| BÛCHE1, subst. fém. A.− Morceau de bois débité en rondin ou en quartier, le plus souvent utilisé pour le chauffage. Un feu de bûches; fendre des bûches; mettre une bûche au feu, dans la cheminée. ♦ P. métaph. J'étais stupide, je suis devenu méchant; j'étais bûche, je suis devenu tison (Hugo, Les Misérables, t. 1, 1862, p. 338). − Vx. Bûche du portier. Bûche que les concierges prélevaient sur toute charretée de bois livrée aux locataires de la maison : 1. Elle avait des querelles de l'autre monde avec le concierge, à qui elle arrachait des mains la bûche dite du portier, lorsqu'il la choisissait un peu trop grosse.
G. Sand, Hist. de ma vie,t. 2, 1855, p. 389. − Spéc. Bûche de Noël, bûche du réveillon (rare). Gros rondin qu'on brûlait dans la cheminée pendant la veillée de Noël, et qui devait durer toute la nuit (cf. infra B 4) : 2. Messager de bonnes nouvelles,
Quand Noël au gai carillon
Fait pétiller les étincelles
De la bûche du réveillon;
Célébrant la vieille coutume,
Entre le soir et le matin,
Sur la braise qui se consume
Nous ferons griller du boudin.
Murger, Les Nuits d'hiver,La Chanson d'hiver, 1861, p. 43. − Arg. Bûche, bûche plombante. Allumette. « Passeme tes bûches, l'ancien! » Mi (...) de li tend' m' boîte (M. Stéphane, Ceux du Trimard,1928, p. 87). Rem. Région. (Suisse). On rencontre dans la docum. le subst. fém. bûchille. a) Copeau résultant de l'équarrissage à la hache ou du rabotage d'une pièce de bois. L'amoncellement des bûchilles (A. Chapuis, La Pive et la grappe, Neuchâtel 1941, p. 30). b) Éclat de bois, bûchette servant à allumer le feu. Elle se préparait de la bûchille d'avance (C. F. Landry, Bord du monde, Lausanne 1940, p. 309). B.− P. anal. 1. BÂT. [En tant que bois de construction] Cf. rondin.Une cabane de bûches et de roseaux (Claudel, L'Annonce faite à Marie,1reversion,1912, p. 38);un revêtement de bûches jointoyées avec de la terre (E. Schneider, Le Charbon,1945, p. 157). 2. ÉCON. DOMESTIQUE a) Vx. Bûche économique. Aggloméré d'anthracite, de houille et d'argile, à combustion très lente. Les chenets en fonte supportaient une bûche économique (Balzac, Le Cousin Pons,1847, p. 177). ♦ P. compar. Il est avare comme une bûche économique (Murger, Scènes de la vie de bohème,1851, p. 290). b) Rare. Bûche à gaz. Bûche factice, fonctionnant au gaz. Le verre qui va s'écraser dans la cheminée contre les bûches à gaz incandescentes (Camus, Requiem pour une nonne,adapté de W. Faulkner, 1956, p. 842). Rem. Cf. aussi bûche de charbon. Je fais brûler mon feu en soufflant de l'oxygène sur des bûches de charbon (Alain, Propos, 1922, p. 413). 3. MUS. Instrument à cordes dont la caisse de résonance est en forme de bûche. Rem. Attesté dans la plupart des dict. du xixes. ainsi que dans Lar. 20e. 4. PÂTISS. (cf. supra A spéc.). Bûche de Noël. Gâteau en forme de bûche consommé aux fêtes de Noël (cf. Ac. Gastr. 1962). 5. Divers a) Fragment dur, plus ou moins grand, que l'on trouve parfois dans le tabac à fumer. Une cigarette dont le papier crevait, percé par les bûches pointues du caporal (Huysmans, À rebours,1884, p. 93). b) Rare. Barre*, bâton* que tracent les enfants qui apprennent à écrire. Un cahier d'écriture pour le premier âge, portant (...) des bûches, des pointages, des o, des a et des u (G. Grison, Paris horrible et Paris original,1882, p. 214). C.− Emploi fig. 1. Fam. Personne à l'esprit lourd et borné. Synon. fam. lourdaud : 3. L'avis seul de Victor, de Musset ou Gautier
Est bien plus, suivant moi, que celui de ces bûches
De ce ramas sans nom de butors et de cruches,
Qui sous leur os frontal ont un épais mastic,
Et qui forment partout la masse du public.
