| CHOCOLAT, subst. masc. A.− Aliment composé essentiellement de cacao et de sucre. On est convenu d'appeler chocolat le mélange qui résulte de l'amande du cacao grillée avec le sucre et la cannelle (Brillat-Savarin, Physiol. du goût,1825, p. 114). 1. a) Au sing. Pâte solidifiée composée de ce produit auquel sont incorporés parfois des aromates ou divers autres éléments. Un morceau (une tablette) de chocolat; du chocolat praliné (cf. Balzac, La Cousine Bette, 1846, p. 408); du chocolat purgatif (H. Bazin, Vipère au poing,1948, p. 53): 1. Nous possédions les plus précieuses monnaies d'échange, chocolat et cigarettes. Contre ces richesses nous obtînmes des produits plus substantiels et qui nous faisaient défaut : ...
Ambrière, Les Grandes vacances,1946, p. 316. − Emploi à valeur adj., en PÂTISS. Au chocolat. Crème, éclair, soufflé au chocolat. b) Au sing. ou au plur. Bonbon au chocolat. Je lui ai envoyé ce sonnet au lieu de fleurs ou chocolats (Valéry, Correspondance[avec Gide], 1918, p. 461).Une demi-livre de chocolats mélangés (Guéhenno, Journal d'une « Révolution », 1937, p. 92). 2. P. méton. Boisson préparée avec du chocolat en morceaux ou en poudre, dissout ou cuit dans de l'eau ou du lait. Une tasse de chocolat; prendre du (son) chocolat : 2. Dès sept heures du matin, elle m'apportait elle-même une tasse de chocolat. Je n'en ai jamais bu de pareil. Un chocolat à s'en faire mourir, moelleux, velouté, parfumé, grisant. Je ne pouvais ôter ma bouche des bords délicieux de sa tasse.
Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, Ce cochon de Morin, 1882, p. 853. B.− Invar. Couleur chocolat, et, p. ell. chocolat. Couleur brun rouge foncé. Un gilet chocolat (Sue, Atar Gull,1831, p. 5): 3. ... le teint de ces jeunes personnes, vêtues à l'orientale, variait du bistre à l'olivâtre, et arrivait, chez la dernière, au chocolat le plus foncé.
Nerval, Voyage en Orient,t. 1, 1851, p. 160. − Arg. Boîte à chocolat. Cercueil couvert d'une toile brune (cf. Esn. 1966). Nous allons à la Charité. (...). Nous assistons à la visite et nous voyons mettre dans la boîte à chocolat un paquet noué aux deux bouts, qui est une morte (E. et J. de Goncourt, Journal,1860, p. 856). C.− Emploi adj. invar., pop. [Être] chocolat. Être attrapé, dupé, déçu. « Elle vient se faire régler une petite note, voilà tout. Et elle a peur de repartir chocolat » (P. Bourget, Nos actes nous suivent,1926, p. 159). − Emploi subst. Faire le chocolat. Faire le naïf, le crédule (cf. Temps, 1886 ds G. Fustier, Suppl. au dict. de la lang. verte d'A. Delvau, 1889, p. 522). Rem. On rencontre ds la docum. a) L'adj. chocolateux, euse, péj. Ces éclairs vomitivement chocolateux (Colette, Claudine s'en va, 1903, p. 68). b) Le subst. fém. chocolatine. Bonbon au chocolat (cf. E. Brumpt, Précis de parasitologie, 1910, p. 72). Prononc. et Orth. : [ʃ
ɔkɔla] ou [-lɑ]. a) Timbre de l'initiale. [ɔ] ouvert ds la majorité des dict. Barbeau-Rodhe 1930 note [o] fermé quand on prononce [ɑ] post. à la finale. b) Timbre de la finale. [a] ant. ds DG, Dub., Pt Rob., Pt Lar. 1968 et Lar. Lang. fr.; cf. aussi ds Grammont Prononc. 1958, p. 138. [a] ou [ɑ] post. ds Passy 1914 et ds Warn. 1968. [ɑ] post. quand l'initiale se prononce [o] fermé ds Barbeau-Rodhe 1930. Fouché Prononc. 1959, p. 61 note que pour la finale -at on peut prononcer un [ɑ] bref très légèrement post. dans chocolat et chocolats; cf. aussi Kamm. 1964, p. 92, Rouss.