| CARTÉSIEN, IENNE, adj. et subst. I.− PHILOSOPHIE A.− [P. réf. directe à la pensée de Descartes] 1. [En parlant d'une doctrine, d'un courant de pensée] Qui a pour auteur ou origine Descartes, qui est formulé par lui. La métaphysique cartésienne; l'esprit, le mouvement, la révolution, la tradition cartésien(ne). L'idée de force, bannie de l'école cartésienne, remise en honneur dans la philosophie de Leibnitz (Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances,1851, p. 198).La philosophie cartésienne ayant éliminé de la science les opinions traditionnelles, la raison construit ce qu'elle veut (H. Metzger, La Genèse de la sc. des cristaux,1918, p. 145).Tout le système cartésien est suspendu à l'idée d'un dieu tout-puissant (Gilson, L'Esprit de la philos. médiév.,t. 1, 1931, p. 14). − Spéc. [En parlant des caractères et des thèmes de la philosophie de Descartes] a) Le dualisme, l'idéalisme, le rationalisme cartésien; la morale, la physique cartésienne. Recourir à l'hypothèse du mécanisme cartésien pour expliquer les actes de la fourmi et de l'abeille (Cournot, Essai sur les fondements de nos connaissances,1851p. 521). b) Le cogito, le doute cartésien; l'évidence, la méthode cartésienne; les Méditations cartésiennes. Il y a un lien étroit entre le doute et les preuves cartésiennes de l'existence de Dieu (J. Lacroix, Marxisme, existentialisme, personnalisme,1949, p. 90). 2. [En parlant d'un aut. philos. ou littér.] Qui partage les idées de Descartes : 1. Tout cartésien qu'il soit, Malebranche est trop chrétien pour ne pas savoir que l'âme est d'une beauté si parfaite que sa perfection même nous en rend l'essence inaccessible.
Gilson, L'Esprit de la philos. médiév.,t. 2, 1932, p. 19. − Emploi subst. Les cartésiens. Les disciples de Descartes et, p. ext. les héritiers de sa philosophie. Notre activité libre, notre volonté (que Malebranche et les cartésiens confondent si mal avec nos désirs ou nos souhaits) (Maine de Biran, Journal,1822, p. 349). − [En parlant d'une époque de l'hist. littér. ou philos.] Qui a subi l'influence de Descartes. Tout le dix-huitième siècle est cartésien dans les moelles (Massis, Jugements,1923, p. 282). B.− P. ext. 1. [En parlant d'une pers., de sa manière de penser ou de raisonner] Qui présente les caractères rationnels, rigoureux et méthodiques propres à la démarche intellectuelle et spirituelle de Descartes. Un esprit, un raisonnement cartésien : 2. Elle [la voie poursuivie par la médecine française] est claire, logique, elle satisfait notre besoin spirituel d'ordre, de méthode, elle est adaptée à notre esprit cartésien.
Ce que la France a apporté à la méd. dep. le début du XXes.,1946, p. 200. − Péj. Un esprit cartésien. Un esprit sec, trop systématique, par opposition à un esprit intuitif : 3. Lorsque l'on s'entend accuser d'esprit cartésien, cela signifie qu'un esprit plus vague et plus inspiré pourrait obtenir davantage de résultats ou approcher plus près du réel.
A. David, La Cybernétique et l'humain,1965, p. 53. 2. [En parlant d'une manière de vivre] Qui présente les caractères de bon sens, de sérieux propre à la démarche morale de Descartes. La probité, la rigueur, la sagesse cartésiennes. Comment désespérer d'un pays qui possède tant d'or, de propriétaires, de sagesse cartésienne, de vertus casanières (Nizan, Les Chiens de garde,1932, p. 206).Nos maîtres étaient, pour la plupart, des esprits cartésiens. fort peu portés sur la mystique (Mauriac, Le Bâillon dénoué,1945, p. 497). II.− MATHÉMATIQUES A.− Coordonnées cartésiennes, repère cartésien. Système d'axes permettant le repérage d'un point dans un plan (dans l'espace) par un couple de deux nombres (trois nombres) appelés coordonnées cartésiennes (représentation due à Descartes). B.− [Dans la théorie des ensembles] Produit cartésien de deux ensembles. Ensemble des couples ordonnés d'éléments pris respectivement dans chacun des ensembles. Rem. On rencontre ds la docum. le verbe trans. cartésianiser. Rendre cartésien. M. Nicole est tout bonnement en train de s'annexer M. Pascal et de cartésianiser, si l'on peut dire, l'Apologétique des Pensées (Bremond, Hist. littér. du sentiment relig. en France, t. 4, 1920, p. 583). Prononc. et Orth. : [kaʀtezjε
̃], fém. [-zjεn]. Ds Ac. 1762-1932. Ds Ac. 1762-1798 subst. masc. seulement. Étymol. et Hist. 1665 (André de Graindorge [médecin de Caen], Lettres à Huet ds Fr. mod., t. 14, p. 290, sans ex.); 1. 1680 subst. (Rich. : Cartésiens [sic] Philosophe qui est dans les sentimens de Décartes [sic]); 2. 1732 adj. « relatif à la philosophie de Descartes ou de ses disciples » : doctrine cartésienne (Trév.); 3. p. ext. 1932 esprit cartésien (G. de La Tourette, Léonard de Vinci, p. 146). Dér. du rad. du lat. Cartesius, nom lat. de Descartes [1596-1650] philosophe et mathématicien français; suff. -ien*. Fréq. abs. littér. : 227. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 64, b) 206; xxes. : a) 148, b) 710. Bbg. Teppe (J.). Du Provignement des n. d'écrivains fr. Vie Lang. 1962, p. 205. |