| CHIFFONNIER1, IÈRE, subst. A.− Personne qui fait le commerce de vieux chiffons, de vieux objets, achetés ou ramassés dans les rues. Une chiffonnière avec sa hotte et son crochet (Hugo, Les Misérables,t. 2, 1862, p. 298).L'éreintement des chiffonniers fourbus qui picotent l'ordure ou charrient des sacs (Huysmans, L'Art mod.,1883, p. 121): 1. J'suis marchand de chiffons, tu sais, dit-il, chiffonnier, pour mieux dire, mais tant qu'à moi, je l'suis en gros; j'achète aux petits chiffonniers d'la rue, et j'ai un magasin − un grenier, quoi! − qui m'sert de dépôt. J'fais tout l'chiffon, à dater du linge jusqu'à la boîte de conserves, mais principalement le manche de brosse, le sac et la savate; ...
Barbusse, Le Feu,1916, p. 203. − Loc. Être vêtu comme un chiffonnier. Être mal habillé. Se battre, se disputer comme des chiffonniers. Se quereller de manière violente et bruyante. Ils se sont battus comme des chiffonniers pendant longtemps (Colette, Claudine à l'école,1900, p. 221). Rem. On relève un emploi adj. de chiffonnier avec le sens de « qui a les traits d'un homme vêtu comme un chiffonnier ». Les maisons (...) tendent leurs faces chiffonnières (Frapié, La Maternelle, 1904, p. 9). B.− P. métaph. : 2. ... Paris élève au loin sa voix
Noir chiffonnier qui dans sa hotte
Porte le sombre tas des rois.
Hugo, Les Chansons des rues et des bois,1865, p. 97. − En partic. Homme de lettres de bas étage, qui collectionne et diffuse des faits, des nouvelles hétéroclites, sans intérêt et souvent sans fondement. Les folliculaires, les pamphlétaires, les chiffonniers et les académiciens (Chateaubriand, La Liberté de la presse,1822-28, p. 145): 3. ... quelles que soient les certitudes intuitives qui s'imposent irrésistiblement à l'esprit, quelle sollicitation des faits n'est-elle pas nécessaire pour bâtir avec une apparence de solidité! dans un ouvrage ingénieux et brillant, C. Hentze doit se faire le chiffonnier de l'américanisme, amassant ses preuves comme des bribes recueillies des cultures les plus diverses, et montant en épingle des détails parfois insignifiants.
C. Levi-Strauss, Anthropol. struct.,1958, p. 270. Prononc. et Orth. : [ʃifɔnje], fém. [-njε:ʀ]. Ds Ac. 1694-1932. Fér. Crit. t. 1 1787 propose la graph. chifonier. Étymol. et Hist. 1. 1640 chiffonnier « personne qui ramasse les chiffons » (Oudin, Recherches ital. et françoises, s.v. stracciaruolo); 1680 chiffonnière (Rich.); 2. 1745 chiffonnière « celle qui colporte les nouvelles » (Marivaux, Marianne, 79 ds IGLF); 1752 chiffonnier (Trév.). Dér. de chiffon*; suff. -ier*, -ière*. |