| CHARNELLEMENT, adv. D'une manière charnelle, propre à la chair (notamment dans ses incidences avec l'ordre spirituel et/ou moral). A.− Selon la chair, en tant que manifestation de l'être général. 1. Au moyen du corps. Être convaincu physiquement, charnellement, que les balles tuent (Montherlant, Le Songe,1922, p. 150).Ceux qui se sentent liés charnellement à cette matière, à cette argile dont leur corps est pétri (Mauriac, Journal 3,1940, p. 213). PARAD. (Quasi-)synon. corporellement, somatiquement; (quasi-) anton. intellectuellement, moralement. − Spéc. Par voie de génération charnelle : 1. L'incarnation, vue de ce côté, l'insertion, cette insertion cardinale, apparaît ainsi (...) comme l'aboutissement d'une histoire arrivée à la chair, et à la terre. Dans cette vue la race elle-même, la race d'Israël culmine, comme un arbre de vie, s'achève, culmine à produire elle-même charnellement Dieu : et ce songe était tel, que Booz vit un chêne qui, sorti de son ventre, allait jusqu'au ciel bleu; ...
Péguy, Victor-Marie, comte Hugo,1910, p. 734. 2. P. ext. De façon humaine, terrestre, matérielle. Les paroles charnelles, les paroles éternelles, temporellement, charnellement prononcées (Péguy, Le Porche du mystère de la 2evertu,1911, p. 227): 2. ... la matière se divise, relativement à notre effort, en deux zones : l'une dépassée ou atteinte, (...); c'est la zone de la matière prise matériellement et charnellement, l'autre, présentée à nos efforts nouveaux de progrès, de recherche, de conquête, de « divinisation » : c'est la zone de la matière prise spirituellement.
Teilhard de Chardin, Le Milieu divin,1955, p. 125. B.− Selon la chair en tant qu'objet de valorisation morale, religieuse. 1. Au moyen des sens, de la sexualité : 3. Elle aimait Daniel comme elle pouvait l'aimer, très tendrement, très charnellement. Elle l'entraînait sur cette pente. Lui, se laissait enivrer du charme de cette chair retrouvée, reconquise. Il eut les emportements ardents, les frénésies d'un renouveau de passion.
Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 472. 2. P. anal. Aime[r] les livres charnellement, (...) les caresse[r] (Courier, Lettres de France et d'Italie,1809, p. 801). Prononc. et Orth. : [ʃaʀnεlmɑ
̃]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1130-40 « physiquement, corporellement » (Wace, Conception ND, 122 ds Keller, p. 43b); ca 1170 « avec les sens, sexuellement » ([Chr. de Troyes], Guillaume d'Angleterre, éd. W. Foerster, 1899). Dér. de charnel* pour traduire le lat. chrét. de même sens carnaliter (cf. Blaise); suff. -(e)ment2*. Fréq. abs. littér. : 32. |