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CARTON, subst. masc.
A.− Matière de même nature que le papier se présentant généralement en feuilles épaisses et rigides.
SYNT. Boîte, morceau de carton; décor, étui de carton; fabrique de carton; emballage, moulage en carton; dur, raide, rigide comme du carton.
En partic. Carton d'amiante. Carton dont la texture comprend des fibres d'amiante (cf. Lar. mén. 1926, p. 470). Carton bitumé. Carton rendu imperméable par addition de goudron, utilisé comme couverture ou comme isolant dans les constructions légères (cf. Van der Meersch, Invasion 14, 1935, p. 362). Carton de collage. Carton fait d'une superposition de feuilles de papier collées ensemble (cf. L'Hist. et ses méthodes, 1961, p. 1080). Carton gaufré. Carton imprimé de motifs en relief (cf. Billy, Introïbo, 1939, p. 239).Carton mâché synon. de papier mâché(cf. G. Duhamel, Chronique des Pasquier, Suzanne et les jeunes hommes, 1949, p. 237).Carton ondulé. Carton d'emballage présentant des cannelures, généralement contrecollé de deux feuilles de carton léger (cf. G. Brunerie, Les Industr. alim., 1949, p. 68).
P. anal. Matière semblable au carton dont certaines espèces de guêpes font leur nid (cf. Michelet, L'Insecte, 1857, p. 296).
Loc., au fig. De carton.
1. [En parlant d'une chose] Faux, feint, sans valeur. L'émotion, la rancune du public rendaient réels ces crimes de carton (S. de Beauvoir, Les Mandarins,1954, p. 363):
1. ... je n'aurais jamais voulu faire comme tant de gens qui collent une particule à leur nom, ou s'inventent un marquisat de carton! Mais posséder un vrai titre, un titre authentique, ... Verne, Les 500 millions de la Bégum,1879, p. 26.
2. [En parlant d'une pers.] Sans consistance, qui n'a qu'un rôle de parade. Ce roi ne comprenait rien à ses devoirs et, comme on le dit alors, il n'était qu'un roi de carton (Sorel, Réflexions sur la violence,1908, p. 228).
B.− P. méton.
1. Plaque, feuille de cette matière :
2. Elle épousseta ces linges roussis par l'usage, promena vigoureusement le plumeau le long du gradin, contre lequel elle releva les cartons liturgiques. Zola, La Faute de l'Abbé Mouret,1875, p. 1215.
Rem. On rencontre ds la docum. le composé carton-affiche, subst. masc. Annonce publicitaire sur carton ou papier fort (cf. G. Roy, Bonheur d'occasion, 1945, p. 38).
a) Petit rectangle de carton, de papier fort; carte. Les cartons du loto :
3. Quarante-sept, cria le vieil abbé. Marquez donc, Madame Des Grassins, n'est-ce pas votre numéro? Monsieur Des Grassins mit un jeton sur le carton de sa femme, ... Balzac, Eugénie Grandet,1834, p. 50.
En partic.
Familier
Carte de visite; carte d'invitation :
4. Il songeait à ces gens qui vous annoncent sur leurs cartons, pour vous encourager, ce qu'on pourra manger chez eux : « Thé. Porto. » Montherlant, Pitié pour les femmes,1936, p. 1169.
Ticket, billet. Des placeurs de cartons verts de loterie (E. et J. de Goncourt, Journal,1865, p. 171).
Arg. et pop. Carte à jouer. Battre, manier, taper, tripoter le carton. D'Axel ne retrouvait un peu de vie qu'en tripotant « le carton » (A. Daudet, Les Rois en exil,1879, p. 175).
b) Cible de carton pour le tir à l'arc, à la carabine ou au pistolet. Ses domestiques criblaient cinquante cartons par jour (Murger, Scènes de la vie de bohême,1851, p. 197).
Loc. Faire un carton. Tirer sur une cible avec une arme. Il fait un carton dans un tir de boulevard (Aragon, Le Roman inachevé,1956, p. 162).
P. ext. Faire un carton sur qqn. Tirer sur quelqu'un avec une arme à feu. Les Chleuhs ont essayé de faire un carton sur nous (P. Vialar, La Mort est un commencement,Le Bal des sauvages, 1946, p. 221).
SP. Faire un carton. Remporter une victoire très nette. Subir, prendre un carton. Être très sévèrement battu.
c) B.-A. Dessin sur carton ou sur papier fort servant de modèle pour la réalisation d'une peinture murale, d'une tapisserie ou d'un vitrail. Des cartons de tapisserie consacrés aux jeux élégants ou populaires (Huyghe, Dialogue avec le visible,1955, p. 319).
d) Emplois techn. spéc.
ARCHIT. Feuille de carton ou de fer-blanc chantournée servant à tracer des profils.
