| CHIENLIT, subst. I.− Subst. masc. ou fém. A.− Vx, pop. Celui, celle qui défèque au lit. Rem. Attesté ds DG, Nouv. Lar. ill., Lar. 20e, Rob., Quillet 1965, Lar. Lang. fr. B.− P. ext., vieilli, fam. 1. a) Celui, celle qui laisse passer par derrière un morceau de chemise malpropre. Rem. Attesté ds DG, Nouv. Lar. ill.-Lar. lang. fr. b) Personne ridiculement accoutrée, grotesque : 1. ... Coupeau dansait et gueulait. Un vrai chienlit de la Courtille, avec sa blouse en lambeaux et ses membres qui battaient l'air; ...
Zola, L'Assommoir,1877, p. 782. c) Personnage répugnant : 2. Parcouru avec dégoût les journaux du matin, relatant le triomphe de Rochefort, qui vient de rentrer à Paris, aux acclamations d'une sale multitude. Paul Adam lui-même applaudit à la victoire du vieux chienlit.
Bloy, Journal,1895, p. 169. 3. ... une statue de cette bruyante ganache de Garibaldi s'élevait, évoquant, dans le coin d'un carrefour pacifique, le souvenir d'un chienlit de guerre, ignoble.
Huysmans, L'Oblat,t. 1, 1903, p. 135. 2. Personne masquée de carnaval populaire. Au milieu des clameurs du carnaval et des huées des chienlits (E. et J. de Goncourt, Journal,1888, p. 764): 4. On était dans un bastringue de barrière, à la Boule-Noire, en plein mardi gras; des chienlits chantaient une ronde, ...
Zola, Nana,1880, p. 1111. − P. méton., rare. Chanson chantée par une personne masquée de carnaval populaire. Psalmodier tous les rhythmes depuis le De Profundis jusqu'à la Chienlit (Hugo, Les Misérables,t. 1, 1862, p. 688). II.− Subst. fém. A.− Mascarade désordonnée et gueuse : 5. On en est à la chienlit, monsieur... On en est à la mascarade, au corso carnavalesque. On se déguise en pierrot, en arlequin, colombine ou en grotesque pour échapper à la mort. On se masque...
Giono, Le Hussard sur le toit,1951, p. 270. − Au fig. À la chienlit. Cri de dérision (adressé à des personnes masquées courant dans les rues aux jours gras) : 6. − Allons, gamins, respect à un grand homme! fit Lemulquinier.
− À la chienlit! crièrent les enfants. Vous êtes des sorciers.
Balzac, La Recherche de l'absolu,1834, p. 325. B.− P. ext., fam. Action, manifestation désordonnée, tumultueuse et répugnante : 7. Cette tourbe de dégénérés, de poissardes et de putains, arriva vers le soir à Versailles (...) Extraordinaire chienlit, avec des corps travestis et débraillés, de soûlardes juchées sur des canons ou à cheval...
L. Daudet, Les Lys sanglants,1938, p. 91. − P. méton. 1. Excès, débauche grossière : 8. [Le repas] c'est le seul moment où l'homme soit heureux de vivre. Dieu ne peut s'en froisser, malgré la chienlit du vin − crapula vini − et la turpitude de certains mets nationaux ou plats locaux...
Cendrars, Bourlinguer,1948, p. 196. 2. Profusion désordonnée. Une chienlit d'énormes panneaux réclames installés en diorama de chaque côté [de l'autostrade] (Giono, Voyage en Italie,1953, p. 28). Rem. La réforme, oui; la chienlit, non. Mot du général de Gaulle au moment des troubles de mai 1968 et qui a popularisé le mot (cf. Gilb. 1971). Prononc. et Orth. : [ʃjɑ
̃li]. Cf. chiendent. Ac. 1835-1878 : chie-en-lit. Cf. aussi Besch. 1845, Guérin 1892 et Littré qui rappelle l'orth. de Voltaire chiant-lit qu'il juge fautive bien qu'elle reproduise la prononc. correcte. La graph. chie-en-lit est mentionnée à titre hist. ds Rob. et ds Lar. encyclop., ds Dub. et ds Lar. Lang. fr. qui souligne cependant : ,,Certains auteurs restituent l'orthographe étymologique``. DG, Nouv. Lar. ill., Lar. 20eet Quillet 1965 admettent parallèlement chie-en-lit et chienlit. Ac. 1932 donne uniquement chienlit. Étymol. et Hist. 1. 1534 chienlict « celui, celle, qui chie au lit » (Rabelais, Gargantua, éd. Marty-Laveaux, ch. 25, p. 98), qualifié de ,,vx et pop.`` par Lar. Lang. fr.; 1866 pop. (Lar. 19e: Chie-en-lit. Bout de chemise malpropre qui sort par la fente postérieure de la culotte d'un enfant); 2. a) 1740 « masque de carnaval » (Ac., s.v. chier); d'où 1830, 11 nov. à la chianlit (Balzac,
Œuvres diverses, La Reconnaissance du gamin [La Caricature], éd. M. Bouteron et H. Longnon, t. 2, p. 195); b) 1862 « air de carnaval » d'où « le carnaval lui-même » (synon. de désordre et de débauche) (Hugo, loc. cit.). Composé de la forme verbale chie (chier*), de en* et de lit*. Fréq. abs. littér. : 41. |