| CEINTURE, subst. fém. I.− Ce qui entoure le corps de l'homme. A.− Objet placé autour de la taille. 1. Bande de matière souple ou flexible (cuir, étoffe, matière plastique, métal, etc.) nouée, agrafée ou bouclée autour du corps au-dessus des hanches et qui sert à tenir ou à orner un vêtement, à maintenir à portée de main divers objets (armes, bourse, etc.). Ceinture de crin. Cilice : 1. Nous avions, treize, quatorze ans, l'âge du chignon prématuré, de la ceinture de cuir bouclée au dernier cran, du soulier qui blesse, ...
Colette, La Maison de Claudine,1922, p. 173. 2. Ayant trouvé à bien vendre une terre, il la vendit, et vendit ensuite tout son bien pour le changer en louis qu'il porta sur lui dans une ceinture.
Pourrat, Gaspard des Montagnes,Le Pavillon des amourettes, 1930, p. 175. 3. La ceinture du nouveau curé, maladroitement serrée à la taille, s'enroulait à la hanche comme une corde.
Bernanos, Un Crime,1935, p. 738. ♦ Fig. et pop. Se mettre, se serrer la ceinture. Ne pas manger à sa faim, être privé du nécessaire. Elliptiquement. Ceinture! Rien. − Loc. S'en mettre plein la ceinture. Manger jusqu'à l'excès. Ceinture de ste Marguerite. Ceinture qui avait la vertu de faciliter les accouchements. Ceinture de Vénus. Ceinture merveilleuse propre à charmer et à retenir les cœurs. Ceinture de vierge ou virginale. Ceinture que portaient les jeunes filles grecques et romaines et qui préservait leur virginité jusqu'au jour de leurs noces : 4. Une jeune fille en se mariant dédiait à Vénus sa ceinture virginale... (...) On peut aussi d'après cet usage composer des expressions métaphoriques comme... Il est le seul qui déliera ma ceinture...
Chénier, Bucoliques,Le Mariage, 1794, p. 282. ♦ Détacher sa ceinture (notamment dans le mariage). Se donner à un homme. − SP. Ceinture de judo. Bande d'étoffe dont se ceignent les judokas et qui indique par sa couleur leur grade; p. ext., celui qui la porte. Une ceinture noire, être ceinture orange. − Spéc., vieilli. Longue bourse que l'on attachait autour des reins. Avoir de l'or dans sa ceinture. ♦ Proverbe. [En parlant de femmes] Bonne renommée vaut mieux que ceinture dorée. Une bonne réputation et être pauvre vaut mieux que d'être riche et mal famée : 5. ... les ceintures dorées devinrent l'apanage exclusif des courtisanes. Les femmes honnêtes de ce tems-là s'en consolèrent, en créant le proverbe : Bonne renommée vaut mieux que ceinture dorée.
Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 4, 1813, p. 258. 2. Bandage, corset, équipement de protection, de maintien, de sécurité. − Ceinture de natation, de sauvetage. Ceinture faite de matière légère permettant à la personne qui la porte de se maintenir à la surface de l'eau. − Ceinture de sécurité. Équipement spécial d'attache du conducteur, des passagers d'une automobile, d'un avion, à leur siège pour atténuer les effets de choc en cas d'accident. Ceinture de grossesse. Sorte de corset que portent les femmes enceintes. Ceinture de chasteté. Bandage muni d'un cadenas destiné jadis à préserver la chasteté des femmes : 6. Vous connaissez la ceinture de chasteté qui est au musée de Cluny et peut-être n'êtes-vous pas sans savoir que la fabrication de ces ceintures continue. Mais ce que vous ne savez pas, c'est qu'il s'en fabrique pour hommes.
