| CONNAISSEUR, EUSE, subst. A.− Emploi subst. Celui, celle qui se connaît à, en quelque chose. Un fin, un grand connaisseur; être bon connaisseur (de, en + subst.). 1. Synon. de compétent, expert, versé (dans).Soumettre un objet à l'appréciation d'un connaisseur; examiner, juger, peser qqc. en connaisseur; un connaisseur averti, habile; se donner pour connaisseur en. Je le montrerai [le camée] demain matin à un grand connaisseur pour avoir le cœur net de son antiquité (Mérimée, Lettres à la comtesse de Montijo,t. 1, 1870, p. 369).Pour apprécier une performance, être sinon un initié du moins un connaisseur (Jeux et sp.,1968, p. 1287): 1. Les automobiles, les vélocipèdes, les timbres-poste, il les examinait avec la sévérité du connaisseur dégagé de tous les soucis de la possession, mais avec la satisfaction que donne ce désintéressement.
Queneau, Pierrot mon ami,1942, p. 211. − Synon. plus rare de spécialiste.Je suis même soigné, et comme un prince, par le plus grand connaisseur de la tuberculose qu'il y ait au monde (Romains, Les Hommes de bonne volonté,La Douceur de la vie, 1939, p. 169). Rem. On rencontre dans Besch. 1845, Littré, Guérin 1892, Nouv. Lar. ill., Lar. 20el'emploi de connaisseur en vénerie. Un bon connaisseur désigne celui qui sait estimer l'âge et le sexe d'une bête en fonction de ses simples connaissances (cf. connaissance). − En partic. Qui connaît bien la nature humaine. Il [Fauriel] a été le plus bel homme de Paris, MmeC. [Sophie Grouchy], grande connaisseuse, se l'adjugea (Stendhal, Vie de Henry Brulard,t. 1, 1836, p. 117).Richelieu, grand connaisseur d'hommes (Bremond, Hist. littér. du sentiment relig. en France,t. 4, 1920, p. 40). 2. B.-A. (partic. archit., peint., sculpt.). Synon. plus fort d'amateur et plus faible de collectionneur : 2. Aujourd'hui le sculpteur insiste sur le détail anatomique qui frappera les connaisseurs, et sur l'expression saillante que comprendront les ignorants.
Taine, Voyage en Italie,t. 2, 1866, p. 166. 3. P. ext. Celui, celle qui apprécie les bonnes ou les jolies choses. Un public de connaisseurs; une édition réservée à un petit nombre de connaisseurs; goûter un plat en connaisseur. Vous êtes connaisseur en bonne cuisine, madame Daigne, et (...) vous êtes une fine bouche, à ce qu'on dit (R. Martin du Gard, Vieille France,1933, p. 1035).Ce dernier [le prince de Galles], passionné d'argenterie et de surcroît homme de goût et fin connaisseur (S. Grandjean, L'Orfèvr. du XIXes. en Europe,1962, p. 14): 3. L'homme le [Conan] regarde, avec un demi-sourire, celui du propriétaire de vignobles qui fait déguster un cru fameux et attend l'hommage du connaisseur.
Vercel, Capitaine Conan,1934, p. 24. ♦ En connaisseur : 4. Elle [la chienne] ne se trompe pas de chaise à table, chérit le poisson, prise la viande, se contente d'une croûte de pain, gobe en connaisseuse la fraise et la mandarine.
Colette, La Maison de Claudine,1922, p. 218. SYNT., et EXPR. Avoir affaire à un connaisseur; monsieur est (parle en) connaisseur; p. iron. faire le connaisseur; se donner l'air, des airs de connaisseur. PARAD. a) Synon. averti, dégustateur, gourmet, initié. b) Anton. ignorant, incompétent, profane. B.− [En constr. d'appos. avec valeur d'adj.] Un air, un coup d'œil, un œil, un regard connaisseur (cf. supra A 3).Qu'on ne dise donc plus : la poésie est morte! (...) Ce qui vraiment est mort, c'est l'homme connaisseur Sachant priser du vers la force et la douceur (A. Pommier, Crâneries et dettes de cœur,1842, p. 15). 5. M. P.-K. Hartmann appréciait hautement le chef caviste, capable à maintenir la saveur particulière que la maison faisait suivre d'une année à l'autre pour ne jamais surprendre la clientèle connaisseuse par une variation de ce produit de grand renom : Champagne P.-K. Hartmann.
Hamp, Vin de Champagne,1909, p. 147. Rem. Le fém. connaisseuse est admis dans Ac. mais n'est pas très usité. Dans l'emploi subst. en partic. le masc. s'emploie même en parlant d'une femme (cf. R. Martin du Gard, loc. cit.). Prononc. et Orth. : [kɔnεsœ:ʀ], fém. [-ø:z]. Ds Ac. depuis 1694. Cf. connaître. Étymol. et Hist. Ca 1170 subst. connoisseor (Benoit, Chronique des ducs de Normandie, éd. C. Fahlin, 35553); 1659 subst. fém. (Molière, Les Précieuses ridicules, éd. R. Bray, t. 1, scène IX, p. 268); 1771 adj. (Trév.). Dér. de connaître*; suff. -eur2*. Fréq. abs. littér. : 392. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 513, b) 420; xxes. : a) 692, b) 587. Bbg. Gall. 1955, p. 58. − Quem. 2es. t. 4 1972. |