A. Pommier, Crâneries et dettes de cœur,1842, p. 30. − Emploi adj. Je ne suis peut-être pas aussi bûche que j'en ai l'air (G. Sand, Mademoiselle Merquem,1868, p. 232). − Rare. [Avec une valeur injurieuse] Bûche! Enfant de bûche! C'est toi le couillon Ferdinand! Le myope! L'aveugle! L'absurde! Le sourd! Le manchot! La bûche! (Céline, Mort à crédit,1936, p. 414).Triple bûche! (A. Arnoux, Roi d'un jour,1956, p. 200). 2. Jeux de cartes (baccara, etc.) Carte sans valeur, dix ou figure. Toujours les nuits passées à cartonner au cercle : « Carte (...) Bûche (...) Bac » (Coppée, Les Vrais riches,1891, p. 175). 3. Locutions a) [P. réf. à l'état inerte d'une bûche] ♦ S'endormir, dormir comme une bûche. Synon. s'endormir, dormir comme une souche(cf. Maupassant, Contes et nouvelles, t. 1, Ma Femme, 1882, p. 671). ♦ N'entendre pas plus qu'une bûche. Tu feras bien de prévenir MmeCornu de sa surdité, car le pauvre bonhomme n'entend pas plus qu'une bûche (Flaubert, Correspondance,1861, p. 460). ♦ P. plaisant. Caresser une bûche; frapper une bûche pour en tirer des étincelles. S'occuper à des choses vaines, n'obtenir aucun résultat : 4. La littérature (comme nous l'entendons) serait alors une occupation d'idiot. Autant caresser une bûche et couver des cailloux.
Flaubert, Correspondance,1853, p. 165. b) [P. réf. à la solidité et la résistance du bois] Avoir la tête dure comme une bûche : 5. − Ce sont des sauvages, dit le chef d'orchestre; pour moi, je ne demanderais pas mieux, mais ils ont la tête plus dure que des bûches; tâchez de leur faire entendre raison.
Champfleury, Les Souffrances du professeur Delteil,1855, p. 205. PRONONC. : [byʃ]. Demi-longueur pour [y] dans Passy 1914. Enq. : /byʃ/. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. a) Ca 1130-60 busche « morceau de bois destiné à être brûlé » (Couronnement Louis, éd. E. Langlois, 1021); 1690 busche de Noël (Fur.); d'où art culin. bûche de Noël ca 1920 d'apr. une communication orale faite à W. Lacher (FEW t. 15, 2, p. 24b); b) p. anal. de forme 1867 « fragment infumable du tabac » (Lar. 19e); 1878 terme de jeu « mauvaise carte » (cité par Esn.); 2. 1640 p. métaph. « sot » (Oudin Curiositez).
D'un lat. vulg. *buska « bois, bosquet » neutre plur. collectif, devenu fém. sing., de *buskum, d'orig. germ. (J. Brüch dans Z. rom. Philol., t. 36, 1912, p. 584; FEW t. 15, 2, p. 31); buska est attesté dans le domaine gallo-rom. au xies. au sens de « bois de chauffage » (St Florent, A H Poitou, 2, 127, cité par J. Hubschmid dans Vox rom., t. 29, 1970, p. 107), le sens de « bois, bosquet, buisson » peut se déduire des dér. a. fr. enbuschier « se mettre dans un guet-apens » (1155 Wace, Brut dans Keller, p. 270a), esbuschier « se mettre en embuscade » (ibid.), desbuchier « sortir d'un bois, d'une cachette » (1160-74, Rou dans T.-L.). |