Cyr,1843, II, 10, p. 139).Le curé était, disait-on, un homme digne et respectable, et de bon conseil (Hugo, Les Misérables,t. 1, 1862, p. 264): 3. ... après cet aveu, il reste un grand moment silencieux comme s'il vous interrogeait, comme s'il vous demandait ce qu'il doit faire. Et (...) je lui dis que dans les questions de cœur, on ne doit prendre conseil que de soi-même...
E. et J. de Goncourt, Journal,1896, p. 969. SYNT. Avoir besoin de conseils, écouter les conseils, aider qqn de ses conseils; un dernier conseil, de mauvais, de sages conseils, des conseils pratiques, utiles; des conseils de prudence. − Par personnification. [Avis donné par la nature, la vie, etc.] Les conseils de l'expérience (Crèvecœur, Voyage dans la Haute Pensylvanie,t. 1, 1801, p. 136). 2. Expr. diverses − Fam. Donner un conseil d'ami, p. ell. (sur un ton de menace) un conseil (d'ami). Voulez-vous que je vous donne un conseil d'ami? Partez pour Naples (A. Dumas Père, Le Comte de Monte-Cristo,t. 2, 1846, p. 450): 4. Vous me cherchez querelle, Monsieur, je vois cela; mais un conseil, Vicomte, et retenez-le bien : c'est une coutume mauvaise que de faire du bruit en provoquant.
A. Dumas Père, Le Comte de Monte-Cristo,t. 2, 1846p. 419. − Expr. proverbiales ou vieillies ♦ La nuit porte conseil. Il faut prendre le temps (p. ex. d'une nuit de repos) de réfléchir tranquillement avant de prendre une décision. ♦ Prendre conseil de (qqc.). Se déterminer d'après. Nous prendrons conseil des circonstances (Verne, L'Île mystérieuse,1874, p. 447). ♦ Prendre conseil de son bonnet de nuit (fam.). Se donner la nuit pour réfléchir. 3. Spéc., RELIG. CATH. Ce qui est recommandé pour atteindre à la perfection morale et spirituelle (p. oppos. au précepte ou au commandement qui, pour un chrétien, sont obligation). Les conseils évangéliques (Teilhard de Chardin, Le Milieu divin,1955, p. 110): 5. Le sacrement de l'Ordre le fut [transformé] en particulier par le seul fait de la transformation et de la réduction de ces autres sacrements de la confession et de l'eucharistie, la confession s'étant changée à peu près en simple conseil, et l'eucharistie en commémoration.
Sainte-Beuve, Port-Royal,t. 1, 1840, p. 450. II.− P. méton. [Désigne une ou plusieurs pers.] A.− [Désigne une pers.] 1. Personne qui en assiste une autre de ses avis pour la guider dans la conduite de sa vie et/ou de ses affaires. Dans son trouble, elle eut recours au guide, au conseil de l'épouse catholique, au confesseur (A. Daudet, Les Rois en exil,1879, p. 433): 6. ... je me marie (...) Il me fallait auprès de moi quelqu'un qui fût surtout un conseil, une consolation et un soutien.
Maupassant, Bel-Ami,1885, p. 207. 2. Spéc. >
[Suivi d'un adj. déterminant ou deuxième élément de subst. composés, où il s'ajoute le plus souvent à un nom de profession, voire p. méton. à un nom de lieu] Personne dont la fonction est d'assister une ou plusieurs personnes dans un certain domaine; spécialiste consulté par un client, une entreprise, sur des questions techniques, commerciales. Conseil judiciaire. Personne désignée par un tribunal pour assister une personne portée à une prodigalité excessive ou faible d'esprit, notamment dans la gestion de ses biens. Synon. curateur.Conseil juridique. Personne qui, sans avoir la qualité d'avocat, fait profession de donner des avis pouvant avoir des implications juridiques. Synon. usuel conseiller juridique.Avocat(-)conseil, ingénieur(-)conseil. B.− [Désigne un groupe de pers.] 1. Groupe de personnes chargées de donner des avis dans certaines affaires publiques ou privées, et/ou d'administrer et de diriger; assemblée, réunion statutaire de personnes groupées en assemblée consultative et/ou délibérative. Un conseil de rédaction. [Le salarié] pourra, par ses camarades délégués dans les conseils de gestion, gérer les fonds de la caisse (Jaurès, Ét. socialistes,1901, p. 183): 7. ... ces maisons-là ont ce qu'on appelle un conseil. C'est une assemblée de quelques bons casuistes judiciaires qui veillent aux intérêts du propriétaire.
