| CAGNEUX1, EUSE, adj. et subst. A.− Emploi adj. Qui a les genoux tournés en dedans. Cheval cagneux; avoir l'air, être cagneux. Cf. boiteux, tordu.La rosse était haute, cagneuse, osseuse, sans poils à la crinière, le sabot rongé, les fers battants (Flaubert, Par les champs et par les grèves,Touraine et Bretagne, 1848, p. 244): 1. ... ce prince de vingt-six ans tenait mal sur ses jambes décharnées et cagneuses, jointes à des cuisses creuses par deux genoux énormes qui ne voulaient point se séparer l'un de l'autre.
A. France, Vie de Jeanne d'Arc,1908, p. 195. − P. métaph. 1. [En parlant d'une chose concr.] :
2. Cette pauvre masure (...) était amarrée au pied du mât (...) Tout ce dont elle était faite offrait un aspect d'avarie, les fers étaient rouillés, les cuirs étaient gercés, les bois étaient cariés (...) Les roues étaient cagneuses.
Hugo, L'Homme qui rit,t. 3, 1869, p. 197. 2. [En parlant d'une chose abstr.] :
3. ... une fois tirée d'affaire [en 1918] (...) elle [la Révolution] reprit tranquillement sa besogne révolutionnaire, laissant pour gage aux nigauds chaleureux les Victoires cagneuses et les Poilus de fer-blanc des 36 000 Communes de France.
Bernanos, La Grande peur des Bien-Pensants,1931, p. 413. B.− Emploi subst. : 4. ... un acteur déguisé en Anglais, (...), tricota des jambes, sautant droit, se frappant les talons, puis, se rapprochant comme un cagneux le boulet des genoux, il s'élançait à l'improviste...
Huysmans, Les Sœurs Vatard,1879, p. 138. Prononc. et Orth. : [kaɳø], fém. [-ø:z]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. 1607 pieds coigneux (Horace de Francini, Hippiatrique, Des pieds de coing, chap. LXXII, 552 d'apr. Barbier ds Proceedings of the Leeds Philosophical and Lit. Society, t. 2, 1928-32, no1); 1614 caigneux (Paul Hurault ds R. Hist. litt. Fr., t. 6, 15 janv. 1898, p. 287). Dér. de cagne1* « chienne »; suff. -eux*; l'hyp. d'un empr. au prov. cagnous (Sain. Autour Sources, p. 140) fait difficulté étant donné que celui-ci n'est attesté qu'en prov. mod. (Mistral s.v.); le rattachement à un étymon lat. cuneus « coin » (Barbier, loc. cit.) présente des difficultés phonétiques et l'ex. de Francini cité ici atteste plutôt un croisement isolé avec coin qui n'est confirmé ni par l'emploi mod. du mot ni par les différents sens de cagneux et des formes correspondantes dans les dial., où la comparaison avec les traits physiques ou moraux de la chienne ou du chien semble rester bien vivante (cf. FEW t. 2, p. 184a). Fréq. abs. littér. : 42. Bbg. Dauzat Ling. fr. 1946, p. 28. |