CARTOGR. Carte géographique complémentaire d'une carte principale, figurant sur la même feuille et souvent établie à une échelle plus lisible.
Rem. Attesté ds Lar. 20e, Lar. Lang. fr. et Rob.
IMPR. Feuillet imprimé après coup destiné à remplacer, dans un volume, un passage à modifier ou à corriger :
5. ... les censeurs [de Restif] arrêtaient souvent des ouvrages tout imprimés, ou les grevaient de frais énormes en faisant substituer des cartons aux passages dangereux. Nerval, Les Illuminés,1852, p. 255.
TISS. Rectangle de carton perforé s'appliquant sur le cylindre d'un métier à tisser mécanique et permettant la manœuvre automatique des fils de chaîne suivant le tissu à réaliser. Un enroulement spécial des cartons sur le jacquard (Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 478).
2. Boîte, emballage en carton pour le transport ou le rangement de divers objets.
a) Vieilli. Cartable d'écolier :
6. Tout reprit son calme. Les têtes se courbèrent sur les cartons, et le nouveau resta pendant deux heures dans une tenue exemplaire, ... Flaubert, Madame Bovary,t. 1, 1857, p. 4.
b) Boîte portative en carton servant d'emballage à divers objets, en particulier à des pièces d'habillement. Carton à chapeaux, à chaussures; carton de couturier, de modiste.
En partic. Carton de voyage. Bagage léger en carton (cf. Loti, Pêcheur d'Islande, 1886, p. 113).
c) Boîte, casier placé dans un meuble, servant au rangement et au classement de papiers, de dossiers, de documents :
7. ... un docteur, qui ne peut ranger dans les cartons de son herbier, suivant son système, une foule de végétaux d'une variété infinie, s'imagine que la nature n'a point de plan à elle, ... Bernardin de Saint-Pierre, Harmonies de la nature,1814, p. 132.
Loc. fig. Dormir, rester dans les cartons; être enterré dans les cartons. Être en suspens, en souffrance; être sans suite, sans résultat. Une loi qui dormait dans les cartons (...) est mise tout d'un coup à l'ordre du jour et votée par les deux chambres (Barrès, Mes cahiers, t. 7, 1908-09, p. 104).
d) Grand portefeuille de carton permettant de ranger des dessins, des gravures, des plans, etc. Carton à dessin :
8. ... on est sûr de le trouver, un carton sous le bras, allant ou revenant de faire l'emplette de quelque crocade du Carache ou de Paul Véronèse, ... Jouy, L'Hermite de la Chaussée d'Antin,t. 4, 1813, p. 233.
Prononc. et Orth. : [kaʀtɔ ̃]. Ds Ac. 1718-1932. Étymol. et Hist. 1. Ca 1500 (Inv. de François Ierde Luxembourg, p. 6 ds Barb. Misc. 13, no4); av. 1755 au fig. (roi) de carton « de parade, sans action effective » (Saint-Simon, 403, 263 ds Littré); 2. 1680 peint. « dessin exécuté sur du carton servant de modèle pour une fresque, une tapisserie » (Rich.); 3. 1752 « boîte légère faite en carton » (Trév. Suppl.); 4. 1800 « portefeuille à dessins » (Boiste). Empr. à l'ital. cartone (dér. avec suff. augm. -one de carta « papier », v. carte) attesté au xvies. ds Batt. au sens gén. (Arioste) et comme terme de peint. (Aretino), au sens fig. (di cartone) au xviies. (Segneri). Fréq. abs. littér. : 1 168. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 996, b) 2 492; xxes. : a) 2 120, b) 1 506.
DÉR.
Cartonneux, euse, adj.Qui rappelle le carton, qui a l'apparence, la consistance du carton. Un épais vêtement de laine cartonneuse (Maeterlinck, Bulles bleues, souvenirs heureux,1948, p. 85). [kaʀtɔnø], fém. [-ø:z]. 1reattest. 1876 (E. Bergerat, Journ. offic., 25 juin, p. 4527, 3ecol. ds Littré Suppl.); de carton, suff. -eux*. Fréq. abs. littér. : 2.
BBG. − Baudez (J.). La Fête foraine et son lang. Vie Lang. 1968, p. 565. − Duch. 1967, § 42.5. − Gohin 1903, p. 367. − Goug. Lang. pop. 1929, p. 3, 17. − Grimaud (F.). Pt gloss. du jeu de boules. Vie Lang. 1968, p. 637; 1969, p. 112. − Hope 1971, p. 177. − Kohlm. 1901, p. 37. − Quem. 2es. t. 2 1971, p. 14. − Sain. Lang. par. 1920, p. 194. − Sar. 1920, p. 17. − Wind 1928, p. 46, 144, 200.