Balzac,
Œuvres diverses,t. 1, 1850, p. 123. − P. méton. Séance tenue par un tel groupe. Tenir conseil. Se concerter et/ou délibérer en séance de groupe. Le maréchal des logis, (...) tint conseil avec ses hommes. La conférence durait bien depuis cinq minutes (Stendhal, La Chartreuse de Parme,1839, p. 77). − Spécialement a) DR. Conseil de famille. Assemblée composée de parents, d'alliés ou d'amis de la famille du mineur, présidée par le juge des tutelles, qui participe à la gestion des biens du mineur. Conseil de fabrique. ,,Corps des administrateurs chargés de régir les biens et les revenus d'une église, sous la présidence de l'administration ecclésiastique ou de son délégué`` (Cap. 1936). b) ÉCON. Conseil d'administration. Réunion des administrateurs d'une société anonyme; p. anal. réunion des personnes chargées de gérer certaines collectivités publiques ou privées. Conseil d'administration du C.N.R.S. Conseil de surveillance. Organisme de contrôle dans les sociétés anonymes. Conseil national du patronat français (C.N.P.F.). c) ENSEIGN. Conseil de classe. Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (Pédag.1972). d) HIST. Conseil aulique*. Conseil des anciens et conseil des cinq-cents. Assemblées constituant le corps législatif, tel qu'il fut établi par la Constitution de l'an III : 8. ... un autre décret avait formé un conseil de régence, présidé par Cambacérès et composé de ministres, à la tête duquel était placée l'impératrice.
Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 2, 1848, p. 482. − Conseil national de la Résistance (C.N.R.). Organisme formé de représentants de huit mouvements de résistance, créé en 1943, dont l'action aboutit en particulier à l'établissement d'un programme de réformes à effectuer après la Libération : 9. Je leur [à ces responsables] donnai pour instruction de hâter la formation, autour de Jean Moulin, du conseil national de la résistance qui comprendrait les représentants de tous les mouvements, syndicats et partis.
De Gaulle, Mémoires de guerre,1956, p. 37. e) POL. Conseil de cabinet*, conseil constitutionnel, conseil des ministres, conseil municipal, conseil général, conseil économique et social. Conseil de l'Europe. Organisme groupant dix-huit États européens qui s'occupe de problèmes d'intérêt commun sur le plan politique, économique, culturel et fait des propositions qui sont soumises aux gouvernements des États membres. Conseil de Sécurité des Nations Unies. Organe de l'O.N.U. composé de 15 membres sur lequel repose « la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales ». 2. Réunion de personnes exerçant une juridiction. a) HIST. Conseil des Dix. Tribunal secret de la République de Venise. Aux deux tables [du Repas chez Simon] sont assis les apôtres (...) on dirait à leur air de patriciens de Venise, des membres du conseil des Dix (T. Gautier, Guide de l'amateur au Musée du Louvre,1872, p. 45).Conseil privé ou des parties. Section du conseil du roi qui jouait le rôle de notre cour de cassation. b) DR. Conseil académique, conseil de l'Université. Conseil de discipline. Assemblée chargée de prononcer des peines disciplinaires ou de formuler à cet égard des avis, dans certains corps constitués (corps de troupe, administration, lycée, compagnie d'avoués ou de notaires). Conseils de l'Ordre des Avocats, des Médecins. [Législ. du travail] Conseil de prud'hommes. Organisme paritaire chargé de trancher les litiges qui surviennent entre un employeur (industriel, commerçant ou agriculteur) et un salarié, dès lors que le litige est né à l'occasion du contrat de travail. Conseils supérieurs de la défense nationale, de l'Éducation nationale, de la guerre, de la magistrature, etc. Corps administratifs délibérants placés auprès d'un ministre qui donnent des avis et jouent un rôle contentieux. Conseil d'État. Tribunal le plus élevé de l'ordre administratif, possédant des attributions juridictionnelles et administratives : 10. ... il m'a dit bref qu'il [le censeur des études] avait été surpris dans un bordel et qu'il allait être traduit devant le conseil académique; ...
