| BÛCHER1, subst. masc. A.− Rare. Amas de bois destiné à être brûlé dans une cheminée, dans une galerie de mine, etc. Des vases où fumaient des bûchers d'aloès / Pour embaumer la nuit la brise des palais (Lamartine, La Chute d'un ange,1838, p. 977): 1. ... le bûcher qui flambait clair et la cheminée, l'ample chancelière où plongeaient, accotés, les pieds de M. de La Hurmerie, trahissaient les goûts de bien-être, toute la douilletterie frileuse du personnage.
Courteline, Messieurs-les-Ronds-de-cuir,1893, 1ertabl., 2, p. 32. 2. ... dans les mines profondes du Hartz, on employait (...) pour le travail régulier par le feu, des bûchers dressés le long de la paroi.
J.-N. Haton de La Goupillière, Cours d'exploitation des mines,1905, p. 303. − P. méton., usuel. Dépendance, réduit où l'on entrepose la provision de bois de chauffage. Aller chercher du bois au bûcher (Ac.1835-1932) : 3. L'hiver au pauvre fut rigide,
Il en a compté les longs jours,
En mesurant son bûcher vide
Quand la neige tombait toujours.
Murger, Les Nuits d'hiver,Printanière, 1861, p. 88. ♦ Région., rare. Hangar-bûcher. Votre maison, avec votre écurie et votre grand hangar-bûcher (R. Martin du Gard, Le Testament du Père Leleu,1920, p. 1143). B.− Amas de bois sur lequel sont brûlés des êtres ou des objets. 1. [Le bûcher a une signif. princ. relig., rituelle] a) [Pour offrir un holocauste, dans certains rites anc.] ... sur ce bûcher, on offrit les bœufs en sacrifice. Ils furent consumés en holocauste à Jéhovah (Renan, Drames philos., L'Eau de jouvence, 1881, p. 491). − P. compar. : 4. Que Paris s'effondrât, qu'il brûlât comme un immense bûcher d'holocauste, plutôt que d'être rendu à ses vices et à ses misères, à cette vieille société gâtée d'abominable injustice!
Zola, La Débâcle,1892, p. 590. b) [Pour incinérer les morts, chez les Anciens et dans certaines sociétés primitives] Dresser un bûcher (Ac. 1798-1932); bûcher funèbre. Le bûcher était haut d'un mètre environ; on disposa dessus le corps (Maupassant, Contes et nouvelles,t. 2, Le Bûcher, 1884, p. 1304): 5. ... ces bûchers dont parle Lucrèce et que les Athéniens frappés par la maladie élevaient devant la mer. On y portait les morts durant la nuit, ...
Camus, La Peste,1947, p. 1247. 2. [Le bûcher comme instrument de répression, de supplice, servant à brûler des pers. ou des obj. condamnés au feu, dans l'Antiquité, ou au temps de l'Inquisition] Le bûcher des martyrs, des hérétiques; monter sur le bûcher : 6. Quant à nous, les Chrétiens, nous irons nous agenouiller devant la croix que la pieuse victime baisait avec tant d'ardeur sur son bûcher, ...
Coppée, La Bonne souffrance,1898, p. 151. 7. Nous usons comme de dons gratuits, de mille choses qui ont été payées par des vies humaines, de perles dont le pêcheur a vomi le sang, de livres échappés au bûcher...
Valéry, Littérature,1930, p. 90. − P. métaph. : 8. Un esprit ne peut supporter un autre esprit, son égal, son semblable, qui ne pense pas comme lui. Ce travers, où il y a de l'estime, et même de l'amour trompé, a fait les bûchers d'autrefois, et les grands bûchers d'aujourd'hui, qui sont les guerres.
Alain, Propos,1931, p. 993. − P. méton. Le supplice lui-même. Condamner au bûcher, être passible du bûcher. Vouer son assassin à l'estrapade, à la roue et au bûcher (Farrère, L'Homme qui assassina,1907, p. 280). PRONONC. ET ORTH. : [byʃe]. Fér. 1768 indique : ,,1rebrève`` et propose en conséquence d'écrire bucher. ,,L'Acad. met l'accent quoique la syllabe soit brève. C'est une inattention``. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. Fin xiies. buscier « bosquet » (Naiss. du Chev. au Cygne, 1380 dans Gdf. Compl.), attest. isolée; 2. 2emoitié xiiies. buchier « tas de bois » (Fabliaux, II, 149 dans T.-L.); av. 1630 « pile de bois sur laquelle on fait brûler les cadavres ou les condamnés au supplice du feu » (D'Aubigné d'apr. FEW t. 15, 2, p. 26b); av. 1650 « pile de bois où l'on faisait brûler les morts » (Vau[gelas], Quin. 1. x. dans Rich.); 1674 (Rac., Iphig., V, 2 dans Littré); 3. [xiiies. dans FEW]. av. 1544 « lieu où l'on garde le bois à brûler » (Desper., Contes, XXXI dans Gdf. Compl.).
Dér. de bûche1* « morceau de bois »; suff. -er (-ier*). STAT. − Fréq. abs. littér. : 626. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 956, b) 881; xxes. : a) 1 173, b) 667. |