| BRUTALITÉ, subst. fém. I.− [En parlant d'une pers.] A.− Caractère d'une personne brutale et manifestation de ce trait de caractère dans ses sentiments, ses passions. Sa brutalité lui a fait beaucoup d'ennemis (Ac.1798-1932);assouvir sa brutalité (Ac. 1798-1932, DG);brutalité des passions (Guizot, Hist. gén. de la civilisation en Europe,1828, p. 413): 1. Il [Montessuy] jouissait de tout ce qu'il y a de précieux dans la société avec la brutalité de son tempérament et la finesse de son esprit.
A. France, Le Lys rouge,1894, p. 23. 2. ... il [Antoine] se rappelait surtout un article intitulé Bagnes d'enfants, où l'on décrivait par le menu la misère matérielle et morale des pupilles, mal nourris, mal logés, soumis aux punitions corporelles, abandonnés souvent à la brutalité des gardiens.
R. Martin du Gard, Les Thibault,Le Pénitencier, 1922, p. 679. 3. Mais Agnès avait ressenti la brutalité de son ressentiment.
Drieu La Rochelle, Rêveuse bourgeoisie,1939, p. 110. B.− [En parlant du comportement physique d'une pers.] Geste ou acte empreint de violence, manquant de modération. Faire une brutalité (Ac.1798-1878).Il lui avait pris le poignet avec une brutalité sauvage (Maupassant, Contes et nouvelles,t. 1, L'Inutile beauté, 1890, p. 1149). − [En parlant du comportement en société] Manque de civilité dans les manières, les paroles allant jusqu'à la grossièreté. Parler, répondre avec brutalité (Ac. 1835-1932). ... la brutalité des manières de l'Empereur (Las Cases, Le Mémorial de Sainte-Hélène,t. 2, 1823, p. 53): 4. Je sais bien que, dans sa bouche, cela ne tire pas à conséquence et que la cordialité de son ton réparait la brutalité des propos; ...
Gide, L'École des femmes,1929, p. 1269. − Au plur. Des brutalités. Paroles, gestes, attitude manifestant une manière d'être. Dire des brutalités à qqn (Ac. 1798-1932); les brutalités de la soldatesque (Van der Meersch, Invasion 14,1935, p. 228). II.− [En parlant d'un inanimé] A.− [L'accent étant mis sur la violence] Caractère de quelque chose qui est dur à supporter, qui n'est pas assez nuancé. La brutalité du climat de l'Amérique du Nord (Carrel, L'Homme, cet inconnu,1935, p. 369): 5. Je me suis loué quelquefois; on voudra bien me pardonner cette impartialité dont je n'ai pas d'ailleurs abusé : la brutalité de ma censure expiera la modération de ma louange.
Chateaubriand, Essai sur les Révolutions,t. 1, préf., 1826, p. XLVI. B.− [L'accent étant mis sur la soudaineté] Caractère de ce qui se déclenche rapidement et dure brièvement. La brutalité de l'attaque (Malègue, Augustin,t. 1,1933, p. 226);... abasourdi par la brutalité de la défaite (Ambrière, Les Grandes vacances,1946, p. 190). C.− Au fig., domaine artistique 1. En bonne part. Puissance témoignant de la grandeur du talent de l'artiste : 6. Une brutalité splendide éclate en ces « Chants de la Forge » [de Siegfried], chants presque cris, palpitants de juvénile robustesse et de fruste beauté.
Willy, Notes sans portées,1896, p. 199. 2. Péj. Manque de finesse, désir de choquer. La brutalité des peintures, la hideur des dessins (Flaubert, Bouvard et Pécuchet,t. 2, 1880, p. 120). PRONONC. : [bʀytalite]. ÉTYMOL. ET HIST. − 1. 1540 « caractère de ce qui est brutal (d'une pers.) » (Amadis, I, 46b dans Rom. Forsch., t. 32, p. 21); 1659 « id. (d'un inanimé) » (Molière, Précieuses ridicules, éd. du Seuil, p. 107a); 2. 1680 « action brutale » (Rich.).
Dér. de brutal*; suff. -ité*; à rapprocher du lat. médiév. brutalitas « caractère de ce qui est propre à la brute » (1243-48 dans Mittellat. W., s.v., 1593, 20). STAT. − Fréq. abs. littér. : 830. Fréq. rel. littér. : xixes. : a) 518, b) 1 428; xxes. : a) 2 000, b) 1 118. |