E. et J. de Goncourt, Journal,1881, p. 113. − MÉD. Ceinture orthopédique. Sorte de gaine servant à corriger certaines attitudes vicieuses ou à maintenir en place certains organes. Ceinture herniaire. 3. Partie du vêtement qui entoure la taille. Ceinture du pantalon, d'une jupe. B.− P. méton. Partie du corps où se place la ceinture. Nu jusqu'à la ceinture. La vase lui venait maintenant aux jarrets et l'eau à la ceinture (Hugo, Les Misérables, t. 2, 1862, p. 552). ♦ Il ne vous arrive pas à la ceinture. Il est beaucoup plus petit que vous; il a moins de mérite que vous. − SP. Prise de corps à la hauteur de la ceinture : 7. Jourlin gagna aux points grâce à son forcing et à une très belle ceinture à rebours.
L'Œuvre,9 avr. 1941. − Spéc., ANAT. Ensemble des pièces osseuses qui rattachent les membres au tronc. Ceinture scapulaire, pelvienne. Le bassin osseux ou ceinture pelvienne est formé par l'union du sacrum et des os iliaques (G. Gérard, Manuel d'anat. hum.,1912, p. 168). II.− Ce qui entoure un objet ou un lieu. A.− Ce qui entoure un objet d'une bande continue. 1. ARCHIT. ,,Petite moulure de profil carré située au haut et au bas du fût d'une colonne auquel elle se joint par un congé`` (Noël 1968). 2. ARM. Ceinture des projectiles. Anneau en cuivre rouge ou en matière plastique, serti un peu au-dessus du culot du projectile et destiné à se mouler dans les rayures du canon pour imprimer le mouvement du projectile. La machine à ceinturer est destinée à placer les ceintures sur les projectiles (P. Gorgeu, Machines-outils,1928, p. 303). 3. MAR. Ceinture de coque. Grosse défense en bois à la hauteur de la flottaison qui protège la coque de certains navires contre les heurts. Ceinture magnétique. Dispositif électrique placé à l'intérieur des navires, le long de la coque. B.− P. ext. Ce qui entoure un lieu, ce qui forme enceinte : 8. La puissante ville avait fait craquer successivement ses quatre ceintures de murs, comme un enfant qui grandit et qui crève ses vêtements de l'an passé.
Hugo, Notre-Dame de Paris,1832, p. 137. 9. L'objet essentiel étant de protéger la France contre les invasions, de lui donner une ceinture solide, il était aussi rationnel d'avoir Mons, Namur et Maëstricht que les places de l'Escaut et de la Sambre, ...
Bainville, Histoire de France,t. 1, 1924, p. 238. − Au fig. Système de protection : 10. ... les douanes intérieures formaient, d'ailleurs, autour de chaque compartiment social une ceinture qui le protégeait contre les infiltrations d'éléments étrangers.
Durkheim, De la Division du travail soc.,1893, p. 277. 1. ASTRON. Ceintures de radiations. Double anneau de radiations cosmiques captées par le champ magnétique terrestre. La ceinture intérieure ou ceinture de Van Allen et la ceinture extérieure. 2. CH. DE FER. Chemin de fer de ceinture. Nom de deux lignes de chemin de fer qui contournaient Paris. La grande et la petite ceinture : 11. ...
Qu'il est petit, dans la nature,
Le chemin d'fer Paris-Ceinture!
Laforgue, Les Complaintes,Complainte sur certains temps, 1885, p. 160. − Arg. La grande ceinture (p. allus. au précédent). Le Tour de France cycliste. 3. URBAN. Ceinture verte. ,,Surface couverte de végétation, créée ou conservée autour d'agglomérations ou d'installations, généralement pour combattre certaines nuisances et améliorer la qualité de l'environnement`` (Envir. 1972) : 12. J'ignore encore que la prodigalité de l'espace est le premier des luxes bourgeois et que le prix du mètre carré de terre craonnaise autorise des ceintures vertes, que ne peut s'offrir la « ceinture rouge ».