Flaubert, Correspondance,1837, p. 24. c) JUST. MILIT. Conseil de guerre. Synon. tribunal militaire.Être traduit en (devant un) conseil de guerre. Conseil de révision. Juridiction administrative chargée de se prononcer sur l'aptitude au service militaire. De 1903 à 1912, les conseils de révision ont ajourné 33.020 tuberculeux (G.-H. Roger dsNouv. Traité Méd.,fasc. 4, 1925, p. 219). SYNT. Le président, les membres du conseil; la salle du conseil; la séance, les délibérations (avis) du conseil; réunir (assembler) le conseil; assister à un conseil; présider un conseil; faire partie d'un conseil. 3. P. méton. (des emplois B 1, 2) a) Séance tenue par les membres d'un conseil. Est-ce que le conseil sera très chargé ce matin* (Zola, Son Excellence E. Rougon,1876, p. 277).Un long conseil des ministres (Joffre, Mémoires,t. 1, 1931, p. 221). b) Lieu où se tiennent les réunions d'un conseil. Se rendre au conseil. Prononc. et Orth. : [kɔ
̃sεj]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. A. 1. xes. « avis que l'on donne à quelqu'un sur ce qu'il doit faire » (St Léger, éd. J. Linskill, 69); 1611 proverbe (Cotgr. : La nuict donne conseil); 1690 théol. [p. oppos. aux préceptes] les Conseils Evangéliques (Fur.); 2. fin xes. « pensée mûrement réfléchie, projet » (La Passion, éd. D. S. Avalle, 79); 1165-70 consoil prandre « arrêter un projet, un plan » (Chr. de Troyes, Erec, 2566 ds T.-L.); spéc. a) 1536 contexte théol. (Calvin, Inst., VIII, p. 471 ds Hug. : Nous appelons Predestination le conseil eternel de Dieu par lequel il a déterminé ce qu'il vouloit faire d'un chascun homme); b) 1686 subst. masc. plur. « principes qui dirigent une personne » (Bossuet, Le Tellier ds Littré). B. 1. 1100 « réunion de gens qui délibèrent, délibération » (Roland, éd. J. Bédier, 3761, 3793); 1242 spéc. « réunion de personnes officiellement chargées de certaines tâches administratives » (Roisin, p. 253 : al conseil de la vile de Lille); xvies. conseil d'Estat (Carloix, VI, 35 ds Littré); 2. 1671 « lieu où se tiennent ces délibérations » (Pomey, p. 206); C. Fin xiies. synon. de conseiller (Moniage Guillaume, éd. W. Cloetta, II, 4896). Du lat. class. consilium « avis, conseil que l'on donne; délibération, plan, projet; réunion de personnes qui délibèrent, assemblée délibérante ». Fréq. abs. littér. : 9 294. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 15 812, b) 12 677; xxes. : a) 12 220, b) 11 890. Bbg. Gottsch. Redens. 1930, p. 233, 438. − Stefenelli (A.) Der Synonymenreichtum der altfranzösischen Dichtersprache. Wien, 1967. |