| CHALOUPE, subst. fém. A.− NAV. Embarcation utilisée dans les ports et les rades ou destinée au service des navires. Pour aller au rocher de Cancale nous montâmes en chaloupe (Flaubert, Par les champs et par les grèves,1848, p. 385).On croit que le bateau coule et déjà on fait monter les femmes dans les chaloupes (Green, Journal,1940, p. 46): 1. ... nous entrâmes dans la baie de Chesapeake. Le soir même, on envoya une chaloupe chercher des vivres frais.
Chateaubriand, Mémoires d'Outre-Tombe,t. 1, 1848, p. 274. SYNT. Chaloupe à moteur, à rames, à vapeur, à voiles; chaloupe de débarquement; mettre la chaloupe en mer, à la mer; descendre la chaloupe. ♦ Chaloupe armée. Chaloupe occupée par des matelots et des soldats pour une expédition. Nos deux chaloupes armées (...) partirent (...) pour une baie éloignée d'environ une lieue (Voyage de La Pérouse,t. 3, 1797, p. 187). ♦ Chaloupe canonnière. Chaloupe à fond plat munie d'un ou plusieurs canons. Une chaloupe canonnière, venue de Nantes, ouvrait déjà le feu sur leurs radeaux (Erckmann-Chatrian, Histoire d'un paysan,t. 2, 1870, p. 262). Rem. On rencontre ds la docum. le subst. fém. chaloupée. Contenu d'une chaloupe. Quelques chaloupées d'eau (Voyage de La Pérouse, t. 3, 1797, p. 193). Fréq. abs. littér. : 6. B.− Arg. [P. anal. de mouvement] Chaloupe (orageuse). Sorte de cancan où les danseurs se balancent fortement : 2. Puis elle veut qu'on danse et la voilà, toujours répétant son costume de bacchante, essayant le balancement de la chaloupe orageuse.
E. et J. de Goncourt, Journal,1860, p. 719. Prononc. et Orth. : [ʃalup]. Ds Ac. 1694 et 1718 s.v. chalouppe; ds Ac. 1740-1932 sous la forme mod. avec 1 p. Étymol. et Hist. 1. 1522 chaloppe « sorte de bateau plat » (Texte de Bretagne d'apr. Bl.-W.1-5); xvies. chaloupe (Chron. bordeloise, I, 258, Delpit, d'apr. Delboulle ds R. Hist. litt. Fr., t. 6, p. 301); 2. 1845 chaloupe « danse échevelée » (E. Bourget ds Larch. 1872). Orig. discutée. 2 hyp. : a) emploi fig. du dial. chalope, m. fr. chaloppe « coquille de noix, pellicule du noyau » (1578, Bl.-W.1-5; 1611, Cotgr.; cf. chalouppe de mer « coquillage », Encyclop. t. 11, p. 678b), issu par aphérèse de l'a. fr. eschalope « coquille (de noix) » (1224, G. de Coincy, éd. F. Koenig, I, Mir., 44, 563 : escalophe), lui-même dér. de eschale (écale*) avec finale de enveloppe (Sainéan ds Z. rom. Philol., t. 30, p. 561; FEW t. 17, p. 86a; Bl.-W.5; Dauzat 1973); b) empr. au néerl. sloep « embarcation, chaloupe » (Baist ds Z. rom. Philol., t. 32, 1908, pp. 36-37, note 1; EWFS2; Valkh., p. 88). À l'encontre de la 2ehyp. : − le caractère tardif du néerl. (1598 ds Kluge20, s.v. Schaluppe); − l'orig. fr. de la plupart des formes germ. (all. Chaloupe 1648, Kluge20; angl. shallop 1578, NED). Les rapports de chaloupe avec le type a. gasc. calup, galup (dep. le xiiies. ds FEW, loc. cit., p. 83b) sont obscurs : au cas où les 2 types seraient apparentés, la 2ehyp. serait à écarter. Pour des raisons phonét., il semble difficile d'admettre avec FEW et Bl.-W.5un empr. du néerl. sloep au fr.; le néerl. serait à rattacher au verbe sluipen « se glisser, se couler » (De Vries Nederl. et De Vries 1970). Fréq. abs. littér. : 345. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 1 031, b) 611; xxes. : a) 176, b) 153. DÉR. Chaloupier, subst. masc.,mar. Matelot qui appartient à l'équipage d'une chaloupe. Ce fut Abel Tasman qui, par ses cinq matelots tués et dévorés, commença ces sanglantes annales du cannibalisme. Après lui, le capitaine Tukney et tout son équipage de chaloupiers subirent le même sort (Verne, Les Enfants du capitaine Grant,t. 3, 1868, p. 27).− Seules transcr. ds Land. 1834 et Littré : cha-lou-pié. − 1resattest. a) 1828-29 « ancien forçat chargé de faire la toilette des nouveaux venus au bagne » (L.-F. Raban et Marco Saint-Hilaire, Mémoires d'un forçat, t. 4, p. 19), b) 1838 « matelot de chaloupe » (Ac. Compl. 1842); de chaloupe, suff. -ier*; a s'explique, selon Esn. 1966, par le fait que ces forçats étaient choisis parmi les hommes affectés aux chaloupes. − Fréq. abs. littér. : 4. BBG. − Kemna 1901, pp. 216-217. − La Landelle (G. de). Le Lang. des marins. Paris, 1859, p. 401. − Lammens 1890, pp. 84-85. − Spitzer (L.). Literaturblatt für germanische und romanische Philologie. 1921, t. 42, p. 308. − Sain. Sources t. 1, 1972 [1925], p. 145, 172, 179; t. 2, 1972 [1925], p. 103, 153, 165, 167; t. 3, 1972 [1930], p. 106; pp. 317-350. − Schuchardt (H.). Romanische Etymologien. 2. Sitzungsberichte der philosophisch − historischen Klasse der kaiserlichen Akademie der Wissenschaften. 1899, t. 141, no3, p. 167. |