| CLOWN, subst. masc. A.− Vx. Paysan, bouffon du théâtre anglais. Le bouffon anglais n'a rien du valet de comédie (...) Le seul personnage avec lequel on puisse le confondre est son compatriote, le clown qui lui survit encore aujourd'hui (Thibaudet, Réflexions sur la littér.,1936, p. 90). B.− Usuel. Artiste de cirque au costume et au maquillage extravagants qui emploie ses talents à faire rire les spectateurs au moyen de pitreries diverses, fondées principalement sur la parodie et la dérision. Synon. auguste, paillasse, pitre : 1. Il est l'homme qui, dans un cirque, aux acclamations de la foule, soulève des haltères, ou, plutôt, il est le clown qui, après que les hercules ont terminé leurs passes, les parodie en jonglant, lui aussi, avec des haltères, mais qui sont en carton et creux.
Huysmans, L'Art. mod.,1883, p. 159. SYNT. Clown nain; clown musicien (ou musical); clown dresseur, parleur, sauteur; costume (ou maillot) de clown; numéro de clown; maquillage (ou grimage) de clown; perruque de clown; agilité, légèreté, talent de clown. − Spéc. Clown blanc. Artiste au costume richement brodé et recouvert de paillettes, au visage plâtré, au bonnet conique, ayant pour rôle de provoquer ou de mettre en relief le ridicule de son partenaire (cf. Hist. des spectacles, 1965, p. 1539). C.− Au fig. 1. Personne qui prête à rire ou qui amuse les autres par son apparence physique ou son comportement. Quel clown! faire le clown; ressembler à un clown; avoir l'air, l'allure d'un clown. Bille de clown (arg.) : 2. Ah! Certes, il était drôle, le père Pavilly, avec ses grandes jambes d'araignée et son petit corps, et ses longs bras, et sa tête en pointe surmontée d'une flamme de cheveux rouges sur le sommet du crâne. C'était un clown, un clown paysan, naturel, né pour faire des farces, pour faire rire, pour jouer des rôles, des rôles simples puisqu'il était fils de paysan, paysan lui-même, sachant à peine lire.
Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, Les 25 francs de la Supérieure, 1888, p. 251. − [Empl. comme compl. déterminatif] De clown. Qui est destiné à faire rire : 3. ... ils [les enfants anglais] vivent avec Alice au pays des merveilles et Peter Pan. Nulle part, une telle prodigalité de fantaisie n'est mise à la disposition du premier âge. De mon temps, nous n'avions pas cette littérature de clown...
Barrès, Mes cahiers,t. 13, 1921-22, p. 181. − Emploi adj. Un peu clown. Un peu ridicule. [Lui] dégingandé, un peu clown, blagueur qui voulait nous accompagner jusqu'à Carnot (Gide, Voyage au Congo,1927, p. 771). − Littér. [Le clown, symbole de tristesse dissimulée sous le rire] Clown malheureux, sombre, triste; pauvre clown. Des clowns succédèrent, enfarinés, presque tragiques de sérieux même dans leurs pantomimes folles (P. Bourget, Études et portraits,Études anglaises, 1888, p. 331).Il en fait (Fernand René du rôle de Goffard dans la dame aux gants verts) une sorte de très curieux clown douloureux et déshonoré (Colette, La Jumelle noire,1938, p. 100): 4. Un rire triste comme un clown en habit noir.
Renard, Journal,1890, p. 65. Rem. Dans cet ex., il est fait allusion au clown en habit noir, spécialité angl. (cf. Lar. 19eSuppl. 1878). 2. Péj. Personne qui ne peut être prise au sérieux à cause de son attitude irréfléchie, de son incompétence ou de son inconsistance dissimulée sous une fausse assurance. Prendre pour un clown, traiter de clown. Synon. fantoche, guignol, marionnette, pantin.− J'attends la défaite française, me dit Savine avec tranquillité. Que voulez-vous faire avec des clowns pareils à la tête d'un pays? (Abellio, Heureux les pacifiques,1946, p. 298): 5. ... c'est ce que le Parti Radical commence à comprendre; mais si habiles que soient ses clowns, il aura de la peine à en trouver qui sachent éblouir les gros banquiers juifs aussi bien que le font Jaurès et ses amis.
Sorel, Réflexions sur la violence,1908, p. 79. Rem. 1. On rencontre ds la docum. 2 ex. chez Huysmans du fém. clownesse au sens fig. à valeur péj., dont l'un est répertorié ds Guérin 1892; Rob. Suppl. 1970 (avec la mention ,,rare et litt.`` et un ex. de P. Guth) et Lar. Lang. fr. (avec la mention ,,peu usité`` et un ex. d'un des Goncourt) enregistrent le sens de femme clown qui est l'expr. la plus cour. 2. On rencontre ds la docum. le subst. clownisme, méd. [P. réf. aux gesticulations d'un clown] Suite de mouvements incohérents et d'apparence ridicules exécutés par un malade au cours d'une crise d'hystérie (cf. Méd. Biol. t. 1 1970); attesté aussi ds Guérin 1892 qui attribue le mot à Charcot) et l'adj. corresp. clownique. Qui caractérise les mouvements d'un malade atteint de clownisme. Charcot détermine très bien les phases de l'accès [d'hystérie], note les attitudes illogiques et passionnelles, les mouvements clowniques; il découvre les zones hystérogènes (Huysmans, Là-bas, t. 1, 1891, p. 234). Prononc. et Orth. : [klun]. Pour la francisation de ce mot cf. Kamm. 1964, p. 73 et aussi Mart. Comment prononce 1913, p. 343 : ,,Nous réduisons facilement ow à ou dans clown, teagown, cowpox ou browning``. Cependant les gens du cirque eux-mêmes défendent la prononc. [klo:n]. Admis ds Ac. 1932. Étymol. et Hist. 1823 (A.-D. d'Arcieu, Diorama de Londres, p. 158 ds Fr. mod., t. 17, p. 287 : le Pierrot, que les Anglais appellent clown); 1884 fém. clownesse (Huysmans, À rebours, p. 138). Angl. clown, attesté dep. la 2emoitié du xvies. sous les formes cloyne, cloine, puis clown au sens de « homme rustre, paysan » d'où « bouffon, fou » et plus spéc. à partir du xviiies. « pantomime, personnage des arlequinades et du cirque » (NED), peut-être d'orig. b. all. (NED; Klein Etymol.). Fréq. abs. littér. : 172. Bbg. Baudez (J.). Le Cirque et son lang. Vie Lang. 1962, p. 241. − Weil (A.). En Marge d'un nouv. dict. R. Philol. fr. 1932, t. 45, p. 14. |