-Lacl. 1927, p. 138 et Mart. Comment prononce 1913, p. 18 : ,,Le mot chocolat, au moins à Paris [se prononce avec [ɑ] post.]. C'est peut-être à cause de son étymologie espagnole chocolate, mot qui a l'accent sur l'a; mais cet a est destiné à s'ouvrir [= devenir ant.] comme dans les autres mots en -at, et on n'est nullement obligé de le fermer [= de le prononcer post.].`` Buben 1935, § 9 propose une autre explication : ,,Trois mots en -at ont subi l'influence des mots en -ât (dans lesquels on prononce [ɑ] post.) et se prononcent avec les deux timbres ([a] ou [ɑ]) : chocolat, climat, grabat.`` Fér. Crit. t. 1 1787 rappelle : ,,Trév. (en 1704) met chocolate. Richelet les met tous deux chocolat ou chocolate.`` On rencontre encore la var. chocolate ds Ac. 1694 à côté de la forme moderne. Puis de Ac. 1718-1932 uniquement chocolat. Étymol. et Hist. 1598 chocolate « breuvage fait avec des amandes de cacao » (Hist. nat. et mor. des Indes tant or. qu'occ. comp. en cast. par J. de Acosta et trad. en fr. par Rob. Regnault Cauxois, fol. 172b [à propos du Pérou] ds König, p. 66); 1640 chocolate (J. de Laet, L'Hist. du Nouv. Monde ou Descr. des Indes Occ., p. 127 [à propos du Mexique], ibid.) − 1740 (Trév.); 1659 chocolat « substance alimentaire composée essentiellement de cacao et de sucre » (Lettres patentes données à Toulouse, citées ds un texte de 1666 ds Félibien, Hist. de la ville de Paris, 1725, t. 5, p. 204 d'apr. Arv., p. 178). Empr. à l'esp. chocolate « id. », attesté dep. ca 1580 (sous la forme chocollatl, Fr. Hernandez d'apr. Cor. et Fried.; cf. chocolate en 1590, Acosta, Hist. Nat. y Mor. de las Indias, original de la trad. citée supra, ds Fried.), lui-même empr. à un mot nahuatl dont la formation est difficilement analysable, à l'exception du suff. -atl « eau » (v. FEW t. 20, pp. 63-64; Cor.; R. Loewe ds Z. vergl. Sprachforsch., t. 61, pp. 94-95; König, pp. 66-68; Fried.). Fréq. abs. littér. : 701. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 602, b) 635; xxes. : a) 1 017, b) 1 514. DÉR. 1. Chocolaté, ée, adj.Qui contient du chocolat, qui est parfumé au chocolat. Bouillie, farine, poudre chocolatée. − [ʃ
ɔkɔlate]. − 1reattest. 1771 (Trév., t. 2, p. 148b); de chocolat, suff. -é*. − Fréq. abs. littér. : 2. 2. Chocolaterie, subst. fém.a) Rare. Fabrication du chocolat. Une usine de chocolaterie (G. Brunerie, Les Industr. alim.,1949, p. 36).b) P. méton., usuel. Fabrique de chocolat. L'insubordination ouvrière pouvait mettre en péril les affaires de la chocolaterie (Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 42).− [ʃ
ɔkɔlatʀi]. Passy 1914 transcrit [-lɑ-] avec [ɑ] post.; à ce sujet cf. chocolat. − 1reattest. 1867 (Lar. 19e); de chocolat, suff. -erie*. − Fréq. abs. littér. : 8. BBG. − Arv. 1963, p. 178. − Baudez (J.). Le Cirque et son lang. Vie Lang. 1962, p. 246. − Escarpit (R.). Du Nahuatl au fr. Vie Lang. 1953, p. 250. − Goug. Mots. t. 1. 1962, p. 29, 32. − Guiraud (P.). Le Champ morpho-sém. du mot tromper. B. Soc. Ling. 1968, t. 63, no1, p. 101; Mél. d'étymol. arg. Cah. Lexicol. 1970, t. 16, no1, p. 69. − L'Intermédiaire des linguistes curieux. Vie Lang. 1955, p. 37. − Pohl (J.). Contribution à l'hist. de qq. mots. Arch. St. n. Spr. 1969, t. 205, no5, p. 362. − Quem. 2es. t. 3, 1972. − Spitzer (L.). Z. fr. Spr. Lit. 1917, t. 44, p. 220. |