| CARILLONNER, verbe. I.− Emploi intrans. A.− [Le sujet désigne les cloches] Sonner en carillon : 1. Du camp, maintenant éveillé, bourdonnant de vie, on entendait les cloches de toutes les paroisses carillonner à la volée, dans l'air limpide. Ce beau dimanche d'effroyable désastre avait sa gaieté, son ciel éclatant des jours de fête.
Zola, La Débâcle,1892, p. 24. − Poét. Se carillonner.Se répondre : 2. Petits et gros, clochers en fête,
De l'hôpital à l'évêché,
Dans ce bon ciel endimanché,
Se carillonnent, et s'entêtent,
À tue-tête! à tue-tête!
Laforgue, Les Complaintes,Complainte des cloches, 1885, p. 154. − P. méton. Se faire entendre, se manifester par des carillons. Les vêpres carillonnent sur la ville (Laforgue, Poésies complètes,1887, p. 163). − P. anal. Sonner, tinter. [Le chien] fait halte, suspendu sur trois pieds. Le grelot qui carillonnait s'est tu. Et c'est l'arrêt ... (Pesquidoux, Chez nous,1921, p. 207). ♦ P. méton. : 3. Matin charmant! Une joie inouïe carillonne à travers la ville; c'est l'heure où les troupeaux la parcourent; chaque chèvre qui passe égrène en trottinant la note unique de sa clochette.
Gide, Journal,1910, p. 292. B.− [Le suj. désigne une pers.] 1. Carillonner sur une cloche. Sonner un carillon (cf. A. Dumas Père, La Barrière de Clichy, 1851, I, 1, p. 18). − P. anal. Carillonner sur son verre (cf. Pourrat, Gaspard des Montagnes, Le Pavillon des amourettes, 1930, p. 42). ♦ Pop., par omission de la prép. Je tape, je carillonne les carreaux (Céline, Mort à crédit,1936, p. 634). 2. Actionner longuement la sonnette à la porte de quelqu'un. M. Charles sonna. Personne ne répondit. Il dut carillonner à plusieurs reprises (Aragon, Les Beaux quartiers,1936, p. 473). − Fam. Appeler au téléphone (cf. A. Simonin, Touchez pas au grisbi, 1953, p. 165). II.− Emploi trans. A.− [L'obj., gén. interne, désigne une chose] 1. Emploi factitif. Faire sonner en carillon. Carillonner les cloches. Les cloches carillonnées en cadence (A. France, Vie de Jeanne d'Arc,1908, p. 398). − [En parlant d'un carillon ou d'une horloge munie d'un carillon] Carillonner un air, l'heure. Le (la) faire sonner par un carillon : 4. ... la haute horloge flamande (...) carillonnait l'heure (...) chantait dans la nuit la marche du Temps, en la modulant sur des timbres divers.
Maupassant, Fort comme la mort,1889, p. 371. − P. anal. Deux clowns se disloquant en maillot une cloche dans chaque main, carillonnant un air de Martha parmi leurs gambades (A. Daudet, Numa Roumestan,1881, p. 260). 2. Carillonner une fête. L'annoncer par des carillons. Le bedeau « carillonne la noce » (P.-L. Menon, R. Lecotté, Au village de France,t. 2, 1954, p. 29). − Fig. ,,Proclamer avec éclat`` (Ac. 1932). Cette nouvelle ne doit pas être carillonnée partout (Ac.1932). B.− [L'obj. désigne une pers.] Carillonner qqn.L'appeler en actionnant la sonnette. Il aurait dû ... tout au moins tirer sa sonnette et carillonner les gens de l'hôtel (Mérimée, Dernières nouvelles,1870, p. 56). Rem. On rencontre ds la docum. carillonnement, subst. masc. Action de carillonner; bruit produit par un carillon. Un carillonnement formidable de sonnette (E. et J. de Goncourt, Journal, 1890, p. 1230; attesté ds la majorité des dict. du xixeet du xxesiècle). Prononc. et Orth. : [kaʀijɔne], (je) carillonne [kaʀijɔn]. Ds Ac. 1694-1762 s.v. carrillonner; ds Ac. 1798-1932 sous la forme mod. avec 1 r. Étymol. et Hist. 1. xves. « sonner en carillon » (Journ. d'un bourgeois de Paris, p. 413 ds Gdf. Compl.); 1648 p. anal. « faire retentir un instrument à percussion » (Scarron, Virgile travesti, t. 1, p. 79a ds Richardson, Lexique de Scarron); 2. 1653 fig. « annoncer à grand bruit » (Mainard, Lett., p. 685 ds Gdf. Compl.); 1835 au propre fête carillonnée (Ac.). Dénominatif de carillon*; dés. -er. Fréq. abs. littér. : 42. DÉR. Carillonneur, subst. masc.Personne chargée de carillonner. Quasimodo était donc carillonneur de Notre-Dame. Avec le temps, il s'était formé je ne sais quel lien intime qui unissait le sonneur à l'église (Hugo, Notre-Dame de Paris,1832, p. 177).Rem. On rencontre ds la docum. carillonneuse, adj. fém. L'ardeur carillonneuse de Quasimodo (Hugo, Notre-Dame de Paris, 1832 p. 300).− [kaʀijɔnœ:ʀ], fém. [-ø:z]. Ds Ac. 1740 et 1762 avec 2 r. Ds Ac. 1798-1932 avec 1 r. − 1reattest. 1601 (Jean Le Petit, Hist. de Hollande, t. 1, liv. 8, p. 329 ds Delboulle Notes); de carillonner, suff. eur2*. − Fréq. abs. littér. : 13. |