H. Bazin, Vipère au poing,1948, p. 205. Prononc. et Orth. : [sε
̃ty:ʀ]. Demi-longueur à la voyelle de 1resyll. ds Passy 1914. Ds Ac. 1694-1932. Fér. Crit. t. 1 1787 écrit ceintûre. Étymol. et Hist. 1. Début xiies. ceingture « bande de tissu maintenant un vêtement à la taille » (Psautier Oxford, éd. Fr. Michel, 108, 18); ca 1175 ceinture (Chr. de Troyes, Chevalier Lion, éd. W. Foerster, 1891); 1750 ceinture de chasteté (ds Sexol. 1970); 1906 ceinture de judo (Lar. pour tous); 2. a) 1160-74 « région du corps où l'on porte la ceinture » (Wace, Rou, éd. H. Andresen, II, 1316); av. 1660 ne pas aller à la ceinture de qqn « ne pas avoir les capacités de qqn » (Scar. ds Rich. 1710); p. anal. 1845 anat. ceinture blanche de la choroïde (Besch.); b) 1611 « partie du vêtement qui entoure la taille » (Cotgr.); 3. p. anal. ca 1415 çainture « pourtour » (A. Chartier, Le Livre des quatre dames ds Bartsch, Chrestomathie de l'a. fr., 90, b, 77, p. 286); 1620 mar. (D'Aub., Hist., III, 19 ds Littré : On faisoit une ceinture de pippes enduites de poix, et on faisoit ceindre en basse mer le navire [à relever] par le cable qui les enfiloit); 1676 archit. (d'une colonne) (Félibien Dict.); 1676 (d'une ville) (ibid. : Ceinture d'une muraille). Du lat. class. cinctūra « bande de tissu enserrant la taille ». Fréq. abs. littér. : 2 044. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 2 895, b) 4 207; xxes. : a) 2 473, b) 2 484. DÉR. 1. Ceinturette, subst. fém.Petite ceinture. Et voici le défilé des articles, dans le désordre où les crie le vendeur : ceinturettes, gants pour demoiselles, gants fourrés, sangles à boucle, chaînettes de fer (Faral, La Vie quotidienne au temps de St Louis,1942, p. 198).En partic. Lanière de cuir entourant un cor de chasse. − [sε
̃tyʀ
εt]. − 1resattest. 1erquart du xiiies. ceinturete (Chr. de Troyes, Chevalier Lion [ms. B.N. 794], éd. W. Foerster, 1891) − 1636, Monet, Invantaire des deus lang. fr. et lat., Lyon; repris en 1832 (Raymond); 1732 spéc. « lanière entourant un cor de chasse » (Trév.); de ceinture, suff. -ette*. − Fréq. abs. littér. : 1. 2. Ceinturier, ière, subst.Celui, celle qui fabrique des ceintures, des ceinturons, des baudriers. Synon. plus usuel ceinturonnier.Le mot sert surtout à désigner le ceinturonnier médiéval.Il n'y a plus une dame de la ville qui n'ait donné sa clientèle à la parfaite brodeuse et ceinturière (Faral, La Vie quotidienne au temps de St Louis,1942p. 141).En partic. Ceinturier orthopédiste. ,,Ouvrier procédant au façonnage sur mesures de toutes ceintures à caractère orthopédique`` (Mét. 1955). − [sε
̃tyʀje]. Ds Ac. 1694-1878. − 1resattest. ca 1200-02 çainturiere (Escoufle, 5919 ds T.-L.); 1417-35 ceinturier (Clément de Fauquembergue, Journal, Paris, éd. A. Tuetey, t. 2, p. 361); de ceinture, suff. -ier*, -ière*. − Fréq. abs. littér. : 1. BBG. − Gottsch. Redens. 1930, p. 205. − Lajaunie (M.A.). Préjugés et lang. Vie Lang. 1969, p. 76. − Pamart (P.). La Parole est d'argent, mais le silence est d'or. Vie Lang. 1971, p. 141. − Rigaud (A.). L'Odonymie galante de Paris. Ceinture dorée ou bonne renommée? Vie Lang. 1971, pp. 154-155. − Sain. Lang. par. 1920, p. 270. − Tournemille (J.). Au Jardin des loc. fr. Vie Lang. 1967, p. 683. |